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Sans rapport avec le renouveau démocratique en rapport II

Par Alainlasverne @AlainLasverne

MARIANNE et Rapport Jospin

GRAPH 68
'équipe chargée de proposer un renouveau démocratique a œuvré tranquillement et en secret, ou presque, pendant quelques mois pour accoucher, espérait-on, d'une nouvelle matrice de la vie politique française, aujourd'hui percluse de défaillances aussi graves que diverses. La commission présidée par Lionel Jospin, socialiste et ancien Premier Ministre, a élaboré 34 propositions, ventilées sur 5 chapitres.

Notons d'emblée qu'il ne s'agit pas de réformes, elle le rappelle régulièrement en soulignant l'existant comme base possiblement amendable, sans se lancer dans des bouleversements majeurs. D'où un certain nombre de mesures qui pourrait fluidifier légèrement le système.

Malheureusement aucune n’apparaît pouvoir éliminer l'inégalité de voix – premier biais fondamental du système électoral actuel parmi les trois observés dans l'article précédent.

Les mesures ne touchent pas la carte électorale, et loin de là. Ainsi, Jospin et son staff se sont intéressés au problème en amont, réel mais mineur : la désignation du candidat à la présidentielle. Ils mettent sur la table une dose supplémentaire de citoyenneté – un possible parrainage citoyen - qui ne modifiera pas la donne de l'élection elle-même et amende à la marge le financement des candidats, dans l'objectif de plus de transparence. On touche avec des pincettes, on change à minima.

La proportionnelle est également envisagée. Elle n'instaurera pas une égalité fondamentale dans le vote, qui aurait pu réellement changer la composition de l'Assemblée et du Sénat. La commission la propose pour 10% des députés, autant crier « vive le statu quo! ».

Dans ce paysage politique fondamentalement déséquilibré, la commissionJospin ne voit non plus aucun inconvénient à proroger un pluralisme totalement trompeur quant à l'égalité médiatique républicaine, puisque le temps de parole entre par exemple l'UMP et LO diffère dans d'énormes proportions tout au long de l'année. Ce qui fait d'une égalité médiatique sur un mois de présidentielle un emplâtre sur une jambe de bois. A cette aune, cette égalité médiatique nommée pluralisme apparaît totalement sans contenu.

Mais même cet accès aux médias largement inégal est de trop pour la commission, qui prône l'équité à la place de l'égalité. En clair, on dit aux directeurs de programmes, aux rédacteurs en chef de la presse écrite, aux programmes radiophoniques « Allez-y les gars, faites large place aux « gros » candidats, mais avec les formes ».

Ce chapitre « nouvelle politique pour les candidats » se poursuit par des mesures qui changeraient la date de différentes élections, ou l'heure de fermeture des bureaux. Dans les divers chapitres on verra qu'il faut abaisser l'âge de la majorité à 18 ans pour être élu au Sénat, ce qui va évidemment bouleverser l'élection parfaitement censitaire de cette chambre que d'aucuns, en leur temps, trouvaient parfaitement inutile et qui aujourd'hui à le droit et les moyens médiatique de populariser urbi et orbi son activité médiatique, alors que les citoyens lambdas n'ont pas le droit d'avoir une télé libre dans leur quartier, sauf si elle accepte une liberté fortement surveillée par quelques notables, PDG de la chambre de commerce du coin, gras commerçants de la région ou élus locaux. Bref, la fondamentale égalité dans les résultats électoraux que peut espérer un candidat, en amont de son action, de son dynamisme et de la valeur de ses idées, l'égalité dans la structure du vote n'est aucunement abordée. On voudrait parler de jazz et on nous branche sur « La chance aux chansons ».

Une formule revient comme une antienne dans ce court rapport : « La commission estime qu'il convient de s'en tenir au champ actuel de la réglementation ».

Concernant, la corruption, Jospin et son équipe proposent surtout la transparence. Gorbatchev a dû passer un coup de fil amical. Le titre du chapitre qui devrait normalement aborder ce problème central est pourtant ambitieux. « Un exercice des responsabilités exemplaire ». Il serait cependant faux de dire qu'on ne trouve pas là quelques propositions intéressantes et justes, mais une hirondelle ne fait pas le printemps.

Mettre le président de la République sur le même plan que tout un chacun en lui donnant la responsabilité pénale va dans le bon sens, il est vrai. Un chef d’État responsable devant la Justice saura qu'il ne peut favoriser tels intérêts particuliers, user des deniers publics sans justifications ou financer sa réélection de manière délictueuse, sans encourir une sanction. D'autant que la commission propose la fin de la cour de Justice de la République, ce qui mettrait le Président éventuellement accusé, devant les juges que tout un chacun rencontre s'il commet un délit, une égalité de traitement conforme aux valeurs républicaines.

La commission veut également interdire le cumul des mandats, voilà qui est bel et bon. Mais si on ne fait rien pour réellement sanctionner les corrupteurs et les corrompus les élus continueront à frauder, d'autant qu'ils verront leurs revenus baisser avec le non-cumul et que la sortie éventuelle de piste sera toujours devant eux sans filet, sans emploi garanti. Emplois garantis, sur le modèle des emplois réservés pour les militaires, qui donneraient un débouché financier et professionnel à l'élu battu. Manière de pondérer grandement, sinon de supprimer ses éventuelles envies de frauder.

De la même manière, on ne porte pas le fer, pour ce qui des autres mesures dans ce chapitre. Ainsi, la commission livre une partie conséquente sur les mesures déontologiques existantes et demande à ce qu'elles soient renforcées pour les hauts fonctionnaires et parlementaires, mais elle ne juge pas nécessaire de rendre public le patrimoine de chacun. Le patrimoine est un bien et, à ce titre, la volonté et les moyens de le faire grossir peuvent exister et s'exercer comme ils le font pour les revenus, sauf à penser que nous vivons tous au royaume des innocents.

Le renforcement de la déontologie et des contrôles sur le respect de celle-ci ne saurait dispenser l'action publique intègre et responsable de mesurer et de rendre public les biens de chacun des parlementaires, élus divers et hauts fonctionnaires, pour pouvoir réellement constater les dérapages et les sanctionner fermement, au vu et au su de tous les citoyens.

Quand à la représentativité des Assemblées et, au-delà, des instances publiques régionales et locales, on ne peut pas dire que ce troisième problème fondamental ait interpellé profondément la commission Jospin.

On l'a vu, celle-ci veut instaurer une dose homéopathique de proportionnelle. Cela ne changera rien dans la sélection des candidats par les partis et ne donnera aucune réelle possibilité pour « la France d'en bas » de s'emparer de la vie politique. On ne peut pas non plus attendre un bouleversement avec la possibilité d'élire différemment les députés « de l'étranger », qui ne représentent qu'une part tout à fait mineure du corps des élus. Même constat dans l'organisation d'un vrai second tour quand il n'y a qu'un seul candidat en lice. Enfin, faire élire les sénateurs en tenant compte de la taille des communes ou de la participation de députés à cette élection ne saurait changer leur situation actuelle. Les sénateurs sont choisis par des élus, des pairs. Ce qui en fait une élection censitaire par rapport à celle des députés élus par M. tout-le-monde.

Ce catalogue de modifications marginales, prorogeant le système actuel, ne modifiera en rien la composition sociologique du Sénat, encore plus éloignée que celle des députés de la composition de la population française.

Bien obliger de constater en arrivant au bout de ce rapport que la commission Jospin n'aborde qu'un seul des trois problèmes majeurs indiqués dans le premier volet de cet article, et à la marge. Les propositions qu'elle avance visent à conforter le système actuel par quelques aménagements plus cosmétique qu'autre chose, à la trop rare exception des mesures envisagées pour le statut du chef de l’État.

Les français se trouveront encore confrontés à une représentation nationale élue par un scrutin fondamentalement, à une corruption potentielle qu'on n'attaque pas de front et à un corps politique qui ne représente toujours pas les français dans leur diversité sociologique.

Le renouveau démocratique attendra.


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