"Millenium - T.1 : Les hommes qui n'aimaient pas les femmes" - Trilogie de Stieg Larsson, 2006

Par Grindsel


Millenium... il est quasi impossible de passer à côté. Je travaille en médiathèque, et les gens se l'arrachent depuis que nous l'avons acheté. Il y a trois mois d'attente pour obtenir un exemplaire dans l'une des huit médiathèques du réseau; nous avons dû racheter des exemplaires car nous nous les faisons voler régulièrement...

C'est un vrai phénomène littéraire qui au départ m'a intriguée, mais sans plus. Et puis ma mère m'a dit un jour: "Dis-donc, tu connais la trilogie Millenium, de l'auteur suédois, là...? J'ai attaqué le deuxième tome, j'ai lu le premier en trois jours!!" (il faut savoir que chaque tome fait presque 600 pages, tout de même) Là je me suis dit: Si ma mère s'y met aussi, il va falloir que je fasse quelque chose... Finalement, j'ai réussi par miracle à m'en procurer un exemplaire, mais je ne lis pas assez vite (pour cause d'autres lectures professionnelles urgentes), il est réservé deux fois, et il va falloir que je le rende avant de l'avoir fini. Aaaah! Je crois que je vais devoir l'acheter :-)

Je n'en suis donc qu'au premier tome, intitulé Les hommes qui n'aimaient pas les femmes - tout un programme! La base de l'histoire est celle-ci: un journaliste économique, Mikael Blomkvist, est contacté par Henrik Vanger, un important homme d'affaire, pour relancer une très vieille enquête laissée sans suite. La nièce de cet homme (Harriet) a mystérieusement disparu il y a 40 ans dans le huis clos d'une île, et quelqu'un prend un malin plaisir à le rappeler à Vanger tous les ans à son anniversaire.
Aidé par Lisbeth Salander, une jeune femme perturbée et asociale mais cependant très intelligente et fouineuse hors pair, il replonge sans trop d'espoir dans le dossier mille fois examiné, jusqu'au jour où une intuition tenace lui fait reprendre un dossier...

Ce premier opus nous offre une histoire bien construite, autour de personnages hors normes. Toute cette histoire se dégage des stéréotypes du polar, même si bien évidemment, il y a un crime, une victime et un "enquêteur", personnage en quête de vérité. Il y a aussi ceux qui montrent de la fausse bonne volonté, les gentils pourris, les femmes succubes et manipulatrices, etc... Que de bons ingrédients!

L'enquêteur n'est pas flic, il n'est pas alcolo, et ne fait pas des maquettes pour se détendre dans son bureau lorsqu'il fait nuit noire. Il vit le jour, n'a pas de passé tortueux, il aime les femmes et les femmes le lui rendent bien, c'est un journaliste économique engagé révolté par les magouilles des puissants. Bref, c'est un type normal, tout simplement. Voire même un peu trop normal, un peu trop cool et débonnaire. On a l'impression, au début en tout cas, que les évènements coulent sur lui sans l'atteindre. Il est agaçant de platitude. Et puis petit à petit, ils se réveille, comme sorti de sa torpeur au contact de gens au caractère bien trempé...

Lisbeth, la jeune femme qui l'aide, est une sociopathe très perturbée, violente, solitaire, mise sous tutelle par l'Etat car déclarée comme malade mentale grave. En fait, elle est d'une intelligence rare, et possède le don de savoir retrouver n'importe quelle info sur n'importe qui, car elle sait où chercher (même si ses méthodes ne sont pas des plus catholiques...). C'est un petit oiseau de 42kg qui rejette l'autorité sous toute ses formes et ne se laisse jamais faire, même par les plus costauds, et qui se venge quand on l'a offensée. Et croyez-moi, Lisbeth, faut pas venir l'emmerder!

Ensemble il vont mener l'enquête sur la disparition d'Harriet Vanger 40 ans auparavant, et vont découvrir petit à petit de nouveaux indices et des détails qui n'ont pas été exploités lors de la première enquête et en découvrant de nouveaux liens entre les évènements et les gens, ils vont ainsi faire ressurgir la terrible vérité.
Car ce qui s'est passé est bien pire que ce que vous pouvez imaginer. Et ce qui est pire que tout, c'est que Stieg Larsson, pour les crimes qu'il décrit (des meurtres et une scène de viol très dure, notamment) s'est inspiré de faits divers réels. Et je vous assure que quand vous savez ça, quand vous savez que des femmes ont réellement subi les horreurs qui sont décrites, je vous assure que le livre prend une autre ampleur.

Pour les personnages, Stieg Larsson s'est également inspiré de personnages réels. Ce monsieur est auteur de polars à succès, mais dans la vie courante, il est journaliste économique. Les personnages du journal sont des gens qu'il connaît, etc...Ca pourrait presque passer pour une autobiographie fantasmée, un cauchemar couché sur le papier.

L'histoire met du temps à se mettre en place, et du coup le début de la lecture est un peu laborieux. Mais ce début un peu longuet est toutefois nécessaire, car il permet de placer le décor et les personnages, qui sont autant de pièces du puzzle qui va se reconstituer au fil des pages.

C'est quelque chose que j'ai trouvé très agréable: on visualise très bien le déroulement des évènements, et c'est comme si on avait les indices sous les yeux. Notre cheminement intellectuel pour résoudre l'énigme Harriet avance au même rythme que celui de Blomkvist. C'est comme si l'on était dans sa tête et que l'on réfléchissait en même temps. Jamais on n'a l'impression d'avoir découvert quelque chose qu'il ne sait pas encore. L'auteur ne fait pas de cadeau au lecteur: il ne lui donne pas plus d'indices qu'à son personnage.

Ce premier volume pourrait se suffire à lui-même, si Stieg Larsson n'avait pas décidé, 100 pages avant la fin, de nous relancer sur un autre sujet palpitant, qui nous donne bien évidemment envie d'attaquer immédiatement le volume 2, La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'un allumette et de retrouver Mikael et Lisbeth dans un nouveau pétrin.

Je viens de le commencer, et au vu des quinze premières pages, je peux déjà dire que ça démarre sur les chapeaux de roue!

Les hommes qui n'aimaient pas les femmes - Millenium T.1, Stieg Larsson
Collection Actes Noirs
Actes Sud, 2006