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Le potentiel érotique de ma femme (de David Foenkinos)
Publié le 14 janvier 2013 par Ceciledequoide9Bonjour à celles et ceux qui possèdent un fort potentiel érotique
Bonjour aux fans de Foenkinos
Bonjour à celles et ceux qui le sont moins
Bonjour aux zotres
Contexte actuel
Je précise tout d'abord que ce qui suit a initialement été rédigé le 08/08/2007. Je l'ai à peine modifié en gommant notamment les prénoms. En relisant les extraits cités, je grimace en me disant que c'est encore pire que ce dont je me souvenais.
Contexte d'alors
Je viens d'achever "Le potentiel érotique de ma femme" de David Foenkinos. Lorsque je l'ai emprunté à une mienne amie qui l'avait reçu lors d'un dîner livres échange, j'étais plus que confiante en raison des critiques élogieuses de diverses lectrices et blogueuses énamourées de cet auteur. Eh bien, quelle déception !!! Mon amie n'a pas aimé non plus et apparemment pour les mêmes raisons que moi.
Le sujet
Hector est un personnage sans grand intérêt et grand collectionneur de tout et rien devant l'éternel. Il rencontre Brigitte dans une bibliothèque et l'épouse... Dès lors, il abandonne toutes ses collections passées pour ne se consacrer qu'à celle de moments de la vie de sa femme douée d'un potentiel érotique bien précis et apparemment énorme.
Mon avis
Prrrrrrrrrrrrrrrr... Que dire ? Je situerais David Foenkinos entre Philippe Jaenada que j'adore et Martin Page dont je n'avais pas du tout mais alors là pas du tout aimé le minuscule roman (par la taille et l'intérêt) "Comment je suis devenu stupide". Foenkinos partage avec Jaenada et Page la conviction que la littérature ne doit pas forcément se prendre au sérieux.
Il partage avec le premier une habileté à ponctuer son récit de bons mots et de tics d'écriture érigés en gimmick comiques mais les bons mots ne font pas un roman intéressant et, de fait, l'histoire du "potentiel érotique de ma femme" ne l'est pas. Ils ne suffisent pas non plus pour écrire bien et, de fait encore, sans dire qu'il écrit mal (quoique), Foenkinos n'a vraiment pas une plume exceptionnelle.
Certaines phrases sont grammaticalement douteuses et/ou à la limite du compréhensible et certaines métaphores sont pour le moins surprenantes au point qu'on se demande si, parfois, Foenkinos ne confond pas deux mots (exemple à propos d'un homme âgé : une peau "raccourcie" au lieu "rabougrie" ???).
De plus, là où Jaenada sait valoriser ses propres tics d'écriture (les parenthèses) et les transformer en purs moments d'humour décalé, ceux de Foenkinos (la juxtaposition d'un verbe et d'un substantif de la même racine créant une répétition au sein de la phrase) sont souvent lourds et rapidement lassants.
Il partage avec Page, le début du roman (à tel point que je me suis demandée qui avait pompé sur qui), un certain talent pour trouver de bons titres (à moins que ce ne soit leurs éditeurs respectifs) mais surtout une forme d'humour absurde que je n'aime pas du tout, que je trouve même assez bêbette pour ne pas dire complètement con dans certains cas (celles et ceux qui l'ont lu comprendront) :
- le concours de badges
- la mort du père de Bernard
- le portrait de Gérard
- la video
- l'explication post video
- quand Gérard a les mains dans le dos
- le dîner chez des amis
J'aurais (hélas) pu donner d'autres exemples mais je ne voulais pas faire de spoilers.
Ajoutez à ce qui précède que les personnages n'ont aucune profondeur et ne sont pas le moins du monde attachants, que Foenkinos se limite bien trop souvent au factuel, au descriptif (ce qui est dommage car les meilleurs passages du livre sont ceux où il est analytique) et vous comprendrez que j'étais contente lorsque j'ai vu le mot fin arriver.
Extraits
Après une tentative de suicide. J'avoue que j'adore cette formule (un zeugma). Là, j'ai vraiment ri. (P.16)
Hector nous fit un malaise. (...) Il fut découvert plus près de Châtelet-Les-Halles que de la mort.
Le livre regorge de petites phrases péremptoires et un peu creuses (un peu comme dans "L'élégance du hérisson" de Muriel Barbery. Certaines sont de beaux truismes, celle-ci est fausse.
Collectionner est une des rares activités qui ne repose pas sur la séduction (P.21)
Malgré quelques bizarreries et lourdeurs stylistiques, sans doute mon passage préféré du roman.
Cette attitude qui consistait à ne pas casser le mythe du fils épanoui impliquait des difficultés et un travail redoutable sur soi. Ces choses sont plus simples à imaginer qu'à accomplir. Faire croire qu'on est heureux est quasiment plus difficile que de l'être réellement. Plus il souriait, plus ses parents se détendaient ; ils étaient fiers d'avoir un fils heureux et gentil. Ils se sentaient aussi bien qu'avec un appareil électroménager humiliant la date limite de garantie en prenant des poses d'éternel viager. Aux yeux de ses parents, Hector était une marque allemande. Aujourd'hui c'est plus dur que jamais, la confidence du suicide est au bord des lèvres semi-bleues, pour une fois, il aimerait ne plus jouer la comédie, être un fils devant ses parents, pleurer des larmes si grosses qu'elles emporteraient, dans un torrent, la douleur. Rien à faire, un sourire sur son visage fait barrage et entrave comme toujours la vérité. (P. 27)
Quelques jolies formules, fines observations et bons mots du livre
Si nos relations familiales sont des films vus du premier rang (nous ne voyons rien), les parents d'Hector rentraient carrément dans l'écran. (P.26)
Ernest avait déjà sa femme, il la trompait sûrement avec une brune du département litiges sociaux, mais sur les photos de famille, ça ne se voyait pas. On construisait une belle apparence. (P.73)
(à propos d'un docteur) Il fallait être pressé pour soigner une réputation (c'était bien la seule chose qu'il soignait). (P.16)
Son futur lui paraissait flou ; son futur était un cliché de paparazzi. (P.34)
(à propos de sa nièce) Face à l'innocence on est face à la vie qu'on ne vit pas. (P.35)
Au moment où le mur de Berlin s'effondrait, il avait rencontré une Laurence et ils construisaient depuis une relation stable. (P.46)
Marcel avoua qu'il était de mèche avec un coiffeur (...) (P.51)
(le jour du mariage d'Hector) derrière les arbres du jardin, à l'ombre de l'amour des mariés (P.74)
Elle se retourna, inlassable féminité, et quitta ses rêves pour l'homme de son lit. (P.87)
L'évanescence captée, la sensualité attrapée, il aurait pu mourir ce jour-là puisque Thomas Mann avait écrit "Celui qui a contemplé la beauté est déjà prédestiné à la mort." (...) Mais Hector ne savait pas qui était Thomas Mann, alors il pouvait survivre. L'inculture sauve bien des vies. (P.92)
comme tout judéo chrétien qui habite Paris, il fut rattrapé par une culpabilité rive gauche. (...) La honte boitait sur sa figure. (P.112)
Outre le vide de la formule... aïe aïe aïe la grammaire...
Ce fut ces instants d'avant l'amour où l'on se dévoile dans l'innocence des évidences. (P.61)
Là encore sur le plan de la grammaire et où de la syntaxe ça cloche (mais que font les éditeurs ? c'est le job, non, de ne pas laisser passer des trucs pareils (surtout dans un bouquin de moins de 200 pages))
On ne pouvait pas savoir qui prenait le plus de plaisir, l'omniscience s'arrêtait devant les orgasmes possibles. On savait juste qu'Hector, au moment de venir, alors que sa tête avait été une coquille vide, au moment de jouir, était hanté par cette image, Brigitte qui lavait les vitres. (P.88)
Ils avaient joué leur crise, et puis voilà, on oubliait tout. (P.107)
Plus tard, quand il serait chez le médecin, mardi prochain en fin d'après-midi, le docteur Seymour essayera de vous prendre entre deux rendez-vous avait dit Dolorès l'assistante intérimaire, puisqu'il avait insisté pour voir se radiologue, on lui confirmerait une fêlure. (P.131)
La vieillesse réduit l'espace vital des couples. On finissait l'un sur l'autre comme si on se préparait pour la concession. A cet âge où l'on n'a plus grand chose à se dire, il fallait enchaîner les banalités. (...) Son père parlait de moins en moins, elle souffrait de ne plus trouver de sujet de conversation qui l'intéressaient. Il ne voulait jamais parler du passé. Ni du présent ni du futur finalement. Alors elle le regardait, cet homme vieux qui était son père. Son visage plissé par une peau aussi raccourcie que le temps qui lui restait à vivre. En l'observant, bien loin de déprimer, elle pensait plus que jamais qu'il fallait profiter de la vie. (P.167)
Le livre regorge de ce genre de phrases supposées marrantes mais qui ne m'amusent pas vraiment.
Hector s'insurgea, mais d'une manière somme toute ridicule puisqu'il ne savait pas très bien s'insurger. (P.23)
Hector suait ses dernières gouttes de sueur. (P.70)
Laurence faisait de nombreuses connaissances et l'on pouvait croire qu'elle connaissait bien le lieu car elle adorait montrer à ses connaissances des endroits qu'on ne connaissait pas. (P.74)
Parfois l'ennui les prenait par surprise, lors de certains mardis ou samedis sans surprises (P.83)
"Hector tu as replongé !".
Dans un premier temps, Hector pensa piscine. Puis, il sortit la tête de l'eau pour comprendre le sens figuré du mot "replongé". (P.103)
François Mitterrand était mort d'une longue maladie longuement cachée aux français. (P.125)
Conclusion
Le plus réussi dans le roman : son titre.180 pages pendant lesquelles je me suis ennuyée.
Allez lire les critiques élogieuses précédemment écrites sur ce livres et/ou faites vous votre propre opinion. Bref, je ne suis pas convaincue par le potentiel stylistique de Foenkinos.