Je fais faire à mes élèves l’exercice du paradoxe. Le
paradoxe est le principe de ce blog et des méthodes d’investigation des
sciences humaines. Le paradoxe, c’est trouver que l’autre est bizarre, et
expliquer cette bizarrerie par une logique qui n’est pas la nôtre.
Mes étudiants me répondent qu’il est important, aussi, de « défendre son point de vue ».
Ce qui me surprend (paradoxe !). Car cela n’a rien à
voir avec ce que je dis. Pour moi, comprendre l'autre ne menace pas notre point de vue.
En fait, comprendre l’autre permet de se comprendre soi. L’exercice
du paradoxe est avant tout un exercice sur soi. Quels sont les a priori qui sous-tendent mon « point de vue » ? qui font que
l’autre me paraît étrange ?
Non seulement l’autre, n’est pas une menace, mais il est une
chance. Parce qu’il est différent de moi, à deux nous pouvons faire ce que je
ne pouvais pas faire seul. Mieux, il peut me décharger de ce que je n’aime pas
faire, et me permettre de passer bien plus de temps à faire ce que j’aime !
Le boulanger aime faire du pain, et moi j’aime le manger. C’est le principe même
d’organisation de la société.
Maintenant que j’ai expliqué ma logique, quelle est celle de
mes élèves ? Pourquoi estiment-ils que comprendre l’autre menace ce qu’ils
sont ? Est-ce la peur du « relativisme », dont on parle tant
dans certains milieux ?
D’ailleurs, s’il y a relativisme, est-ce du fait de
différences fondamentales ? Ou parce que notre « point de vue »
porte bien son nom : il traduit l’angle sous lequel nous regardons le monde ? Chacun
voit midi à sa porte dit mon cours. (Et aussi l'ethnologie.)