Magazine France
Quelle fascination collective ! Il y a quelques temps, nous nous moquions du Hollande-bashing, puis des couacs de communication, ou des emballements médiatiques rapides et raccourcis.
Rien ne se calme, tout se propage et s'ultra-buzze. On comprend bien que l'action au long cours ou les souffrances à rythme lent sont de mauvais sujets d'excitation médiatico-blogosphériques. C'en est devenu tristement banal que de le rappeler.
Ces dernières heures, quelques ténors déchus de feu-l'UMP regrettaient à haute voix le triste spectacle que donnait leur formation. Nathalie Kosciusko-Morizet, pour ne citer qu'elle, expliquait bruyamment qu'elle aurait préféré que l'opposition tacle plus violemment le gouvernement sur son « revirement » à propos de Notre-Dames-Des-Landes ou l'épisode raté sur la liberté de conscience des maires.
Quelle ambition politique !
Voici quelques phénomènes longs, discrets et douloureux qui auraient pu agiter nos experts économiques.
La retraite menacée
C'est un sale cadeau de l'équipe d'avant et de la crise. Nos retraites ne sont pas sauvées.
Les Français épargnent de plus en plus tôt pour leur retraite. Pour celles et ceux qui peuvent épargner... Rien de surprenant... Chacun réalise peut-être que la réforme Sarkozy n'a rien sauvé, contrairement à l'argument électoral de l'ancien monarque. Et sa réforme des régimes spéciaux, à l'automne 2007, a davantage coûté au régime qu'elle n'a rapporté. D'après une étude d'Harris Interactive pour le cabinet DELOITE sur 4.000 actifs, 78% d'entre eux estiment nécessaires des sources supplémentaires de financements aux régimes obligatoires.
Divers amendements de députés socialistes (le 31 octobre), écologistes (le 6 novembre), ou du Front de Gauche (le 13 novembre) de députés socialistes proposant le rétablissement total ou partiel de l'AER (allocation équivalent retraite pour les chômeurs en fin de droit de moins de 60 ans) ont été repoussés. Cette subvention avait été supprimée en janvier 2011 par Sarkozy, puis remplacée par un pécule plus réduit et réservé aux chômeurs en fin de droit de plus de 60 ans, à l'approche des élections. Plus de 900.000 seniors pointent à Pôle Emploi... En Commission ou en plénière, le gouvernement a argumenté qu'il avait déjà rétabli le retour à la retraite à 60 ans pour les carrières longues omises par la réforme Sarkozy et prévu une prime de Noël bien dotée.
DUMP, RUMP, UDI
C'est un sujet désormais futile, drôle et triste à la fois. L'UMP agonise. Le jouet de Juppé/Chirac malmené de Sarkozy depuis 2004 a fini par casser. Triste bilan, triste histoire. Personne ne peut s'en réjouir.
François Fillon a gagné son maigre pari. Un peu moins d'une centaine de députés - 68 à mardi soir - ont fait sécession à l'Assemblée nationale. Le nouveau groupe s'appelle Rassemblement UMP - RUMP... Ahem... Croupion, croupe, fesse, en anglais. L'expression fera florès outre-manche. Fillon a promis de rejoindre la troupe si de nouvelles élections étaient organisées.
A l'UDI voisine, on exulte. Un député scande JE SUIS UDI dans une incroyable video publicitaire dénichée par Guy Birenbaum.
Nicolas Sarkozy veut jouer au casque bleu. Ils ont cassé son jouet. Il faut un référendum interne, un voter pour décider une nouvelle élection, plus rapide, plus simple, plus ouverte. En l'état, on ne retient qu'une chose, la droite classique est incapable d'un processus démocratique interne. Voter pour savoir s'il faut revoter est sans doute le dernier des affront au bon sens commun.
Copé et Fillon sont finalement d'accord.
Merci Sarko.
Reviens vite.
La franchise Montebourg
François Hollande reçoit le milliardaire endetté Lakshmi Mittal. Depuis le weekend, la planète éco s'agite de commentaires sur la récente déclaration d'Arnaud Montebourg. Le ministre du redressement productif s'inquiétait de l'attitude du groupe sidérurgiste. Sa charge fut directe, violente et heureuse: « Nous ne voulons plus de Mittal en France parce qu'ils n'ont pas respecté la France. Le problème des hauts-fourneaux de Florange, ce n'est pas les hauts-fourneaux de Florange, c'est Mittal. » Quelques éditocrates s'offusquèrent de cette franchise à l'encontre d'un groupe qui a promis ce qu'il ne tient pas. Et le ministre de préciser, le lendemain à Orléans: « Quand j'ai déclaré 'nous ne voulons plus de Mittal en France', j'ai voulu dire que nous ne voulons plus des méthodes de Mittal en France, des méthodes qui relèvent du non-respect des engagements, du chantage et des menaces.» Montebourg faisait-il du Mélenchon... ou du Montebourg ? Le ministre avait une franchise qui l'honore.
Mittal avait lancé un ultimatum il y a deux mois. Deux mois pour trouver un acheteur pour Florange, sauf pour les activités rentables. Sinon il fermait le site qu'il avait promis à Nicolas Sarkozy de sauver il y a deux ans, en plein crise. La belle arnaque... Montebourg suggère un contrôle public transitoire du site, une forme de nationalisation. Certains sont choqués. Nicolas Baverez, sur France Info lundi soir, s'inquiète d'un tel coût. L'important est de choquer le patron récalcitrant. De lui faire comprendre facilement, rapidement, que ce qu'il fait n'est pas bien.
Il faut les mots, et Montebourg les utilise.
Une quarantaine de députés dépités se sont rapidement exclamés que Montebourg avait raison. Une tribune bien placée dans les colonnes du Nouvel Obs version Web. Il fallait quand même rappeler que Mittal avait absorber Arcelor en 2006, après une OPA hostile, puis fermer le site de Gandrange en 2009.
Le chômage endémique
Il a encore progressé en octobre, tel que le confirme le ministère du travail. Quelque 46.500 inscrits supplémentaires à Pôle emploi dans la catégorie sans emploi. Le précédent record dans cette catégorie des sans-emploi date de 1998. Globalement, les licenciements économiques ont augmenté (+ 12,7 % en un mois), comme les fins de CDD (+6 % en un mois), qui représentent 26,3 % des entrées. Le nombre d'inscrits à Pôle Emploi dépasse tous les records de la décennie et au-delà.
Un vrai cauchemar.
Maigre satisfaction, mais satisfaction tout de même, les offres d'emploi collectées ont bondi de près de 5% en un mois.
Certains, mardi soir, en masse et dans les médias, ne parlaient encore que de l'élection d'un improbable parti feu-majoritaire.
SVP... oubliez l'UMP.