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Le pont d'Akwidaa est détruit

Publié le 17 novembre 2012 par Busuainn_ezilebay @BusuaInn_Ezile

Long Walk

Photo :  Borderfilms


Ghana

photo : Guillaume Colin

Le pont d'Akwidaa est détruit
Akwidaa  petite bourgade de la western region du Ghana, au coeur du pays Ahanta est un gros village de pêcheurs et fermiers. 


Ce village a pour particularité d'être traversé par la rivière Ezilé (j'ai vu sur un site de toponymie qu'Ezile en Ahanta signifie au delà de la rivière) qui scinde Akwidaa (ou Accoda) en deux.


Du côté côtier, Akwidaa old town autrement appelé Ezilo, Ezile, une langue de sable entouré de part et d'autre de l'océan et d'une rivière. C'est la partie historique de ce très ancien village (les origines connues sont vers le 15ème siècle), avec les ruines de Fort Dorothea . De l'autre côté, sur un aplomb, Akwidaa new town, le côté le plus récent où sont installées les écoles, dispensaires.


Entre deux, la rivière.

Le pont d'Akwidaa est détruit

Le pont d'Akwidaa est détruit

La rivière sert de port naturel de mouillage aux pirogues. Elle est enjambée par un pont en bois. Depuis 3 jours, le pont n'est plus ! Une pirogue mal attachée, malmenée par un océan un brin nerveux, est venue frapper les piles du pont qui s'est effondré dans la nuit.


Le pont d'Akwidaa est détruit
Alors, il a fallu reprendre la pirogue pour traverser la rivière et aller faire ses petites emplettes à Akwidaa (50 pesewas la traversée quand même ! Gratuit toutefois pour les écoliers). 


C'est ainsi que j'ai connu Akwidaa les premières années de mon arrivée au Ghana. Cet événement est particulièrement crucial pour les habitants d'Akwidaa old town, enfin, surtout pour les femmes et les enfants qui charrient l'eau de la partie haute du village à la partie ancienne, dépourvue totalement d'eau.

Et même pour l'eau, la traversée en pirogue est payante ! 50 pesewas pour un aller retour. Par contre pour lesfunérailles, c'est gratuit... Gratuit pour la célébration des morts et payant pour la vie...

Le pont d'Akwidaa est détruit

Face à cet accident, la communauté s'est rapidement mobilisée. Le village s'est cotisé, les pêcheurs ont contribué, le propriétaire de la pirogue incriminée aussi. Pour l'instant, les institutions sont venues (district, député, ong) et ont promis de l'aide. Ils n'ont pas, pour l'heure, fait preuve d'une grande réactivité pourtant en période pré électorale, c'était une sacré occasion, rapidement saisie par un représentant politique local (le bois est arrivé ce matin), face aux enjeux de ce pont pour la communauté villageoise.


On verra.... Hier, je suis allée voir les dégâts et le chantier et apporter ma contribution. Plus de 80 personnes s'agitaient autour du chantier de recontruction. La notion de communauté a un vrai sens ici.

Le pont d'Akwidaa est détruit
Après avoir rencontré des elders puis le care taker (littéralement le concierge), c'est à dire la personne qui fait office de chef car depuis des événements qui ont eu lieu il y a quelques années de cela, il n'y a plus de chef en titre à Akwidaa.


Le dernier en date (un sacré brigand ! J'ai eu à faire avec lui lors des pourparlers pour le terrain d'Ezile bay a même, fait très rare au Ghana, était “destoolé”. Cela veut dire qu'il a été viré du stool (tabouret) royal.


Décision entérinée officiellement par l'Ahantahéné, paramount chief et chef du pays Ahanta, siégeant à Busua. Depuis, c'est le combat des familles royales à Akwidaa, une vraie compétition. Donner une contribution à Akwidaa (mais pas que...) devient ainsi un excercice délicat, quelques fois périlleux car à qui, à quoi va (vraiment) l'argent ?

Le pont d'Akwidaa est détruit
L'ensemble de la procédure a duré 2 bonnes heures. Chacun disant, “tu peux nous donner, cela ira au pont”...

Méfiance...


J'ai donc décidé de donner l'argent au care-taker en présence d'elders et de villageois témoins.

La western region véritable “grenier” du Ghana (en vrac, or à profusion, pétrole, hévéas etc) semble oublier des institutions. Jusqu'à présent, pas de route digne de ce nom. Les 2 accès par les pistes sont dans un état désastreux, par endroit. Pas d'électricité non plus. Le projet est en cours. Des poteaux ont été installés, promesse d'une électricité à venir (car des promesses, il y en a eu ! “y en à encore” !). J'espère qu'il ne s'agit pas d'une procédure au long cours comme celle connue et filmée par Peter Di Campo dans “life without light” documentaire donnant une vraie idée de cette réalité du Ghana sans électricité. Et pas d'eau ( bienvenue dans le 21e siècle) pour l'ancienne partie du village Ezilé qui est donc transportée par les femmes et les enfants. L'accès au net, dans ces conditions n'est que rêve. D'autant plus que les différents opérateurs téléphoniques offrent des réseaux téléphoniques en “pointillé”... Là... Pas là... Parti... Revenu Et maintenant... Plus de pont... Ce petit coin du Ghana, pays de plus en plus prospère et moderne, semble oublié du reste du pays en matière d'infrastructure. Car pour les ressources, elles ont été bien reperées et (bien ?) exploitées, sans retour tangible et visible pour les habitants. Les laissés pour compte ? les délaissés du développement en marche ?


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