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CESU : la fin des cotisations au forfait ?

Publié le 07 octobre 2012 par Didierk

CesuLa nouvelle a fait l’effet d’un électrochoc dans le petit monde des profs indépendants (et des indépendants salariés CESU en général) : le gouvernement s’apprête à faire disparaître la possibilité donnée aux familles de payer les charges sociales en base forfaitaire (aujourd’hui 6,60 € de l’heure, quel que soit le salaire horaire net) et par conséquent de rendre le régime réel obligatoire (les charges représentent alors 82% du salaire net).

Concrètement, une heure de cours payée 35 € de l’heure qui auparavant revenait à la famille à 41,60 € reviendrait désormais à 63,91 € - soit plus de 22 € d’augmentation de l’heure 8O

L’information est disponible par exemple sur nouvelle fenêtrecet article du Monde, nouvelle fenêtrecelui-ci des Échos,…

Un nouvelle fenêtreautre article évoque que Bercy ne serait pas opposé au retour de l’abattement de 15% des charges calculées au réel, abattement supprimé par le précédent gouvernement.

En très bref, pour ceux qui n’ont pas tout suivi

Cette disposition fera partie de la discussion budgétaire concernant les comptes de la sécurité sociale.

La famille peut aujourd’hui décider de payer les charges sociales sur la base dite forfaitaire (6,60 € de l’heure) ou sur la base réelle (82% du salaire net).
Personnellement, j’explique le système CESU a plus de la moitié des familles avec lesquelles je travaille, et leur donne le choix pour les charges, on comprend aisément que leur choix est vite fait…

De 2006 à 2010, lorsqu’un employeur à domicile déclarait au réel, les charges sociales étaient réduites de 15% : c’est cette mesure qui pourrait être adoptée comme amendement. Les charges sociales représenteraient alors 70% du salaire net.

Un tableau (pdf) résume la situation : pdfCESU : simulation

Ce tableau comporte par ligne le salaire horaire net, le coîut pour la famille en cas de charges sociales forfaitaires, le coût en cas de charges au réel, le coût en cas de charges au réel moins 15%, et les différences (Δ).

Ainsi, pour un salaire horaire net de 35 €, le surcoût sera de 22,3 € en cas de charges réelles, et “seulement” de 18 € en cas de charges au réel moins 15%.

Les arguments du gouvernement

La mesure est sensée rapporter 200 à 300 millions d’euros au budget de la sécurité sociale, et est également sensée renforcer les droits sociaux des employés.

Certes, on comprend le premier argument.

On comprend également le deuxième : une bonne partie des employés à domicile est constituée de personnes peu qualifiées, œuvrant dans le secteur de l’aide ménagère; ces personnes sont faiblement rémunérées (leur taux horaire ne dépasse guère 1,4 fois le SMIC, soit 11 € de l’heure), et elles ne sont pas toutes très au fait des subtilités du système; on peut penser que beaucoup se sont fait imposer la base forfaitaire; accroître leurs droits à la retraite, leurs droits à une meilleure protection sociale et à de meilleures indemnités chômage ne semble pas une aberration.

A contrario, les salariés CESU mieux rémunérés tels que les profs à domicile (y compris les profs de piano, de sculpture,….), les “bricoleurs professionnels”, les jardiniers,…, ont librement contracté la base forfaitaire avec leurs employeurs dans le respect de la législation, et ont en toute connaissance de cause accepté une protection sociale minimum en échange d’une rémunération correcte, quitte à gérer eux-mêmes une partie de leurs droits sociaux via des moyens privés (mutuelle, épargne-retraite,…).

On peut discuter pendant des heures du bien-fondé de l’un ou l’autre point de vue, opposer les tenants d’un État protecteur des citoyens (même malgré eux) et ceux d’un État dont le rôle plus limité est de permettre l’épanouissement des libertés et responsabilités individuelles (même si inévitablement certains seront pénalisés), vieux et passionnant débat sur les libertés formelles et les libertés réelles.

L’objectif de ce billet n’est pas de lancer des débats sur la philosophie politique des diverses formes de libéralisme (ou de dirigisme), merci donc de limiter la portée de vos commentaires à des éléments factuels.

Quelles conséquences pour les salariés CESU ?

Des conséquences catastrophiques pour les profs indépendants.

Pour les profs indépendants, dont le taux horaire est de l’ordre de 35 € et qui sont majoritairement déclarés au forfait, la situation pourrait devenir très difficile.

Combien de familles seront-elles d’accord pour nous déclarer au réel, et supporter une augmentation de plus de 20 € de l’heure de cours ?

Et que vont faire les familles qui ne pourront pas ou ne voudront pas nous déclarer ?

Le problème se pose en des termes similaires pour tous les salariés CESU dont le taux horaire est supérieur à 20 € de l’heure : dans ce cas, le surcoût pour la famille sera de 10 €.

Des conséquences nettement moins catastrophiques pour les organismes

Un étudiant qui donne des cours via un organisme mandataire est salarié par la famille, ses charges sont en base forfaitaire.

S’il est rémunéré 15 € net de l’heure, les charges sur son salaire augmenteront de 5,8 €; on peut alors imaginer une baisse de la rémunération de l’intervenant de 1 ou 2 euros et/ou une légère augmentation du prix payé par les familles et/ou un léger coup de rabot sur les marges, cela ne sera pas trop difficile aux organismes leaders de survivre.

Sauf pour certaines structures

Il existe de très rares structures mandataires qui ont fait le choix de la qualité : les intervenants sont sérieux et rémunérés correctement, par exemple jusqu’à 30 € de l’heure. Le surcoût sera alors de plus de 18 € - cela me semble ingérable.

Le soutien scolaire de qualité menacé

La situation paradoxale sera qu’alors que la demande de cours de qualité ne cesse de croître, l’offre risque de cesser d’exister.

Vers le travail non déclaré ?

Ne nous leurrons pas : si le texte de loi passe, un cours à 35 euros de l’heure déclaré obligera la famille à verser 25 euros de charges pour récupérer 30 euros l’année suivante grâce à la réduction d’impôt.

On peut aisément imaginer que la famille préfère alors verser 30 euros en espèces au prof.

Va-t-il refuser ?

Vais-je refuser ?

Et vous, que feriez-vous ?

Que pouvons-nous faire et quand ?

Le projet de loi sera déposé au parlement le 10 octobre, le vote devrait avoir lieu le 26, le texte sera alors transmis au Sénat qui devrait statuer le 9 novembre.

Jusqu’au 10 octobre

Il faudrait a priori contacter Mme la ministre Marisol Touraine pour exposer notre point de vue.

Si vous avez des idées…

Du 10 au 26 octobre

Nous pouvons contacter nos députés.

Thierry Planterose, prof de maths indépendant à Paris, a fait parvenir aux profs de sa connaissance un courrier dont voici des extraits :

L’objectif de cet e-mail est d’amplifier la contestation, grâce à l’aide de ceux et celles d’entre vous qui voudront bien y participer.

Ma conviction est que bien que notre profession soit méconnue et que nous soyons peu nombreux, nos arguments sont solides et peuvent toucher par leur justesse des hommes politiques de tous bords.

Pour ceux qui, comme moi pensent que la mesure doit être combattue et se demandent comment agir, voici une première proposition : nous pouvons écrire à nos députés et sénateurs. Leurs coordonnées sont librement consultables sur le site de l’assemblée nationale : nouvelle fenêtrehttp://www.assemblee-nationale.fr/qui/.

J’adresse dès demain à mon député mon courrier par mail, ensuite par la poste et puis j’essaierai d’obtenir un rendez-vous auquel j’espère pouvoir me présenter avec d’autres profs de ma région.

J’aurai une démarche similaire avec d’autres députés, sénateurs, anciens hommes politiques de mon département.

Vous pouvez vous inspirer librement de mon texte (ou même faire un copier/coller du .doc joint) pour écrire vous aussi à votre député.

Idéalement, chacun d’entre nous peut essayer d’entrer en contact avec un ou plusieurs députés ou sénateurs de son département, toutes opinions politiques confondues.

Dans l’immédiat, je suis volontaire pour centraliser nos actions de façon à ce que plusieurs profs géographiquement proches se répartissent les courriers.

J’invite ceux qui sont intéressés pour participer à cette action à le faire savoir afin que nous envisagions ensemble tous les moyens possibles pour faire connaître nos revendications.

Voici une liste non exhaustive de quelques idées pêle-mêle qui seront peut-être mises en place avec votre concours :
- nous faire connaître en contactant des journalistes, blogueurs, leaders d’opinion, etc
- parler de nos revendications sur twitter en utilisant par exemple le hashtag #forfaitCESU
- ouvrir un site/blog dédié
- joindre nos revendications de profs particuliers à celles d’autres acteurs des services à la personnes (femmes de ménage, jardiniers, etc).

Merci de m’avoir lu. J’espère recevoir de nombreux e-mails de votre part.

Le courrier de Thierry en .pdf : pdfLettre à son député

Le même en .doc : wordLettre à son député

Pour contacter Thierry : Contacter Thierry Planterose>

Merci de contacter Thierry et pas moi si vous désirez vous joindre à ce mouvement.

Du 26 octobre au 9 novembre

Si le texte passe à la chambre, il faudra contacter les sénateurs. On verra à ce moment-là.

Réunion des profs indépendants les 10 et 11 novembre

12 octobre : cette réunion est annulée.

Cette annulation est totalement indépendante de ma volonté - elle est due à la
défection de la personne avec qui je devais organiser cette réunion.

Toutes mes excuses.

Mise à jour du 9 octobre

Plutôt que d’écrire d’autres billets, je vais mettre à jour celui-ci, essentiellement pour éviter d’avoir des commentaires qui se répandent un peu partout.

Actions terminées :

  • Un courrier a été adressé à Mme la ministre des affaires sociales et à M. le ministre du travail.
  • La liste de diffusion “Forfait CESU” est en place. Pour vous abonner : nouvelle fenêtreListe de diffusion forfait CESU
Mise à jour du 12 octobre

Je suis désolé de vous informer que la réunion de profs indépendants prévue les 10 et 11 novembre est annulée.

Cette annulation est totalement indépendante de ma volonté.

J’ai par conséquent modifié le billet.

Toutes mes excuses.

Mise à jour du 22 octobre

Un communiqué collectif est disponible à cette adresse : nouvelle fenêtreCommuniqué
À modifier si vous le désirez et à envoyer à tous ceux qui peuvent être intéressés (presse, décideurs, sénateurs, députés, parents,…).

On discute de “l’après” si la loi est votée en l’état : création d’une entreprise,…, sur nouvelle fenêtrele forum de Gautier Girard

Une pétition en ligne : nouvelle fenêtreNon à la taxation massive et destructrice des emplois à domicile !

Un forum dédié vient de s’ouvrir : nouvelle fenêtreForum des professeurs indépendants

Mise à jour du 25 octobre

Marjorie, prof de sciences indépendante, s’exprime à propos de la fin du forfait CESU.

La vidéo est extraite d’une émission d’actualité diffusée sur nouvelle fenêtreTélessonne le 24 octobre 2012.


nouvelle fenêtrepétition des “Dindons” sur FacebookMise à jour du 26 octobre

J’ai participé à un reportage à propos de la disparition du forfait CESU diffusé ce jour au JT de France 3 Centre.


Mise à jour du 11 décembre 2012

La loi est passée.

Je ferme les commentaires de ce billet.

Vous pouvez lire cet intéressant article de mon confrère Arnaud Glorion sur la curieuse attitude la FEPEM : nouvelle fenêtreLa FEPEM, unique organisation représentative du particulier employeur.
Un syndicat d’employeur qui applaudit une augmentation des charges sociales, ce n’est pas banal… sauf si…

Enfin, j’invite tous ceux qui vont devoir - contraints et forcés - créer une entreprise à lire le fil de ce forum : nouvelle fenêtreCréation d’une entreprise de cours particuliers à domicile.
Merci de lire les contributions avant de poser vos questions.

À bientôt pour un nouveau billet !





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