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Les cauchemars du Dreamliner

Publié le 11 janvier 2013 par Toulouseweb
Les cauchemars du DreamlinerDes Ť maladies de jeunesse ť, peut-ętre inévitables.
L’entrée en service du Boeing 787 Dreamliner est émaillée d’incidents trčs largement médiatisés, comme l’ont été récemment les problčmes de l’A380. Dans un cas comme dans l’autre, les industriels gardent la tęte haute et, selon une tradition bien établie dans la profession, évoquent des maladies de jeunesse qui seront vite résolues. Mais, tôt ou tard, il faudra tirer les leçons de ces incidents de parcours qui dissimulent probablement des difficultés non pas plus graves, mais systémiques.
Les avions de ligne de nouvelle génération apparaissent plus que jamais comme des synthčses trčs sophistiquées et audacieuses de technologies Ťde pointeť. Les principaux symboles en sont la généralisation des matériaux composites et l’invasion de l’électricité de bord. Deux maničres de faire novatrices qui posent de sérieux problčmes aux bureaux d’études, lesquels ont peut-ętre brűlé les étapes. A moins que l’on prenne le problčme par son extrémité opposée et que les męmes ingénieurs travaillent sous pression, les financiers leur en demandant trop en trop peu de temps.
En cette matičre, le cas du 787 est implicitement exemplaire. En effet, le programme a pris trois ans de retard par rapport au calendrier annoncé le jour de son lancement, le 26 avril 2004. Mais, tout bien réfléchi, le cycle de développement, la mise en route de l’industrialisation, les essais en vol et le processus de certification ont finalement suivi un rythme que l’on est enclin ŕ qualifier de normal. Mais jamais l’analyse de cette course de vitesse ne sera rendue publique, bien qu’on imagine volontiers qu’elle a été faite derričre des portes soigneusement fermées, ŕ Seattle et ŕ Chicago.
Dans le męme esprit, les ingénieurs ont peut-ętre, imperceptiblement, développé une confiance exagérée, sinon aveugle, vis-ŕ-vis de nouvelles avancées. Ainsi, le 787 est plus électrique que n’importe quel autre avion civil et c’est cette caractéristique-lŕ qui vient, aprčs d’autres, de lui jouer des tours. On attend d’ores et déjŕ avec grande impatience les conclusions menées par le National Transportation Safety Board pour comprendre pourquoi une batterie a pris feu ŕ bord d’un 787 de Japan Airlines qui allait quitter Boston, batterie servant ŕ mettre en route une unité auxiliaire de puissance. Un incident qui s’est traduit par un incendie, vite maîtrisé, mais qui a révélé une nouvelle forme de vulnérabilité.
Enfin, les incidents, ceux affectant l’A380 tout d’abord, le 787 ensuite, ont sans doute été surmédiatisés. Cela, en grande partie, parce que la scčne médiatique a profondément évolué au cours de ces derničres années, Internet, généralisé, indispensable, pouvant aussi jouer un rôle néfaste quand il répand trop vite ŕ travers le monde des informations non vérifiées, pire, erronées.
Dans cette optique, la maničre de faire de Boeing est instructive. L’avionneur américain maîtrise parfaitement sa communication et montre qu’il est capable de contenir d’éventuelles dérives en jouant la carte de la transparence. Ainsi, dernier exemple en date, Mike Sinnett, ingénieur en chef du 787, a expliqué, explicité, mis en contexte les incidents récents lors qu’une conférence téléphonique avec de grands médias américains. On imagine que son intervention avait été soigneusement préparée, que les questions les plus diverses avaient été anticipées. Et, dans le męme temps, nos confrčres américains ont évité toute tentation de surenchčre, de Bloomberg au Wall Street Journal.
Chacun était bien dans son rôle : le 787 reste une source de préoccupation, Boeing en parle en termes judicieusement choisis et rappelle qu’en son temps, le 777 n’a fait ni mieux, ni moins bien. A ce jour, une cinquantaine de 787 ont été livrés ŕ huit compagnies et totalisent 50.000 heures de vol. Leur taux de disponibilité technique Ťse situe dans la tranche supérieure des 90%ť. Mais, s’empresse d’ajouter Mike Sinnett, Ťnous ne serons pas totalement satisfaits tant que notre fiabilité et nos performances n’auront pas atteint 100% ť. On n’en attendait pas moins. Restent les interrogations de principe qui appellent une analyse attentive, sans tarder.
Pierre Sparaco - AeroMorning

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