Depuis quelques jours on parle beaucoup des hausses vertigineuses du prix des matières premières agricoles. Ainsi, depuis le début de l'année, les prix du riz ont
quasiment doublé, passant de 380 dollars la tonne à plus de 750 dollars aujourd'hui, dopé par la forte demande d'Asie, d'Afrique et du Moyen-Orient. Il en est de même pour les toutes les
céréales. Cela a conduit a de nombreux soulèvement populaire ces derniers temps : des émeutes ont ainsi récemment éclaté à des points de vente de pain subventionné en Egypte, obligeant le
président Hosni Moubarak à appeler l'armée en renfort pour élargir la distribution. Les exemples pourraient être multipliés à foison.
L'explication souvent avancée pour ce phénomène tient dans le déséquilibre entre la demande de produits (qui a fortement augmenté) et l'offre (qui ne suit pas). Cela conduit à une hausse des prix
en vertue de la "loi" de l'offre et de la demande. Mais pourquoi cette hausse de la demande ? Voici la réponse de Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France : "la croissance des pays
émergents et l'élévation du niveau de vie de leur population entraînent une explosion de la demande de ressources naturelles, alimentaires et énergétiques, dont la conséquence logique est une
forte et permanente augmentation des prix". En effet, cette explication me semble très juste. Pour revenir un instant à la Chine, la forte croissance qu'elle connaît depuis quelques années
lui permet petit à petit d'élever son niveau de vie. Par exemple, les Chinois deviennent depuis quelques temps consommateurs de produits laitiers, ce qui implique de fortes tensions sur les prix
de ces produits. On entre ici dans une logique que certains économistes qualifient de rattrapage (Cf. Balassa). Ainsi, la Chine emprunterait le même chemin qu'a emprunté la Corée du Sud
lorsqu'elle attirait les délocalisations, avant de rejoindre très vite les coûts salariaux des économies développées.
En effet, si les prix alimentaires augmentent, les salariés vont à priori finir par demander une compensation sous forme d'augmentations salariales. C'est le fameux effet de second tour tant
redouté par les banques centrales. Il ne faut donc pas s'étonner que la forte inflation qui sévit au Vietnam (+ 19 % en un an) comme en Roumanie (+ 30 % en trois mois, selon les syndicats),
entraîne des heurts plus ou moins violents dans ces pays : l'usine Ching Luh Shoes, qui fabrique des chaussures Nike dans le sud du Vietnam, a été fermée, jeudi 3 avril, après des affrontements
avec les salariés qui s'opposent à la fin de la grève déclenchée pour obtenir une hausse de salaires de 15 % dont la direction n'a accepté que la moitié. A Pitesti (Roumanie), l'usine Dacia
(groupe Renault) est entrée, jeudi, dans son onzième jour de grève, les syndicats réclamant 50 % d'augmentations salariales, alors que la direction ne proposait que + 21 %.
Pour finir, voici ci-dessous l'évolution entre 2005 et 2008 du cours des céréales en France (en bleu l'orge, en vert le blé, en orange le maïs) :