Magazine Société

"Le cadeau de Noël" de Daniel Abimi

Publié le 02 décembre 2012 par Francisrichard @francisrichard

Le polar n'est pas un genre mineur. Je ne dis pas cela parce que je suis un adepte. Je le dis parce que ce n'est pas le genre littéraire qui fait la qualité d'un écrivain.

Le genre ne fait rien à l'affaire. Il y a des écrivains médiocres dans tous les genres et d'autres qui ne le sont pas.

Le polar suppose bien sûr qu'il y ait une énigme à résoudre et que la vérité ne se fasse jour qu'après quelques rebondissements. Mais, à partir de là toutes les possibilités sont ouvertes.

Le livre de Daniel Abimi ravira les Lausannois, plus particulièrement les noctambules, ou ceux qui lisent les rubriques de faits divers dans leur quotidien Le Matin.

En effet les habitants de Lausanne y retrouveront bien des lieux qu'ils connaissent, même si l'auteur prend avec eux quelques libertés; ils ne seront pas dépaysés par les patronymes des protagonistes; ils auront l'impression de se trouver au milieu d'une intrigue familière, même si les faits et les personnages sont fictifs, à une exception près...

Il ne faut pas croire pour autant que ceux qui ne connaissent pas Lausanne n'auront aucun intérêt à le lire. En effet le livre fourmille de suffisamment de détails vrais sur la capitale vaudoise pour qu'ils la reconnaissent, s'ils s'y rendent, ou qu'ils aient envie de s'y rendre.

L'histoire se passe en 2012 et commence quelques jours avant Noël. Une jeune femme, Elena, originaire d'Ukraine, employée dans la station-service Agip située avant l'échangeur de la Blécherette, est tuée dans la cafétéria de l'établissement.

Un individu casqué lui a tiré une balle dans le sein gauche, à bout portant, et est reparti à moto, comme il était venu, et comme si de rien n'était. Du travail de professionnel. D'autant que, s'il y a bien six témoins du meurtre, trois hommes et trois femmes, ils n'ont rien vu...

Le patron de la station-service est un Bulgare. Il était assis face à son neveu dans la cafétéria quand le coup de feu est parti. Il tournait le dos à l'entrée et son neveu était plongé dans un jeu électronique. Une femme tenait la caisse, une autre comptait les chips. Enfin deux clients, un homme et une femme, faisaient le plein.

L'enquête est dirigée par l'inspecteur Mariani. Elle va le conduire dans le milieu de la prostitution - et de la drogue qui lui est liée - et de ses clients huppés. L'aide d'un journaliste alcoolo, Michel Rod, qui est apparenté à des gens de la haute société lausannoise, ne sera pas de trop pour démêler l'écheveau de cette affaire, où les parties fines jouent un rôle essentiel.

L'intérêt du livre réside dans le rendu vivant des personnages qui en émaillent le récit, qu'il s'agisse, d'un côté, des policiers et du journaliste, ou, de l'autre, des putes européennes de l'est, de leur mère-maquerelle, de leurs clients, des proxénètes qui opèrent dans l'ombre ou de leurs porte-flingues.

L'auteur restitue tout ce petit monde avec beaucoup de réalisme, de crudité et de justesse. Il montre qu'il suffit de gratter un peu le vernis des apparences pour que soit révélé le côté sombre de la nature humaine, qui peut se retrouver dans des individus appartenant à toutes les conditions sociales.

A deux reprises Daniel Abimi parle de cadeau de Noël. Une première fois quand Michel Rod s'offre une participation exorbitante à une partie fine pour progresser dans son enquête; une deuxième fois quand le même donne un billet à une prostituée qui l'a aidé à découvrir le commanditaire du meurtre d'Elena.



Il ne faut donc pas considérer ce roman, écrit avec toutes les qualités que requiert le genre, comme un joli conte de Noël, mais comme un tableau noir des moeurs de notre époque, qui, heureusement, du moins veux-je le croire, ne doivent pas être considérées comme une généralité.



Francis Richard

Le cadeau de Noël, Daniel Abimi, 368 pages, Bernard Campiche Editeur


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Francisrichard 12008 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine