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Pigeons: ce que le gouvernement a vraiment "cédé"

Publié le 05 octobre 2012 par Juan
Pigeons: ce que le gouvernement a vraiment

« S'il y a des mesures qui choquent ou des mesures qui sont de nature à dissuader l'investissement, notamment dans ces jeunes entreprises innovantes, il faudra y revenir »
Pierre Moscovici.
Cette simple annonce, jeudi 4 octobre matin sur France Inter, a mis le feu aux poudres parmi nombre de confrères blogueurs émérites. Capitulation, reniement, abandon, mauvais signaux, tout y est passé, tout a été dit.
La vigilance est évidemment nécessaire.
Dans Libération, la ministre déléguée Fleur Pellerin avait été claire contre la manipulation pigeonnesque. Mais c'était insuffisant. Jeudi était le moment de l'apaisement. Technique de l'édredon ou réel recul, nul ne savait puisque, sur le fond, aucune mesure n'avait été publiquement détaillée.
Quelques médias et blogueurs ont déjà loué « l'efficace » mobilisation des Pigeons. Reconnaissons l'efficacité. Dans leur registre - plus indécent, plus inacceptable - ces Pigeons ont crié à l'indignation 2.0, avec autant de rage qu'un ouvrier d'Aulnay ou un métallo de Florange comme si les projets fiscaux du gouvernement allaient fermer leur usine à plus-value.
D'autres ou les mêmes commentateurs médiatiques ont aussi titré sur le recul du gouvernement. C'est de bonne guerre, même si cette guerre du redressement est loin d'être terminée. L'action d'un gouvernement se juge sur une relative durée. La récente annonce - non confirmée - d'un gigantesque allègement des cotisations sociales sur les salaires moyens, à l'échelle du quinquennat, méritera de larges analyses quand les projets se préciseront. Laissons à d'autres le soin de couiner sur l'éventuel relèvement de la CSG. 

Fallait-il rappeler qu'un projet de loi de finances n'est... qu'un projet de loi ? Tous les projets de loi, même et surtout sous la précédente administration, font l'objet de négociation, de débat, d'amendements. Ces derniers ne se dévoilent pas souvent au grand public, on les apprend parfois avec retard. On se souvient de la dernière loi de finances du quinquennat Sarkozy. Ou de l'adoption de la réforme des retraites en 2010. L'enfer s'était aussi glissé dans les détails. Il avait fallu lire et dépouiller les comptes-rendus parlementaires, ou les projets de décrets.
Quelques Pigeons ont donc été reçus par Pierre Moscovici et Fleur Pellerin, ceux-là qu'ils traitaient d'assassins fiscaux quelques jours plus tôt. Et maintenant ?

Dans cette affaire, le MEDEF a été ridicule. « Les dindons de la farce c'est les syndicats patronaux, qui n'ont rien calculé et se sont fait déborder » a commenté Samuel Laurent sur Twitter. Le dérapage de Laurence Parisot - qui évoqua un « racisme anti-entreprises » a définitivement disqualifié son auteur. Que dire de l'ancien parti sarkozyste, inaudible et tout autant débordé ?
Jeudi en fin d'après-midi, bien après les réactions, Moscovici a livré quelques conclusions de son entretien avec « des représentants du monde des PME, notamment celles des secteurs à haute technologie ».
Primo, a-t-il rappelé, « l’ensemble des revenus du capital, y compris les plus-values, est soumis au barème de l’IR ». Voilà pour les principes. Mais, reconnaît-il: « les plus-values issues de la cession d’une entreprise, notamment d’une PME qu’un entrepreneur cède après l’avoir lui-même développée, cela ne peut pas être assimilé à une rente. »
La véritable concession est celle-ci: même si les Pigeons ont fait mine de ne pas voir que le PLF2013 prévoyait déjà divers abattements (en faveur des entrepreneurs qui conservaient leurs actions, pour les cas de retraites, etc), Moscovici a accepté d'« améliorer les conditions d’exonération pour les entrepreneurs qui réinvestissent dans une nouvelle entreprise la plus-value qu’ils ont dégagée sur l’entreprise qu’ils dirigeaient jusque là.»
Et il a précisé:
« Dorénavant, lorsqu’un entrepreneur cède sa société et réinvestit tout ou partie de la plus-value, il bénéficiera d’une exonération à hauteur de la part réinvestie. Cette exonération sera donc totale si la totalité de la plus-value est réinvestie ;
Par ailleurs, il pourra bénéficier de la mesure même s’il occupe des fonctions dirigeantes dans l’entreprise où les sommes sont réinvesties. Il est normal que l’on souhaite participer à la gestion d’une entreprise où l’on place ses intérêts. »
Il ajouta également que les plus-values d'actions d'entrepreneurs cédées après 5 ans seront taxées forfaitairement à 19%. Il faudra calculer l'impact de cet aménagement. 
Le ministre a conclu son intervention par un engagement qui lui sera rappelé:  « Nous souhaitons taxer la rente, pas la prise de risque
A bon entendeur...
Lire aussi le compte-rendu d'Henri Verdier.


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