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Un pont entre les cultures ?

Publié le 12 décembre 2012 par Arsobispo

Un pont entre les cultures ?Le Journal d’Anne Frank est une œuvre que le monde entier s’est approprié. Au Japon, Anne Frank est ainsi devenue le personnage « kawai[1] » d’un manga, bien éloigné de la représentation que nous nous en faisons. Constatant que la vision historique de la seconde guerre mondiale diffère par méconnaissance mais aussi par la variation des repères culturels, Alain Lewkowicz, Vincent Bourgeau, Samuel Pott et Marc Sainsauve ont tenté de comprendre ces différences d’appréciation dans la quête improbable d’une vérité universelle. Quoi de mieux, dès lors, pour appréhender la culture nippone que de se pencher sur les mangas qui ont adapté tous les classiques de la littérature : Dostoïevski, Goethe, Shakespeare, Victor Hugo, ou, plus surprenant, « Mein Kampf » d’Hitler[2] !  Le manga, sous sa forme épurée, lisse et manichéenne, permet d’aborder tous les thèmes tout en s’adressant à n’importe quel type de lecteurs. Il n’est donc pas étonnant que des interprétations - souvent superficielles, parfois farfelues - foisonnent à outrance notamment lorsqu’il s’agit, non pas d’une fiction littéraire, mais d’un document historique, d’un essai, d’une biographie ou d’un témoignage.

Un pont entre les cultures ?
Un pont entre les cultures ?
Cette quête n’est pas évidente, elle est le sujet du chapitre 1 « le chemin vers l’autre ». Il est suivi par « le chemin vers soi-même » qui observe l’esprit révisionniste d’un peuple vaincu. Puis vient « le chemin de l’enfance », une recherche de l’opposition à cette droite particulièrement nationaliste, pour ne pas dire fasciste, qui semble majoritaire dans le Japon d’aujourd’hui. Dans le chapitre suivant, « le chemin de l’oubli », on comprend mieux pourquoi Anne Franck suscite un tel attrait. Sauf que l’on occulte de son journal la destinée tragique de son auteur. Seuls sont retenus les messages d’amour de la nature, de considération envers son prochain, du désir de paix. La Shoah semble être absente de l’œuvre tout comme les crimes de guerre japonais sont dans l’esprit des nippons un épiphénomène provoqué par la colonisation européenne de l’Asie, qui ne doit jamais occulter la glorieuse intervention militaire des libérateurs de l’empire du soleil levant. On y apprend que, paradoxalement, à Hiroshima, c’est un américain, Steven Leeper, qui  est le garant de la mémoire d’un cataclysme provoqué par les américains. D’un lieu représentant le « mal nécessaire » à mettre en opposition au « mal absolu » représenté par l’holocauste. Toute l’ambigüité, source d’opposition des pensées occidentales et orientales, est là. Le pont entre les cultures se semble pas encore aussi proche que l’on pourrait le croire.

Un pont entre les cultures ?
Chaque planche est sonorisée. Certaines vignettes mélangent le dessin et la photo, voire même des vidéos. Elles peuvent contenir également d’autres médias (diaporamas, vidéos, interviews) qu’il suffit, si l’on accepte de perdre pendant quelques instants la fluidité de la narration, de déclencher pour approfondir un aspect particulier de l’histoire. C’est vivant, didactique, parfois humoristique, surprenant, émouvant.

En somme, c’est absolument génial.

Pour y accéder, cliquez sur ce lien ARTE / SUBREAL

[1] mignonne

[2] Interdit en France


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