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Vivre à Madère

Publié le 29 décembre 2012 par Xylophon

« Madère est une île assez semblable à un Eden. Il n'y fait jamais froid, ni trop chaud, et l'océan qui la baigne n'est jamais furieux. » Jacques Chardonne, Vivre à Madère.

Je ne pense pas que l'on puisse être déçu par un pays.

Je crois que ce je j'aime justement le plus dans le voyage c'est le décalage entre une idée imaginaire que l'on se fait d'un endroit avant de partir et la réalité que l'on découvre une fois sur place.

Les lieux visités, les gens rencontrés, cette impression d'ensemble qui se construit itérativement au cours du voyage façonne un sentiment souvent très différent de notre conception de départ.

Avant de partir à Istanbul, je m'imaginais une ville musée, figée par les siècles. Or Istanbul vit même dans le quartier de Sultanahmet.

Comme dans les films de Fellini, on assiste parfois à ces scènes ubuesques de camions de ciment qui débarquent, entre deux tables de restaurant, à 23H30 avec le patron assis qui distribuent aux chauffeurs la récompense en cigarettes.

A Lisbonne, alors que je devais partir pour Madère, j'avais contrairement à mes autres voyages des difficultés à me représenter une quelconque idée de cette ile.

Des îles, j'en ai visité plusieurs. Mais cette fois-ci Madère demeurait une énigme.

A Lisbonne, j'avais croisé une dame, qui ne connaissais pas l'ile mais qui avait voyagé aux Açores. Sa première réaction, fut l'étonnement : pourquoi vouloir visiter un morceau de caillou ?

Ce premier conseil n'était pas très rassurant: entre interrogation et perplexité, il fallait bien pourtant atterrir à Funchal.

"On sait tout de suite que l'on est arrivé dans l'ile des fleurs. Elles sont toutes là, un peu exaltées, épanouies ensemble et toute l'année, celles de France et d'Angleterre, celles de toutes les saisons. Le chrysanthème a oublié qu'il est en fleur de l'automne et se mêle aux roses, aux oeillets, aux azalées; seul le cerisier garde la consigne du continent et attend pour fleurir l'heure de Paris sans céder comme les autres aux séductions de l'atmosphère."

Au premier abord, Madère est mystèrieuse. Ses grandes falaises noires et volcaniques, ses routes escarpées et étroites peuvent laisser songeurs. Le temps particulièrement changeant sur la côte nord de l'ile près de Sao Vincente donne à voir, dans un premier temps, une sorte d'ile hostile, proche de "l'ile noire" d'Hergé.

Pas un morceau de cailloux, non, mais une roche avec une âme.

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"L'océan qui entoure l'ile est bien différent du nôtre; il n'a jamais ces fortes senteurs, cette grande voix que j'ai étendue dans les étés de mon enfance quand il se brise sur les côtes charentaises, dévastant assez loin le rivage où il ne fleurit que le chardon aux creux des dunes; il ne prend pas garde à cet îlot qu'il entoure mollement d'un liseré bleu, à peine marqué s'étalant un peu sur les berges de sables noires."

L'océan n'est jamais bien loin sur une île. Mais la paisible description que fait ici Jacques Chardonne, peu laisser septique dès que l'on se rend à Porto Muniz. Dans ce village au nord ouest de l'ile, il existe des piscines artificielles où se baignent quelques locaux ou touristes que je trouve assez téméraires au regard des vagues qui ballaient les roches protectrices.

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Après Porto Moniz, l'envie de descendre au sud chercher plus bas cet climat océanique est grand.

"La route abrupte, incrustée de cailloux bruns... laisse voir comme une grenade ouverte, le scientiellement rose d'une profusion de begoniaas qui ont ici de légèes aigrettes corallines; la masse floconneuse d'une glycine azurée; quelque brasier veloutée fait de roses, et bien d'autres illuminations...".

La roche noire et sombre laisse donc petit à petit place aux bougainvilliers multicolores, aux bananiers, et aux plages côtières anonymes qui font penser à notre côte d'azur.

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Pour le côté touristique, un petit tour à Santana peut être amusant: il y reste quelques traces de maisons traditionnelles dans lesquelles vivaient les madériens.

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Madère est aussi le paradis des randonneurs: le centre de l'ile est agrémenté de forêts primaires. Pour suivre ce dédale de sentiers, il faut bien sur être un minimum équipés, mais se promener le long des levadas, au coeur du chaudron verts entourés par les brumes montagneuses, ou dans les senteurs exaltantes des forêts d'eucalyptus, a quelque chose forcement de dépaysant.

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Pour découvrir encore d'autres paysages de cette ile multiple,après le nord, le sud, et le centre, il faut s'arrêter faire le tour de la pointe de Saint-Laurent.

Saint-Laurent pour moi, c'était d'abord une presqu'île mais à Madère c'est une pointe extravagante: un bras d'un désert qui se serait perdu en mer.

La roche rouge et désertique, sert de trame à une balade de plus de 3H00 le long des criques translucides avec comme point d'achoppement une oasis irréel mais bien rafraichissant pour se protéger de l'aridité des lieux.

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Enfin, avant de partir de l'ile, faites un tour à Funchal ( même si la capitale par les difficultés de circulation est assez effrayante) pour visiter le marché aux fleurs.

Vous pourrez acheter des oiseaux de paradis dont le prix est très loin de ceux pratiqués dans nos jardineries françaises.

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Je ne sais pas bien si comme se demande Jacques Chardonne, si l'on peut trouver le bonheur a Madère hors des vicissitudes du monde et y rester vivre définitivement.

L'ile en tout cas de ce qu'en j'en ai vu n'est pas le caillou annoncé. Derrière la roche volcanique, se trouve une richesse profonde qui faut aussi savoir découvrir.


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