Magazine Société

La crise est finie !

Publié le 09 novembre 2012 par Lommedesweppes
Je sais ! Mais on peut toujours rêver. Dans un monde où les nouvelles sont mauvaises, où la compétition est exacerbée, il faut, comme nos ancêtres révolutionnaires, arriver à faire preuve d'audace dans les situations d'urgence. Rien de tel qu'un bon match d'improvisation pour nous y préparer. Une éclatante démonstration nous en a été donnée samedi soir de la semaine dernière au théâtre des Tisserands, dans le quartier du Marais à Lomme.
Il faut être réaliste : improviser ne s'improvise pas ! Il y a beaucoup d'appelés mais peu d'élus ; à la fin seuls survivent celles et ceux capables de concentration, d'imagination et de sens du rire. Ils se regroupent en équipes et partent s'affronter sur les patinoires (c'est ainsi que l'on nomme l'espace théâtral sur lequel ils évoluent) de France et de Navarre.
Rappelons-le : il s'agit d'un véritable match comme au football, au rugby ou au basket. Pendant que les spectateurs s'installent dans les gradins, les comédiens effectuent leurs exercices d'échauffement scénique (le but semble être notamment d'éviter les claquages de la langue ou les luxures de langage), puis retournent se préparer dans leurs loges.
Un orchestre tout simple – une guitare, une batterie – chauffe le public avant l'entrée des artistes. Pénètre tout d'abord sur la scène le trio arbitral, revêtu d'un maillot à bandes verticales blanches et noires, comme celui que portait Michel Platini au temps où il jouait à la Juventus de Turin. Vient ensuite la présentation à l'américaine, comme au basket, des cinq joueurs de chaque équipe : d'un côté la compagnie du Trompe l'œil de Marcq-en-Baroeul, de l'autre celle des Epices de Trappes. La compagnie du Trompe L'œil joue en rouge, celle des Epices en blanc. Moment incontournable aussi bien dans les grands stades que sur les patinoires : l'hymne des équipes. Grand silence dans la salle, intense en émotion, que font vibrer dans le public ces Nordistes qui nous représentent « de la Flandre au Hainaut ».
La partie peut alors commencer. Elle dure deux mi-temps de 45 mn, pendant lesquelles les joueurs vont improviser leurs sketchs. Comment, me direz-vous ? Eh bien, à l'aide du saladier magique de l'arbitre. Alors que ses deux assistants se sont dirigés aux extrémités de la patinoire, il s'approche dudit saladier, en extrait un bout de papier, qu'il lit à tous et qui donne les règles du jeu : improvisation mixte (les deux équipes jouent en même temps) ou comparée (elles jouent l'une après l'autre). Sur le petit bout de papier se trouvent aussi la durée du sketch et  le nombre de joueurs par équipe. Dans les improvisations comparées, l'arbitre jette en l'air un palet, blanc d'un côté, rouge de l'autre ; selon la couleur apparente une fois à terre, c'est l'une ou l'autre qui commence.
Le rôle de l'arbitre se limite-t-il à lire des bouts de papier et à jeter des palets en l'air ? Que nenni ! Son rôle est primordial dans le déroulement. Toujours placé au plus près de l'action, il surveille les fautes commises et sanctionne à la fin de chaque phase. Les refus de personnage, de sujet ou de jeu ne lui échappent pas. Les procédures illégales n'ont aucun secret pour lui. Et il punit sévèrement les flagrants délits de cliché ou le cabotinage. Ses décisions sont parfois partiales, mais jamais partielles.
L'imagination prend alors le pouvoir. Car sur une durée de deux à cinq minutes, il faut savoir improviser « l'un  après l'autre », « la vie sans limite », « être Parisien et fier de l'être », et « ça fait si longtemps » ! gérer « les bobos de bébé », « beau comme un camion », « dans la peau d'un autre », prendre « un bain de jouvence » dans « la dernière dimension ». Après cela, se persuader que « la crise est finie » ou « faire le grand saut ». Le tout à la façon « d'un dessin animé », « d'une épopée féérique » ou d'une « bande annonce de film » !
Quand tous les comédiens ont donné le meilleur d'eux-mêmes, comment savoir qui a gagné le point ? Là encore, tout repose sur les épaules de l'arbitre, et celles de ses assistants. En effet, l'improvisation théâtrale est une démarche participative. Il se tourne vers le public, lequel a été muni de petits cartons blanc d'un côté, rouge de l'autre. L'arbitre lui demande alors de lever le carton du côté de la couleur de l'équipe qu'il a trouvée la plus performante. Parfois le vote majoritaire se dégage aisément. D'autres fois, c'est comme en Floride, il faut compter et recompter. Mais il trouve toujours la solution pour attribuer le point. Seule chose embêtante, quand on hésite, on ne peut pas voter blanc, c'est déjà prendre parti !
La démarche est même tellement participative que chaque spectateur a été équipé, à l'entrée, d'une paire de chaussettes ; il peut s'en servir suivant son libre arbitre et la jeter sur la scène pour manifester son mécontentement devant les décisions de l'arbitre ou pour souligner la médiocrité du jeu des acteurs.
Pour la petite histoire, l'équipe des Trompe l'œil a été créditée de la victoire par 9 à 5 à la fin du temps réglementaire. Mais au final, c'est la joie et la bonne humeur qui ont triomphé. Dommage qu'il n'y ait pas eu de prolongations. Nous eussions supporté les rouges et les blancs jusqu'au bout de la nuit.
 La crise est finie !La crise est finie !La crise est finie !La crise est finie !La crise est finie !La crise est finie !La crise est finie !La crise est finie !

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Lommedesweppes 1875 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine