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The Wire - s5 e4 - Transitions

Publié le 05 avril 2008 par Vincent Gache

alma_e4Pas de doute, The Wire c'est du très très très haut niveau. Et cet épisode se charge à merveille de nous le rappeler.
Dans The Wire ce que je trouve de plus fascinant, c'est la façon de raconter notre époque comme aucune autre série à ma connaissance n'a su la raconter jusqu'à maintenant. Le faire de cette façon des plus remarquables, est en soit, pour moi, un signe de qualité hors du commun. C'est sûr des séries de très bonnes voire hautes qualités comme Deadwood , comme Rome, comme Carnivàle, comme In Treatment, comme Mad Men, comme The Shield, comme Six Feet Under, comme The Sopranos, comme Arrested Development, il y en a. Mais aucune à mon sens n'arrive à ce point de qualité parce que toutes ces séries peuvent se permettre de tricher avec leurs téléspectateurs. Elles peuvent arranger les choses de manière à poursuivre leurs histoires sans que cela ne porte préjudice à leurs crédibilités. The Wire ne peut pas se permettre un tel écart sous peine de se discréditer à la vue de de son téléspectateur qui lui connait bien son époque et connait bien ce qu'elle raconte.
Bien que ce soit de la pure fiction, la série est taillée pour nous raconter Homo Sapiens v2008.

Les personnages sont incroyable de véracité. C'est hallucinant de voir comment la série les fait vivre et le background qu'elle leur donne. Aucun personnage n'est vulgarisé, aucun n'est caricaturé. Chacun pourrait très bien être un membre de notre famille, un collègue de travail, un patron ou un ami. Je mets au défi celui qui me dira que l'un d'entre eux ne lui a jamais fait penser à quelqu'un qu'il connaissait.
Le souci de la série à donner une aura à ses personnages est permanent et toujours très juste. Dans cet épisode 4, par exemple on apprend plein de choses sur certains d'entre eux. Pourtant on en est à la cinquième saison ! On apprend où a grandi Butchie, comment il est devenu aveugle. On en apprend un peu plus sur McNulty et pourquoi il est aussi désinvolte avec ses femmes. On en apprend un peu plus sur Propostion Joe, son vrai prénom, ses affaires, sa famille. On apprend pourquoi il reste dans une modeste maison alors qu'il est plein aux as. On apprend qu'il connait la valeur des choses et que cette maison est un symbole pour sa famille.
Aucun personnage dans The Wire n'est rebutant. Et aucun n'est complètement attirant. Mais on les aime tous sans exceptions et la mort ou la disparition de l'un d'entre eux est toujours plus ou moins touchante voire déchirante. Que ce soit dans les rues, à la police, à la mairie, au journal et j'en passe, tous ne nous sont pas indifférents et tous ont notre entière attention lorsqu'ils sont à l'écran. On les connait tous très bien. Aussi bien qu'on en arrive à anticiper leurs réactions. Leurs croisements successifs dans les différentes scènes de la série, les rendent d'autant plus intéressantes, captivantes et marquantes.

D'ailleurs, un point commun se dégage dans le portrait que nous dresse la série de notre société que ce soit à travers ses personnages mais aussi son histoire. Il s'agit de l'individualisme. A de nombreuses reprises, la série nous en fait la démonstration et nous montre à quel point il peut être dangereux et destructeur.
Dans cet épisode, on l'apperçoit plusieurs fois. Marlo qui veut le trône de Proposition Joe, Omar qui veut la peau de Marlo, Carcetti qui veut virer Burrel, Burrel qui veut garder sa place, McNulty qui veut plus de moyen pour enquêter et qui s'entraine dans une histoire plus que douteuse, Tempelton qui veut être journaliste au Washington Post et qui retourne sa veste aussi vite qu'il ne faut de temps pour le dire...etc. Tous cela créer une atmosphère au sein de la série qui est, je trouve, on ne peut plus crédible. Car ce qui motive bien souvent chacun d'entre nous, c'est nos propres intérêts. La série se charge également de rappeler combien c'est important de travailler en groupe. Proposition Joe le dit a Marlo: "Travaille en groupe".
Ce qui est tout aussi puissant est que finalement cet individualisme débouche dans la série sur des conséquences directes et indirectes. Par exemple, Carcetti, le maire de Baltimore, démocrate, avait rappelons le, refusé l'aide financière du Gouverneur parce que celui-ci était républicain. Suite à cela, les services de police de la ville ont été mis en veille. Ce qui débouche sur les exactions de McNulty pour essayer de déclencher une levée de fonds. Ce qui débouche sur la nervosité des officiers qui ne sont plus payés correctement et qui deviennent de plus en plus difficile à maintenir dans les rangs (cf Carver). Ce qui débouche sur la monté de la violence dans les rues et du taux de criminalité. Ce qui débouche sur un engorgement des différents services de la police comme par exemple, le laboratoire d'autopsie, qui accumule les cadavres et met d'autant plus de temps à rendre son verdict.
Autre exemple, Omar dans la saison 4, dévalise lors d'une partie de poker Marlo. En saison 5, ce dernier n'a pas oublié et demande à ses lieutenants de rendre la monnaie à Omar. Ils tuent alors l'un des meilleurs amis d'Omar, Butchie. Omar, pas content du tout, revient à Baltimore, pour dégommer tout ce qui ressemble de près ou de loin à un membre de la bande à Marlo. Autant vous dire il va y a avoir du dégâts.
Dernier exemple pour la route, Burrel. Tempelton, journaliste arriviste du Baltimore Sun, ne sait pas quoi écrire lors d'un article sur le préfet Burrel qui est selon les rumeurs proches de la sortie. Il invente alors une citation qui aurait été prononcé par Daniels et qui exprime toute la haine de ce dernier envers Burrel. Une fois publié dans le journal, Daniels découvre le mensonge qu'on lui fait porté dans le journal. Son image en prend un coup. Burrel, de son côté, lit qu'il va être viré et que l'un de ses subordonnées le trahi. Au final, il n'est pas improbable qu'il ne vienne pas mettre quelques batons dans les roues dans les épisodes à venir à ceux qui l'ont laissé tomber.

Enfin, j'aime beaucoup que la série nous montre certains faits de société avec une critique sous jacente non déplaisante. Revenons au préfet qui va être viré par le maire, Carcetti. Ça parait rien de changer de préfet. Et pourtant la série nous démontre combien on se noie vite sous les combines bureaucratiques pour y arriver. Carcetti doit d'abord contenter toutes les personnes influentes de la ville qui entretenaient de bonnes relations avec Burrel et qui seraient susceptibles d'être frileuses à son remplacement. Il lui faut aussi s'assurer que Burrel ne va pas taper un scandale et qu'il va partir le plus gentillement possible sans mettre sur la place publique ce qu'il sait et qui pourrait se retourner contre ceux qui le virent. Pas simple de changer de préfet.
Il y a aussi l'exemple de Clay Davis, où l'on y voit l'ébauche d'un homme politique criante de vérité. Au tribunal, on l'accuse, les faits sont là. En réponse des accusations, il joue leur jeu préféré de la langue de bois. Au sortir du tribunal, il voit ses amis journalistes et comme si de rien n'était, tout souriant explique que ces accusations ne sont que des malentendus et qu'il est fier de pouvoir clarifier cela. Bref, un vrai homme politique qui accumule les fraudes et qui arrive toujours à s'en tirer d'une manière ou d'une autre.
Il y a beaucup d'engagement dans The Wire, ce qui rend la série d'autant plus intéressante et riche à la fois.

Tout ces éléments font que The Wire est une série unique avec un degré de lecture extrêmement poussé. C'est un véritable travaille d'horloger que réalise ici Simon et ses acolytes pour nous offrir avec minutie un ensemble on ne peut plus précis, cohérent, profond et proche de la perfection.


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