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Sommes-nous des "marxistes blancs" ?

Publié le 23 décembre 2012 par Copeau @Contrepoints

Dans un article du Sud-Ouest, les "néolibéraux" sont traités de marxistes. Cette thèse mérite d'être démontée.
Par Pierre Chappaz.

Sommes-nous Ce billet répond à l'article de Jean-Claude Guillebaud dans Sud-Ouest, intitulé Les "marxistes blancs". Sous la plume du journaliste, les marxistes blancs, ce sont les libéraux, ou plutôt, car il préfère employer un mot forgé par les médias du système étatiste : les néolibéraux.

Le choix des mots est important. Je ne connais aucun libéral qui se définisse comme néolibéral, parce que ce mot ne correspond à rien, ou plutôt il correspond à la caricature du libéralisme véhiculée par les médias et les politiques des partis dominants.

Les "néolibéraux" sont donc traités de marxistes, nous allons voir pourquoi, et comme Jean-Claude Guillebaud connaît l'histoire, il les colorie en "blancs" , en référence aux Russes qui se sont battus contre les bolcheviks en 1917. La thèse du journaliste de Sud-Ouest mérite d'être démontée.

La confusion idéologique qui règne dans l'esprit de beaucoup de commentateurs est patente dés les premiers mots de Guillebaud :

Les grands patrons du CAC 40 ou Jean-François Copé sauteraient au plafond si on leur disait qu'ils ressemblent de plus en plus aux marxistes des années 1960.

Les méchants libéraux, ce sont donc eux, les grands patrons du CAC40 et Copé. Copé qui disait récemment que "le libéralisme est un logiciel dépassé du 19e siècle". Copé, c'est-à-dire l'UMP, le parti de Sarkozy, ce Président qui s'est fait élire avec les voix des libéraux pour faire tout le contraire de ses promesses, et finalement porter les dépenses publiques françaises au taux record du monde occidental de 57% du PIB.

Les patrons du CAC40, je suppose que Guillebaud les connait, sont tous passés par l'ENA et les cabinets ministériels. Ils vivent en symbiose complète avec l'administration, privatisant les profits et socialisant les pertes.

Le "néolibéralisme" que cible le journaliste n'est en réalité que le règne de l’État et du capitalisme d’État.

Évidemment, quand les prémisses d'un raisonnement sont fausses, le reste ne peut guère être convaincant. Mais voyons les arguments.

Socialisme scientifique

Premier argument de Guillebaud : "La vulgate néolibérale" (encore un mot connoté, à la manière trotskyste) fait croire aux futurs diplômés des business schools que l'économie est une véritable « science » (...) réinventant le dogme du « socialisme scientifique ».

Ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas l'enseignement de l'économie au lycée par des profs marxistes qui risque de faire comprendre quoi que ce soit aux élèves.

Mais le journaliste parle ici des business schools, repères d'affreux "marxistes blancs". J'ai vraiment du mal à suivre. Est-ce parce qu'on explique aux élèves comment faire un business plan, ou comment fonctionnent les modèles mathématiques utilisés par les opérateurs de marché, que cela changerait le fait que l'économie est d'abord et avant tout une activité humaine, résultant des choix de chacun, une activité soumise à tous les aléas, et aussi aux coups de chance, bref, tout sauf un programme mathématique qui se déroulerait sans libre-arbitre ? les mathématiques sont un outil, sans plus, d'ailleurs je suggère au journaliste de lire cette analyse mathématique des systèmes de retraite par répartition, qui démontre qu'il s'agit d'une pyramide de Ponzi, système popularisé par Madoff.

Avenir radieux

Le second argument avancé dans l'article est tout aussi romantique : "la référence obsessionnelle à la mondialisation ressuscite, sous une autre appellation, le fameux « sens de l'Histoire » auquel les marxistes nous sommaient jadis d'obéir."

Les libéraux ne sont ni pour ni contre la mondialisation. La mondialisation, avec le développement d'Internet et du commerce mondial, est un fait. Un simple fait. On peut discuter du point de savoir comment il faut réagir à l'évolution du Monde : essayer de se protéger en érigeant des barrières protectionnistes (position conservatrice), ou développer nos atouts pour gagner des points dans la compétition entre les pays (position libérale). On peut évidemment essayer de jouer sur les deux tableaux à la fois, comme le fait si bien la Chine par exemple.

Mais Guillebaud ne s'intéresse pas à ce débat, il est dans l'outrance, dans la caricature : les néo-libéraux de son imagination sont des marxistes blancs, adorateurs de l'avenir radieux de la mondialisation. Il est pourtant bien évident, y compris pour ces libéraux tellement bornés, que la mondialisation représente un sacré challenge pour les pays endormis par leur État-Nounou, l'avenir pour eux sera tout sauf radieux s'ils ne retrouvent pas le goût de se battre.

Persévérance diabolique

Pour finir, le journaliste de Sud-Ouest en arrive à la persévérance diabolique.

Dans l'ancienne langue de bois marxiste, on répétait que si les économies des pays communistes ne fonctionnaient pas, c'était parce qu'elles n'étaient « pas assez communistes ». Slogan identique aujourd'hui : les défaillances, les injustices et les cafouillages des économies occidentales s'expliqueraient parce que ces dernières ne seraient « pas assez » privatisées et déréglementées, etc. Même mensonge idéologique, même ritournelle.

L'argument est plus sérieux, et mériterait un autre article sur le fond.

En attendant de l'écrire, je vous renvoie à ce billet dans lequel je démontre que contrairement à ce que les médias ont essayé de faire croire, la crise n'a pas été causée par la dérèglementation mais bien par l'interventionnisme des États et des banques centrales.

C'est leur politique d'endettement à outrance qui a conduit à l'explosion de la bulle de crédit dans l'immobilier américain et dans les pays du Sud de l'Europe. Voila pour les défaillances et cafouillages.

En ce qui concerne les injustices, Guillebaud devrait s'interroger sur la raison pour laquelle dans un pays ou l’État domine la société et l'économie comme nulle part ailleurs , il y a eu selon lui si peu de progrès. Ne serait-ce pas que la méthode utilisée – placer des millions de personnes en situation d'assistés, avec une bureaucratie considérable pour gérer le système – n'est pas la meilleure ?

Le mensonge idéologique, pour revenir aux propos du journaliste, ce n'est pas d'expliquer que l’État intervient trop et trop maladroitement dans nos sociétés, c'est de nier ce fait.

Vivant en Suisse, je touche du doigt ce que c'est qu'une société plus libérale, et je pense qu'on y vit plus heureux que dans les sociétés étatisées comme la France. Un peuple dominé par son État est un peuple malheureux.

Le bonheur vient au contraire de la responsabilité individuelle, et de la solidarité volontaire et non pas forcée. "Aide-toi, le ciel t'aidera"...

En conclusion pour Jean-Claude : oui, je le concède, le libéralisme parfait est une utopie. On ne peut qu’espérer s'en rapprocher un peu, alors que le sens de l'histoire va partout, malheureusement, en direction inverse.

Mais cette utopie de la liberté n'est pas dangereuse, à la différence des marxismes de toutes les couleurs.

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