Le commissaire à l'investissement Louis Gallois remet son rapport à cette heure, onze heures et trente minutes de la matinée du 5 novembre 2012, à Paris, Hôtel Matignon, dans l'un des salons du premier ministre.
François Hollande revient plus tard dans la journée, après quelque 20.000 kilomètres parcourus en 48 heures autour du globe.
Louis Gallois, ancien président de la SNCF puis d'EADS, livre donc un rapport déjà commenté sans avoir été lu. Dimanche 4 novembre, les éditions télévisées de BFM-TV faisaient encore état de fuites... pour ne rappeler que du déjà connu, du très rabâché. Dimanche soir, les Echos.fr publiaient un énième billet d'un journaliste qui croyait tout savoir et tout connaître, y compris la réaction du gouvernement lui-même. Pour un peu, l'illuminé nous donnerait les résultats du loto.
Le rapport Gallois est enfin publié, et déjà on s'en fiche. Le débat a été enterré par un peu tout le monde. Et chacun se renverra la responsabilité.Compétitivité : ce que dit Gallois, ce que le gouvernement en fera
A droite, jusque dans les colonnes du Figaro, on a fait semblant d'applaudir les mesures forcément fortes et sarko-compatibles que l'ancien patron allait recommander. A gauche, jusque dans les colonnes de Libération, on s'est insurgé sans lire à la moindre prétendue fuite, la premières des révélations qui laissaient à penser à un tournant ultra-libéral. Mitterrand avait trahi après 3 ans, Hollande devait trahir après 3 mois. Certains conseillers élyséens n'étaient pas sans responsabilité puisque l'une des fuites, celle-là même qui lança l'idée fumeuse du choc de compétitivité, aurait été livrée lors d'un déjeuner avec des journalistes du Monde.
On se désole même du besoin de recourir à des rapports d'experts. C'est pourtant une manoeuvre franchement utile et connue. Nicolas Sarkozy adorait la chose. En 5 ans de mandats, il avait ainsi créé une bonne trentaine de commissions ad-hoc pour pondre toutes sortes de rapports sur des sujets majeurs. Emanant de Sarkozy, la démarche était curieuse puisqu'il n'avait eu de cesse d'expliquer depuis 2002 qu'il savait tout et qu'il réformerait tout. Ces fanfaronnades n'impressionnaient plus.
Telle n'est pas la démarche de François Hollande. Pendant la campagne, il avait prévu et promis de la concertation qui, comme d'autres, passe par la production de rapports dits d'experts.
Le rapport d'un tiers permet surtout à son commanditaire d' « objectiver » certaines propositions. Notamment vis-à-vis de sa propre administration ou de son camp. On en sous-estime souvent le poids. C'est une erreur. Avec le rapport Gallois, on sait bien qu'on « achète » autant le contenu dudit texte que la caution de son auteur.
Au fait, on avait presque oublié que Louis Gallois était Commissaire à l'investissement.
Ce rapport, c'est un peu son job, non ?