Il y avait ces deux petits marmots dans le parc dimanche.
L’un âgé de 7/8 ans, l’autre (vraisemblablement son frère au vu de leur ressemblance et de sa manière de le regarder avec idolâtrie) âgé de 4/5 ans.
Ils essayaient faisaient du vélo et c’était vraiment pas simple leur affaire.
Il faisait nuit. Ils tentaient de garder un semblant d’équilibre et ils devaient zigzaguer à travers les parents, les poussettes, les joggeurs et les promeneurs du dimanche.
Le plus grand ponctuait ses coups frénétiques de sonnette par des : Oh la la la la la la ! Hiiiii ! Attention ! Pendant ce temps là, le plus petit, suivait en reproduisant les mêmes tintements de sonnette et les mêmes cris affolés.
Dans un premier temps, je me suis dit qu’ils étaient tout de même assez inconscients de faire du vélo comme ça, dans ce parc bondé. Puis une petite voix me fit remarquer qu’à cet âge là, ils étaient plutôt insouciants (c’est moins rabat-joie qu’inconscients) et que c’est tout à fait normal. Puis je me suis dit qu’effectivement c’était de leur âge et j’ai fini par les regarder avec une forme d’amusement et de nostalgie mêlée. Ce qui m’a le plus frappée, c’est qu’ils avaient la trouille, mais ça ne les empêchait pas d’avancer.
J’ai appris le vélo sur le tard, ce fut long et difficile. Quand je vois des minots sur leurs vélos, je me dis souvent que j’aurais voulu apprendre plus tôt. Parce qu’au moins petite, j’aurais été plus frivole, moins inquiète de tomber ou de me faire mal, à vrai dire je n’y aurais certainement pas penser. L’anxiété c’est quand même un sacré truc d’adulte, non ? Bref, je me serais évitée quelques frayeurs. Tout comme le vélo, j’ai appris la natation (j’en avais parlé ici) et le ski à l’âge adulte. Cela a été super stressant, j’ai cru que je n’y arriverais jamais et pourtant, j’ai réussi. Pour la nage, je me débrouille pas trop mal, le ski, il me faut encore quelques cours pour arriver à faire correctement le chasse-neige et pour savoir m’arrêter sans tomber…mais à part ça je suis tout de même fière de moi. Cependant, il suffit que je me retrouve en difficulté dans l’un de ces domaines, pour que le spectre du « si j’avais appris ça petite, je serais trop balèze maintenant » se pointe à nouveau et me fasse me sentir mal.
Et puis mon « et si », je le baigne dans une idéalisation absolue. Parce que dans ma tête, si j’avais appris le vélo petite, il est évident que je ferais du vélib comme une reine, que le vélo serait mon fidèle destrier urbain et que je serais follement gracieuse dessus. Au lieu de ça, j’en fais très rarement, je freine par à coup quand ça va trop vite dans une descente, je descends de la selle et marche à côté quand il y a une grande montée. Et puis bon, je reste marquée par une chute une en vélo. Bref, le vélo et moi, c’est pas encore ça. Mais ce « et si » tend à s’éloigner. Aux dernières nouvelles, hormis dans Retour vers le futur, je me rends bien compte qu’on n’a pas encore trouvé le moyen de refaire le chemin arrière de nos vies. Et rien ne me laisse entrevoir que les choses auraient été mieux ou moins bien, différentes ça c’est sûr, mais de quelle façon ?
Et puis, quand j’y pense cela n’a pas été qu’une source d’angoisse d’apprendre tout ça à l’age adulte. C’est lors de moments difficiles et apparaissant comme insurmontables (oui, oui quand tu te retrouves en haut d’une pente raide de piste enneigée à 28 ans, ça paraît infaisable) que j’ai découvert des ressources insoupçonnées et une volonté de fer (ça pourrait me servir, des fois que je ferais Koh Lanta
). Sans cela, comment aurais-je pu savoir que j’étais une nana téméraire et qui passé un intense moment de panique, n’abandonne pas facilement devant les obstacles.En repensant à ces mômes, à mon « et si », je me suis dit que je ne pouvais pas refaire (mon) l’histoire, mais qu’au moins je pouvais faire l’effort de ne pas m’accrocher aux branches d’un passé qui n’a jamais existé. Suffit juste de se souvenir dans le présent de ces moments bataillés où j’ai triomphé, ce sera déjà pas mal.