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Mais pourquoi donc les médias se fichent de la pauvreté ?

Publié le 14 décembre 2012 par Juan
Mais pourquoi donc les médias se fichent de la pauvreté ?
Peu de lignes, si peu d'échos. L'annonce d'un plan de lutte contre la pauvreté, mardi, était-elle si attendue ou si anecdotique que cela ? Budgétairement, d'autres mesures moins coûteuses ont fait davantage de sensation.
Il fallait donc chercher l'explication ailleurs.
Triste bilan
On se souvient de vieilles promesses, la réduction de la pauvreté dans ce pays, lâchées par un candidat qui se croyait Zorro et termina Président des Riches. A l'époque, cela sonnait juste, le slogan faisait joli dans un discours de campagne quelque part devant un électorat que l'on espérait populaire.
Quelques milliards d'euros de déficit plus tard, le même et ses proches accusaient la Grande Crise pour excuser son imprévoyance et son échec.
Les temps ont changé. L'un des derniers bilans de la pauvreté en France, publié par l'INSEE, révèle, avec 2 ans de retard, l'ampleur de la dégradation.
Nous nous en étions fait l'écho il y a quelques semaines. Les tendances sont éloquentes, la pauvreté en France est un phénomène massif, une vague de fond : 8,6 millions de personnes touchées, un revenu médian en baisse (19 270 euros annuels en 2010, -0,5 % par rapport à 2009), un record de pauvreté depuis 1997 avec 14,1 % de la population ; une aggravation des écarts de revenus, etc.
Que fallait-il de plus pour sombrer dans la dépression ? 
Il y a une quinzaine de jours, les Restos du Coeur avaient débuté leur saison hivernale. Et déjà les premiers constats: fréquentation en hausse et nouveaux publics. Des retraités et des étudiants, après les habituelles cohortes de familles.
Quelques libéraux nous expliqueront que la France est déjà trop solidaire...
La lutte contre la pauvreté est une cause qui fait mal à l'argumentaire de certains. On préférait discutailler endettement, pigeons, innovation et travail. 
Curieuse inattention
Mardi, le premier ministre a clôturé deux journées d'une Conférence nationale de lutte contre la pauvreté par quelques annonces et 2,5 milliards d'euros à la clé. Bizarrement, l'effet médiatique fut relativement faible, le minimum syndical de la couverture journalistique. Quel décalage d'attention avec le symbole Florange !
Même la twittosphère s'agitait ailleurs. La pauvreté est un sujet sans accroche facile. Nous eûmes bien quelques micro-reportages. Palme et reconnaissance à France info qui rapporta cette histoire d'une mère, employée de ménage, qui dormait dans la rue ou ailleurs avec ses deux enfants.
Plus généralement,  la médiasphère se triturait plutôt les méninges sur la énième rencontre entre les rivaux Copé et Fillon. Quelle infamie ! Même France Inter faisait son ouverture matinale, le lendemain, sur une baisse probable du Livret A, rapidement démentie par Ayrault.  Le trublion Mediapart préférait encore ressasser l'affaire Cahuzac ou jouer les Cassandre sur l'avenir du SMIC. De pauvreté, il n'en fut guère question, ou si peu. A peine un billet publié avant l'annonce du plan.
Bref, la lutte contre la pauvreté intéressait peu, les échos restaient bien modestes. Pourtant, il y a quelques matières à débats et rebonds. Quelques confrères blogueurs, soutiens ou critiques, étaient heureusement plus persévérants.
2,5 milliards d'euros
En résumé, le plan coutera 2,5 milliards d'euros d'ici 2017. Il comprend quatre mesures immédiates:
1. Le RSA Socle devrait bénéficier d'un coup de pouce (hors inflation) de 10% d'ici 2017. L'objectif est de l'amener à 50% du SMIC (contre 43% aujourd'hui). Mais Ayrault reconnaît d'emblée l'insuffisance de la mesure: « Pour ramener son niveau à 50 % du Smic, il faudrait l’augmenter de 17 % Mon confrère Politeeks explique en détail l'impact réel, et insuffisant, de la mesure.
2. Dès septembre prochain, le gouvernement met en place une «garantie jeunes» de 450 € par mois, « ciblée sur ceux qui sont en grande difficulté d’insertion», une mesure annoncée à la sortie de l'été. Sur le fond, un belle nouvelle. Sur la forme, pourquoi tarder ?  Le dispositif sera bien lancé en 2013 mais dans 10 seuls départements pilotes. A terme, on nous promet 100 000 jeunes par an. Il y a urgence. 
3. Le plafond de la CMU complémentaire sera révisé pour permettre à près de 500.000 ménages supplémentaires d'y avoir accès. C'est une vraie bonne nouvelle à un moment où un nombre croissant de ménage rechignent à se soigner faute de moyens. Une mesure de santé publique !
4. Huit mille nouvelles places d'hébergement d'urgence seront créées. C'est-à-dire presque rien.
S'ajoutent deux autres points, une réforme du RSA Activité et de la Prime pour l'Emploi l'an prochain (que le premier ministre ne détaille pas), et la création d'un observatoire de l’inclusion bancaire et le recours à un réseau de Points conseils budget pour prévenir le surendettement.
Assez vite, la conclusion s'imposait: non, ce plan n'allait pas résoudre la pauvreté d'un coup de baguette magique.
Ce plan a le mérite d'exister. Mais il avait le défaut d'être présenter comme un sauvetage d'ampleur, ce qu'il n'est pas.
Mais là encore, quelques libéraux nous expliqueront que la France est déjà trop solidaire...


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