Un manga expliquant les mécanismes du capitalisme ?
En parcourant les rayons d’une bibliothèque, j’ai bien cru avoir la berlue.
Et pourtant…
L’histoire :
Robin, fils de fromager, rencontre Daniel, un investisseur que rien n’arrête lorsqu’il flaire une bonne affaire.
Il décide de prêter un capital à Robin, charge à lui de faire fructifier l’argent ainsi investit.
Le jeune fromager passe alors de la fabrication familiale traditionnelle à une production qui se doit d’être rentable avant tout.
Robin se retrouve bientôt à la tête d’une usine et d’une force de travail : ses ouvriers.
Tout d’abord séduit et flatté par sa bonne fortune, le jeune homme prend petit à petit conscience que le système capitaliste dans lequel Daniel l’a entraîné prend des allures de cercles vicieux, de spirale infernale.
Pire, Daniel se révèle un homme avide de richesse, prêt à contrôler tout son monde comme un pion sur un échiquier quitte à y sacrifier ses pièces – y compris Robin…
Impression de lecture :
Passé le doute qui m’avait assaillie devant cet ovni, j’avoue avoir trouvé l’histoire très prenante.
Les ressorts du capitalisme et de ses dérives selon Marx sont bien introduits dans l’intrigue générale sans être simplistes mais juste simplifiés pour les rendre plus facilement intelligibles.
C’est donc une façon originale de se familiariser avec les idées de Marx, sur la question du capitalisme de son fondement à aujourd’hui et enfin, d’enrichir sa vision de l’économie tout en se faisant sa propre opinion.
Le ton du manga est anticapitaliste, autant en informer d’emblée le lecteur…
Un bémol, le graphisme est très passable et certaines cases sont même assez hideuses. Mais la qualité de l’histoire permet de faite l’impasse sur ce défaut.
Le manga se présente en 2 tomes :
Chapitres du tome 1
La marchandise
L’exploitation
La force de travail
La valeur
Chapitres du tome 2
La plus value
La recherche du profit et la surproduction
Les contradictions du capitalisme
Les banques et la suraccumulation
Les crises du capitalisme
Morceau choisi (p. 182-185 du tome 2) :
« (…) faisons un petit bilan.
Le capitalisme est un système qui vise à réaliser du profit avec un capital.
Et ce profit, c’est la « plus-value ».
Cette dernière s’obtient grâce au travail du prolétariat.
Le but du jeu, pour les capitalistes, est d’arriver à profiter au maximum des travailleurs pour générer le plus de profits possible.
Et pour réussir à dépasser la concurrence, ils produisent toujours plus de nouvelles marchandises afin de se démarquer. Afin d’obtenir toujours plus les patrons n’hésitent pas à mécaniser leur entreprise, à l’agrandir, à la moderniser.
Mais c’est à cet instant bien précis que le capitalisme montre son visage contradictoire.
Souvenez-vous… la plus-value ne s’obtient qu’avec la force de travail des hommes, le capital variable.
En revanche, les machines représentent un capital constant qui n’engendre pas de valeur ajoutée.
Malgré cela, les entreprises continuent de s’équiper en machines. Les ouvriers sont petit à petit licenciés et remplacés par la mécanique. En diminuant ses effectifs, l’entreprise va peut-être accroître ses profits.
Mais dans le même temps, c’est son taux de profit et donc de rentabilité qui vont fortement baisser !
En d’autres termes, les patrons provoquent eux-mêmes leurs pertes.
Une nage en eaux troubles commence.
Et quand ils commencent à fatiguer, ils s’unissent et fusionnent pour avancer dans la même direction. (…) »
« Le Capital », Karl Marx - Friedrich Engels, 2 tomes, collectif, chef Soleil Manga, studio Variety Artworks pour l’adaptation. Préface d’Olivier Besancenot.
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