Magazine Politique

la liberté du renard dans le poulailler, on sait ce que cela donne !

Publié le 30 mars 2008 par Dagrouik

Le point publie une interview de Ségolène Royal où cette dernière rappelle quelques évidences historiques sur la gauche française. Celle-ci devrait exciter les blogeurs adeptes des constructions dialectiques pour petit cercle de gens qui s'entendent entre eux et adeptes de révolution qui font peur mais qu'on ne fera pas chez soi. Certains adeptes de la mauvaise foi et du sego-bashing ont déjà commencé à ré-écrire l'interview, n'est ce pas Monsieur Abadinte ? ( là c'est le cadeau WIKIO du mois).

Nul besoin d'acheter le point, le texte complet est disponible en ligne sur le site désirs d'avenirs . Cela permet de faire quelques économies.

Ségolène Royal fait quelques rappels sur la gauche française, et cela permet de rappeler que celle-ci a été d'abord non marxiste. On lira sans doute chez les vrais gauchistes des procès en intention avec déformation des écrits. D'ailleurs ça a déjà commencé ailleurs. Par exemple chez Abadinte.

Voici donc les deux extraits qui méritent réflexion. On notera la pertinence des questions:o)

Le grand débat n'est-il pas aujourd'hui entre le socialisme et le libéralisme ?

De quel libéralisme parlez-vous ? Si c'est du libéralisme politique, il est depuis l'origine indissociable du socialisme démocratique. Voyez Pierre Leroux, l'inventeur du mot socialisme en 1840, Jaurès justifiant contre Jules Guesde la défense du capitaine Dreyfus et affirmant que « l'individu est la mesure de toute chose » , Blum anticipant lors du congrès de Tours la dérive dictatoriale du communisme soviétique, Mitterrand abolissant la Cour de sûreté de l'Etat et la peine de mort. La liste serait longue de la contribution des socialistes au renforcement des libertés individuelles et politiques ! Si vous appelez libéralisme cette idéologie du laisser-faire, laisser-aller, qui, depuis l'aube du capitalisme, oppose les vertus de la main invisible du marché aux régulations de la puissance publique et l'harmonieuse convergence des intérêts particuliers à la construction volontaire de l'intérêt général, alors oui, le socialisme ne mange pas de ce pain-là et il n'est pas le seul. Le gaullisme non plus ne tombait pas dans ce panneau. Et la République s'est construite, non sans mal, non sans reculs, contre cette illusion naturaliste.

Le libéralisme n'est-il pas une belle idée de gauche à l'origine, inventée au XVIIIe siècle, contre la monarchie ? Pourquoi la gauche l'a-t-elle diabolisée ?

Je vais vous dire le fond de ma pensée : les véritables héritiers de la belle tradition du libéralisme politique, qui est au fond l'autre nom de la démocratie, ce sont tous ceux, à gauche mais pas uniquement, qui savent combien les libertés politiques sont fragiles si l'on fait l'impasse sur les inégalités sociales. C'était vrai hier et ça l'est toujours aujourd'hui. Car la liberté du renard dans le poulailler, on sait ce que cela donne !


Et oui, nous socialistes nous sommes des libéraux politiques. C'est pour cela que la gauche marxiste a toujours du mal, et je

we_can_do_it.jpg

rappellerai qu'il y a encore quelques années , l'extrême gauche vomissait le système parlementaire "bourgeois". On trouvait cela sur leur site Web, mais depuis étrangement ces textes d'archives ont disparus. Cela ne l'empêchait pas de se présenter aux élections pour toucher les subventions de l'état bourgeois pour payer ses permanents. C'est aussi ça l'entrisme trotskiste. Plus généralement, nous avons été les défenseurs des droits de l'individus et il serait peut être temps de s'en souvenir. Ainsi Ségolène cite-t-elle Pierre Leroux. Ce dernier est un des premiers penseurs du socialisme. Avant Marx, il est donc tombé dans les poubelles de l'histoire, mais même la Commune de Paris s'est souvenu de lui. J'en profite pour rappeler aux hystériques de la lutte des classes marxistes que Marx a écrit de très belles vérités sur la commune de Paris: Quant à moi, je montre, par contre, comment la lutte des classes en France créa des circonstances et une situation telles qu'elle permit à un personnage médiocre et grotesque de faire figure de héros. L'inventeur de la lutte des classes explique que son idée explique la tragédie de 1851 qui rappelons le engendra la guerre de 1870 et sans doute celle de 1914. Comme réussite on ne fait pas mieux. Bien sûr, il ne faut pas tout jeter ou tout adorer en bloc.

D'ailleurs c'est ce que Ségolène va préciser avec le modèle nordique, et en réponse à une question sur Tony Blair:

Mais il n'y a pas de modèle mécaniquement transposable, plutôt une inspiration à puiser dans les expériences des uns et

des autres, sans oublier que la social-démocratie traditionnelle est elle aussi en crise.(...) Et les dérégulations réalisées en Suède sont loin d'être toutes un succès, en particulier dans le domaine de l'énergie. Il n'y a donc pas de recette du socialisme moderne, mais des questions, des réussites et des échecs à mettre en commun pour que chacun, avec son histoire propre, en tire des conséquences opérationnelles pour son pays.

Si après ça on trouve encore des ânes pour expliquer qu'elle est blairiste, nous pourrons leur expliquer qu'ils font des résumés intellectuels violents. C'est hélas la marque de fabrique de certains, et surtout la tactique habituelle contre Ségolène Royal. Elle avait toujours dit que ce qui était bon à prendre devait l'être. Le corollaire parait évident à tout le monde, sauf à certains qui se font aveugles pour mieux hurler: Ce qui est mauvais doit être laissé de coté ou dénoncer. Chez Blair on peut par exemple parler du traitement statistique du chômage et de la précarité.

Les crypto-gauchistes de tout poil, toujours prêt à citer un philosophe ou écrivain vendu à 500 exemplaires pour faire de belles phrases et constructions écrite à base de dialectique pour CSP+ révolutionnaires en goguette vont s'étrangler en lisant Ségolène Royal faisant l'apologie de Tocqueville :

N'est-il pas temps que la gauche se réconcilie avec Tocqueville ?tocqueville_p_xx.jpg

Mais d'où tenez-vous que nous serions fâchés ? Vous connaissez le beau discours de François Mitterrand lors de la remise du prix Tocqueville à Octavio Paz. Ce qui rend toujours stimulante la lecture de Tocqueville, disait-il à cette occasion, c'est qu'il met le doigt sur les points les plus sensibles de la mise en oeuvre des idéaux démocratiques. Pour moi, il est l'un de ceux qui ont le mieux analysé et anticipé les conséquences de la suppression des hiérarchies statutaires de l'Ancien Régime et les paradoxes de cette « passion de l'égalité » qui en résulte. On connaît sa description des risques d'un Etat paternaliste, omniprésent et liberticide. Mais on oublie les pages visionnaires où il prédit que l'ignorance des inégalités réelles corrompt la dynamique démocratique et que la totale liberté économique porte atteinte à la liberté politique. Savez-vous qu'il a mis en garde contre les dangers d'un « nouvel Ancien Régime » reconstituant les privilèges de la naissance, la fortune remplaçant la caste ? Nous y sommes. J'aime le Tocqueville qui, sans rien abdiquer de sa vigilance critique, rend justice à la grandeur de ces révolutionnaires qui croyaient suffisamment en eux pour forcer le cours des choses. Et aussi le Tocqueville qui écrivait : « Je connais ma nation, je ne vois que trop bien ses erreurs, ses faiblesses et ses misères ; mais je sais aussi de quoi elle est capable . »

Un nouvel ancien régime, c'est cette oligarchie que je dénonce à mon petit niveau. Ségolène Royal dénonce ça, comme d'autres à Gauche. Reste à inventer et mettre en place les outils modernes pour briser les reins de cette oligarchie. Nous avons deux ans pour ça, et pour cela il faudra aussi que le congrès du PS soit celui des idées et des militants. Allez donc lire le blog des militants blogeurs pour le congrès. Tout se met en place doucement, nos critiques pro-UMP voudront tout tout de suite, mais bande d'andouilles, vous êtes au pouvoir, et nous dans la réflexion et l'action locale. Ainsi Ségolène Royal est elle attentive à des jeunes chercheurs-économistes, historiens, sociologues, philosophes... qu'elle écoute et ils analysent les mutations de notre monde renouvellent l'approche que nous avons des inégalités, des discriminations, des principes de justice, des risques et des opportunités de la mondialisation. Tout cela se fait à un rythme éloigné de la frénésie du pouvoir.

Vous nous opposerez l'action frénétique de Sarkozy, mais est-ce de cela dont les français veulent ? D'ailleurs ils commencent à se poser la bonne question: l'individu Sarkozy est il apte au poste de président de la République ? N'est ce pas lui le renard introduit dans le poulailler ?


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Dagrouik 2453 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines