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Dirigeant et rationalité

Publié le 14 décembre 2012 par Egea

Les lecteurs d'égéa ont remarqué que je reviens, de temps à autres, à la question du dirigeant et du commandement. Discutant l'autre jour avec J Phi, sur un projet que nous avons en commun, il me demande si je connais Herbert Simon ? Et subitement, plein de réminiscences surgissent et, quelque part, une question sous-jacente : comment ai-je pu "oublier" Herbert Simon ?

Dirigeant et rationalité
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1/ Herbert Simon est un économiste américain, qui a beaucoup remis en question un des grands soubassements de l'économie néo-classique : l'accès parfait à l'information de tous les acteurs (une des conditions des marchés de concurrence pure et parfaite). Il montre que c'est impossible (voir ici ou ici ou ici). Dès lors, l'homo œconomicus prend ses décisions sans "toute" l’information, donc en rationalité limitée. L'expression qui fit la célébrité de H. Simon est donnée : elle lui fera recevoir le prix Nobel d'économie.

2/ La théorie est intéressante à plus d'un titre : pour l'explication de l'économie (aussi bien celle du consommateur que celle du fonctionnement de l'entreprise) tout d'abord. Toutefois, je ne crois pas me souvenir qu'elle s’intéresse au rôle particulier du dirigeant. Or, si celui-ci est un facteur de production "en soi" (à égalité de statut que le capital ou le travail), sa prise de décision doit intéresser au plus au point l'analyste. La rationalité du dirigeant est forcément limitée, et donc ses décisions sont forcément "partielles". Autrement dit, nous retrouvons ici ce que nous avons déjà constaté par ailleurs : il n'y a pas de décision sans incertitude. Décider dans la certitude, ce n'est pas décider.

3/ Cela renvoie également à la question de "l'information", et donc à mes interrogations sur le cyberespace. Je sais, Yves Cadiou nous dit qu'il n'y comprend rien et qu'il ne voit pas où est le problème : je comprends cette attitude (ce choix de la limitation de la rationalité, soit-dit en passant : Yves décide de ne pas faire l'effort de s’intéresser au cyber : choix, assumé, et respectable en tant que choix). Il reste que j'aperçois une chose, d'une certaine façon "contradictoire" (quantique, dirait l'autre ?) : à savoir que le cyber introduit une théorie de l'information, et que dans le même temps nous constatons cette information imparfaite. D'un côté, profusion de l'information : de l'autre, limitation de l'information. Je n'ai pas la solution, juste l'intuition d'un problème.

4/ J'en arrive à cette interrogation : pourquoi avoir oublié H. Simon ? alors que ses théories sont si séduisantes et plaisent forcément à tout économiste curieux, et non embringué dans un catéchisme économique, de droite ou de gauche ? Mais si je l'ai oublié, c'est aussi que "l'on" n'en parle plus. Et que d'ailleurs, l'avez vous remarqué, il n'y a plus de débat économique (je veux dire : de débat de théorie économique) qui arrive aux rivages du grand public. Est-ce une coïncidence si ce la s'accompagne de l'impression d'une grande médiocrité des "décideurs" politiques (que ce soit dans l'ordre économique, politique, sans même parler de stratégique) ?

O. Kempf


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