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Jérôme Kerviel et la gestion de crise

Publié le 03 avril 2008 par Opinionwatch

Dans l'affaire de fraude à la Société Générale qui oppose les dirigeants à Jérôme Kerviel depuis 2 mois, les cabinets de conseil en communication de crise oeuvrent dans l'ombre pour réhabiliter la réputation de leurs clients. Entre procès médiatique et procès juridique, la frontière est souvent ténue.

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Côté Société Générale, les dirigeants ont immédiatement fait appel à un cabinet spécialiste en gestion de crise, Image 7, qui a collaborée avec l'agence corporate du groupe, Harrison&Wolf. On leur doit probablement le “trader fou” et la métaphore du “chauffard qui évite les radars et saute en route de sa voiture” lors de l'interview de Daniel Bouton au JT de France 2, reposant sur une stratégie de communication simple: canaliser toute l'attention des médias grand public sur Jérôme Kerviel et rassurer les médias spécialisés sur la solidité financière du groupe. On était alors au 1er épisode de l'affaire…

De son côté, Jérôme Kerviel a recours aux services de Christophe Reille, associé de RLD Partners [Reportage de Long Durée]. A 43 ans, M.Reille est un ancien journaliste du Nouvel Economiste et de France Info, passé de l'autre côté de la barrière et désormais spécialisé dans la communication sous contrainte judiciaire ou réglementaire.

Les deux avocats de J.Kerviel ont beaucoup pesé dans cette stratégie, ne pouvant pas gérer à la fois les aspects juridiques et les ressorts médiatiques de l'affaire. Ceci étant, Christophe Reille a mis gratuitement ses compétences au service de cette affaire, espérant en retirer un bénéfice d'image pour sa propre société. Le personnage est un habitué des dossiers épineux puisqu'il compte parmi ses clients Noël Forgeard, l'ex-codirigeant d'EADS dans la tourmente d'un délit d'initié et Denis Gaulthier Sauvagnac, alias le responsable chargé de “fluidifier les relations sociales” de l'UIMM.

Dans l'affaire Société Générale, il définit son rôle comme ceci “Je suis là pour que ses messages soient audibles dans un environnement particulièrement bruyant”. on lui doit notamment la séance photo du 5 février avec deux journalistes de l'AFP [10 minutes] qui avaient pour but de véhiculer deux idées simples:

  • Jérôme Kerviel ne se défilera pas devant la justice, pour preuve il s'expose publiquement devant les journalistes.
  • La Société Générale a tenté d'en faire un “bouc émissaire” et un “trader fou”, alors que c'est un homme raisonné bien loin de l'image de terroriste qu'on veut lui attribuer.

M.Reille dément avoir enseigné à Jérôme Kerviel les ficelles du média training, ni même la manière dont il devait s'habiller et se comporter à cette occasion. Peut être. En tout cas, même si cette stratégie n'a pas permis à JK d'éviter les 38 jours de détention provisoire, elle aura évincé l'affreuse photo d'identité que relayaient les médias depuis plusieurs semaines et donné un nouveau visage au trader, celui d'un homme lacher par son ex-entreprise. L'assasin se transforme en victime. L'épisode 2 est bouclé…

Aux vues de ces faits, on peut se demander si dans de telles situation le procès médiatique n'a pas plus d'importance que le procès juridique. Lorsqu'on voit le traitement médiatique de l'affaire d'Outreau, on est effectivement en droit de se poser la question. A mon avis, le recours au 'Spin doctor' a une utilité incontestable lorsque la présemption d'innocence a tendance à être piétinée par les médias, auquel cas le spécialiste de la com' de crise ne fait que contrebalancer le défaut de professionnalisme des journalistes, qui influence forcément la procédure juridique. Avec JK, nous sommes bien dans ce cas de figure.

Un seul bémol, les prestations de Christophe Reille se payent chères, de l'ordre de 30000€/mois pour DGS selon la rumeur, autant dire que la plupart du temps seuls les dirigeants politiques et les patrons d'industrie peuvent se le permettre.

Intéressé par le sujet?

  • L'interview de Christophe Reille à France 24
  • L'article de Stratégie sur ce “spin doctor”
  • Le cabinet Tilder dont M.Reille a fait parti
  • L'article des Echos, du 24 janvier 08

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