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De l’importance d’avoir une tribu

Publié le 08 novembre 2012 par Copeau @Contrepoints

Le capital social que représentent les liens d’amitié et de confiance vaut toutes les assurances et garanties de l’État en cas de vraie catastrophe.

Par J. Sedra.

De l’importance d’avoir une tribu
Se préparer à une catastrophe naturelle ou sociale, ce n’est pas seulement avoir des réserves de nourriture, d’eau potable et d’antibiotiques, ainsi que des armes en état de marche. Trop de survivalistes amateurs fantasment à coup de cabanes perdues dans les bois, de bunker anti-atomique, d’arsenal à domicile ou pourquoi pas de forteresse protégées par des pièges à ours ou des fosses à requins.

Cette attitude pèche par excès de pessimisme : non seulement ils anticipent le pire pour les infrastructures de la société, mais ils anticipent également le pire de la part de ceux qui les entourent. Bien sûr c’est important d’être auto-suffisant dans ces conditions, mais jusqu’à quel point est-ce possible ? Si un arbre tombe devant la maison et bloque la seule sortie, vous allez le dégager tout seul ? Vous pouvez vous sortir seul des décombres de votre logement après un tremblement de terre ? Vous faire vous-même une attelle au bras d’une seule main ? Et qui aujourd’hui pourrait prétendre cumuler tout à la fois les talents de pisteur, chasseur, électricien, plombier, médecin-urgentiste, maçon et charpentier en même temps ?

Si la réponse est « personne », mieux vaut alors penser à faire dès aujourd’hui le plein d’une ressource qu’on ne peut ni acheter ni entreposer dans une cave en attendant le jour fatidique : des amis.

Avec quelques amis, on peut tout à la fois chasser, cueillir, surveiller, soigner, cultiver, et plus encore. Dix paires de mains peuvent tenir dix fusils, couper dix fois plus de bois, construire des choses bien plus grandes et/ou lourdes, dix paires de jambes couvrent bien plus de terrain qu’une seule et peuvent rassembler bien plus de survivants, dix cerveaux peuvent trouver de meilleures solutions d’assainissement d’eau, et dix consciences peuvent se relayer continûment.

À notre époque de Twitter, Facebook et autres communications électroniques nos amis vivent presque toujours loin de nous, physiquement. Pour s’être mutuellement utiles dans l’urgence, des amis doivent être à portée l’un de l’autre. Pourtant, nos propres voisins n’ont jamais été si détachés de nous qu’aujourd’hui, habituellement c’est à peine si on se dit bonjour en se croisant.

Quand tout va bien, quand l’ordre règne paisiblement, de parfaits étrangers peuvent tout à fait rester polis et civilisés entre eux. Parce que c’est facile et ordinaire. Mais quand tout s’écroule autour de soi, c’est une toute autre histoire. Quand il s’agit d’urgence, on agit pour protéger les siens en priorité. C’est naturel.

Étendre ce cercle des siens, c’est augmenter exponentiellement la capacité de chaque membre de veiller sur les autres et d’être secouru. Chacun y gagne. C’est la base de la cohésion d’une tribu.

L’expérience enseignée par Katrina, Sandy et bien d’autres désastres, c’est que l’écrasante majorité de l’aide et du soutien vital est apportée par les amis, les voisins et les proches, et certainement pas par quelque agent du gouvernement. Ce n’est pas le pompier débordé qui se trouve à 10 km qui va vous tirer des restes de votre cuisine effondrée, mais votre voisin d’en face ou votre beau-frère qui habite à côté. Un fonctionnaire ne saura pas combien de personnes chercher à telle adresse ni dans quelle pièce fouiller.

Comme le montre l’étude approfondie des conséquences de l’inondation de la Nouvelle Orléans en 2005 par le professeur Daniel Aldrich de l’Université de Purdue, les quartiers qui ont le mieux survécu à la catastrophe étaient toujours ceux connaissant les liens sociaux les plus denses – alors que l’action fédérale a été largement inefficace voire contre-productive. Le même constat peut être fait pour le tsunami de 2004 et pour le tremblement de terre à Kobe en 1995.

Les humains sont des animaux sociaux, c’est une de leurs forces majeures. Le capital social que représentent les liens d’amitié et de confiance vaut toutes les assurances et garanties de l’État en cas de vraie catastrophe, et plus encore. C’est la raison pour laquelle la structure tribale a perduré pendant des centaines de millénaires là où les nations se sont succédé siècle après siècle.

Alors, pour survivre au prochain désastre, partez dès maintenant à la rencontre de votre tribu.

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