Je vous présente l’interview de Marcel AZNA – sosie de Charles AZNAVOUR. Ce fût un grand plaisir de le rencontrer ainsi que son épouse Simone. Ce sont de beaux octogénaires, heureux, pétris de leur passion commune pour la musique, que leur amour l’un pour l’autre conjugue avec harmonie. Marcel a un studio à l’étage de sa maison. Il chante tous les jours une vingtaine de chansons…et oui ! Simone quant à elle est bien calée dans un confortable fauteuil et en parfaite maitre-chanteuse, corrige notre star. Patience et passion… au service de la rigueur d’une interprétation toujours parfaite….respect.
A écouter Marcel Azna dans son studio, j’ai ressenti les mêmes impressions que son public : une émotion profonde et des poils qui se hérissent. C’est charnel et si beau !
Avec lui j’ai compris ce qu’était le talent d’un sosie : bien-sûr une ressemblance physique, puis la voix, ensuite la gestuelle et enfin ce sentimen
t d’être …et oui…d’être l’artiste et là cela se vit, l’on déguste avec appétit… son visage qui s’anime de 1000 expressions. Il est riche, beau et pétillant de la joie de chanter !Une carrière où tout a commencé en 68…’année où j’ai rencontré Charles Aznavour…’
Place à l’artiste. Rideau !
Stéphane SAGAS pour une interview au Pays de Sosyland
Quelles sont les circonstances qui ont déclenchées ton entrée dans le monde des sosies ?
Ca a commencé à l’Ile de Ré en 1965. C’est marrant on était au camping et un ami me dit : « Qu’est-ce que tu ressembles à Charles Aznavour. Tu ressemblerais encore plus encore si tu rasais tes moustaches. ». Toute la nuit j’y ai pensé. Je me suis rasé et à partir de là dans le camping : « Bonjour Azna ! », « Tiens voilà Azna ! ». Mais déjà dans mon travail, mes collègues m’appelaient Azna.
Sur la plage 2 jeunes avaient parié sur le fait que j’étais Aznavour ou non. Il a même fallu une fois au camping que je présente ma carte d’identité, pour que je prouve qui j’étais.
Depuis quand vis-tu dans le monde des sosies ?
Et après c’est formidable, Simone mon épouse ou des copains m’inscrivaient en douce à des radios crochets, lorsque nous étions dans la Manche en vacances, dans ma maison de campagne. Et la veille, ils me prévenaient que je devais passer au jeu radiophonique. Jétais souvent 1er, et 3ème au maximum. Je ne connaissais que « Et pourtant » et « La Mama ». Je faisais des cartons dans toutes ces fêtes de villages. Cela m’a incité à apprendre toutes les chansons d’Aznavour. Aujourd’hui, j’ai un spectacle d’environ d’une heure avec 25 chansons.
Début 1968, j’ai refait mon nez car j’étais complexé. Ensuite…tout a commencé !
Peu de temps après, j’ai répondu à l’annonce d’un concours de chant dans Télé Dimanche, qui étais animé par Roger Lanzac et produit par Raymond Marcillac. J’ai été au casting de cette émission, et en fin de compte j’ai passé 3 fois le casting, car Raymond Marcillac ne voulait pas de moi. Je ressemblais trop à Charles Aznavour. Roger Lanzac insista. Il fallu donc demander à Charles Aznavour lui-même. J’ai été pris mais hors concours. C’est à ce concours que Mireille Mathieu et Georgette Lemaire se sont fait connaître.
D’abord, j’ai chanté derrière le rideau et de dos. Puis le rideau s’est levé. Tout le monde croyait que c’était Aznavour. Puis quand je me suis retourné, les gens se sont levés de surprise et m’ont applaudit.
Suite à ce concours des journalistes m’ont proposé de rencontrer Charles Aznavour à Nice pour
faire des photos avec lui. J’ai bu du champagne avec lui. Je ne savais pas trop quoi lui dire. Je lui ai proposé de faire ses doublures dans des films. Mais je n’ai pas eu de réponse. Il était très content de me voir et m’a encouragé à continuer. Il était étonné de me voir pour la ressemblance et la taille. « C’est très bien continu ! »Ensuite, j’ai chanté au restaurant ‘Le Soleil’ au marché aux puces de St-Ouen, avant Georgette Lemaire. On faisait chacun 2 passages par jour, entre les plats de moules-frites qui nous passaient sous le nez. C’était très dur mais c’est là où j’ai appris le métier. Je travaillais à la RATP et y chantais le samedi et le dimanche. Je faisais la manche et gagnait entre
75 à 120€/ jours soit jusqu’à 250€ pour les 2 jours. Il y a au moins 25ans…Quand je chantais ‘La Mama’ les gitans me mettaient des billets de 15€ dans la poche et ma femme leur courait après pour les remercier. Linda de Suza avait chanté avant moi au ‘Soleil’.Ensuite, j’ai chanté pendant 5 ans à ’La Péniche’ à Chelles chez Gérard, le patron, tous les vendredi et samedi. Nous étions 4 artistes qui faisions la soirée. La chanson « Tu te laisses aller » marchait très bien et je la chantais en m’adressant à des femmes. Elles étaient très contentes.
J’ai chanté très souvent avec des sosies d’Annie Cordy (Annie Ardy), Johnny, Carlos, Cabrel, Sylvie Vartan. Le sosie de Carlos m’a fait beaucoup travaillé dans sa région du Nord, où il tenait une agence de sosies.
Au Théâtre du Châtelet à Paris, j’ai une anecdote terrible à laquelle je pense toujours. J’ai été voir Aznavour au concert avec ma femme. On a pris un verre dans un café à coté. Une femme vient me voir avec un cahier et me parle en arménien. « Ecoutez Madame, je ne comprends pas l’arménien ». « Vous ne connaissez pas votre langue » me répondit-elle ! Dans son cahier elle me présentait ses poèmes. Elle ne voulait pas me croire, que je n’étais pas Charles Aznavour.
Une fois je suis allé voir Charles Aznavour à l’Olympia. Avant la dernière chanson, je suis parti dans les coulisses pour avoir un autographe. Il y avait plein de monde. Les filles ont sauté sur moi. Elles manquaient de me déchirer ma cravate et ma chemise. J’ai crié « Je ne suis pas Aznavour ! ». Ensuite, j’ai obtenu ma dédicace.
A l’occasion des grèves, en mai 68, les ouvriers de Renault avaient fait une scène où j’ai chanté. Ils n’en revenaient pas, que je ne sois pas Charles Aznavour.
Comment as-tu travaillé ton personnage ? Quels ont été les contacts nécessaire à prendre, les recherches à faire…expliques-nous ?
J’ai acheté des CD et des partitions. J’ai beaucoup chanté avec un pianiste qui jouait sur mes partitions. Puis un ami m’a réalisé des bandes sons avec son ordinateur. Puis, j’ai acheté des disques de karaoké. J’ai choisis ceux qui étaient à la hauteur de ma voix. Dans les boites de nuit où j’ai chanté, j’ai recopié les bandes sons, qui avaient servis à m’accompagner de chanter.Je ne choisis que des chansons que je vis. Il y en a que je ne prends pas. « Tu te transforme quand tu chantes » dis Simone.
A-t- il été nécessaire que tu ais un agent ? Est-ce ton conjoint ? Quelles sont vos relations ?
C’est Simone ma femme ! Elle me soutient et elle a plus d’oreille que moi. Elle me corrige et me conseille, quand je travaille une nouvelle chanson. Souvent je chante à contre-temps comme Aznavour.
« C’est moi qui tiens la sono », me dit Simone.
J’ai des contacts avec une dizaine d’agences, qui me sollicitent, mais je n’ai pas de contrat.
Que peux dire ton agent de toi ?
«Même la nuit, il pense à Aznavour ».
Est-ce que cela a modifié ton quotidien ? Qu’en penses tes intimes, amis, famille et collègues ?
Rien n’a changé, je suis toujours le même. Les collègues m’ont toujours appelé Azna. En gala, le smoking est de rigueur. Tous les jours je pense à Aznavour. Parfois, dès que je me lève, ou alors 1h après. Il n’y a pas un jour sans penser à lui. Il est dans ma tête. Je ne suis pas fan dans le sens fanatique. Pour moi c’est mon maître. Je ne suis pas un imitateur, mais un interprète, car quand je chante je vis la chanson.
Vis-tu au boulot ou dans ta ville en sosie ? Pourquoi ?
Non
Comment vis-tu quand tu es en représentation de ton personnage ?
Les gens me disent que j’ai une présentation, des tics, la voix d’Aznavour. On voit Aznavour en moi partout !
Simone : « J’ai vu Aznavour dans les coulisses : mêmes mimiques, même façon de toucher ses boutons de manchettes, de se pincer le nez, de remettre sa ceinture ». « Mais mince, c’est tout Marcel ! » pensa-t-elle.
Marcel : « Moi, j’ai le trac, je suis discret, pas celui qui se fait voir ».
Quelles sont les bons souvenirs avec tes fans ?
Quand je chante « Tu te laisses aller » ou « La Mama » des gens pleurent. Ils me disent : « C’était impeccable…vous m’avez fait pleurer ». Ou encore : « Vous m’avez fait dresser les poils sur le bras ».Ton regard a-t-il changé à l’égard de l’original, depuis que tu le représentes ?
C’est quand on m’a dit que j’étais sosie que j’ai découvert Aznavour. Ses chansons ne me disaient pas grand chose. Je ne savais même pas chanter. Ensuite, je ne pouvais pas faire autrement.
As-tu des nouvelles de Charles Aznavour ?
Nous avons envoyé un télégramme pour les 80ans de Charles Aznavour. Nous l’avions prévenu que pour son concert, nous serions au 1er rang. Il nous a salué et a chanté son récital devant nous. En fin de concert il chante toujours : « On se reverra ». Il a chanté devant moi, et j’ai chanté avec lui. Les gens n’en revenaient pas. C’est aussi la dernière chanson de mon concert.
As-tu décelé des ressemblances dans vos vies respectives entre l’original que tu représentes et toi-même ? Qu’en penses-tu ?
Charles Aznavour raconte beaucoup de choses sur sa vie et je retrouve beaucoup de choses…pendant l’occupation et aussi quand j’étais jeune. J’ai fais aussi pleins de petits boulots, comme de vendre des cravates.
Moi, ça me tiens dans la vie, ça me donne du tonus. Chez moi, je marche le long de la Seine et je chante en même temps. En vacances, tous les matins, je marche le long de la plage et je chante des récitals complets.
Je suis toujours en train de chanter. Quand j’ai des galas, on ne peut pas me tenir, je chante tout le temps. Dans la rue, les gens me disent Bravo ! « C’est pour te dire que je pense toujours à lui. C’est incroyable comme cela peut me faire. »
Charles Aznavour fait un duo avec Patrick Bruel avec « Ménilmontant ». Dans mon concert, je chante « Ménilmontant » aussi et « Plus bleu » en duo avec une femme.
As-tu déjà bluffé avec ta ressemblance ? Allez, vas-y…
Non, mais quand je vais au concert de Charles Aznavour, quand je fais la queue, le gens me regardent, aussi quand je m’assoie.
As-tu un petit secret, que tu pourrais aimablement nous délivrer, une passion secrète ?
J’ai acheté récemment une Mercedes. La voiture c’est ma passion. Comme Charles Azanvour. Je nage très souvent à la piscine. Beaucoup plus jeune, je nageais dans la Seine à Port St-Ouen.
Quel regard portes-tu sur ta carrière de sosie ?
Que de la joie ! « C’est vrai ! » confirme son épouse.
Jusqu’où géographiquement es-tu allé pour te produire…racontes…
Toute la France. L’année dernière, j’ai fait 600km pour me rendre à une prestation.
As-tu côtoyé des stars ? Quels sont les échanges que vous avez eu ?
- Tino Rossi m’a dit : « Tu sais toi, tu as une voix de ténor, tu devrais chanter comme Luis Mariano ». Etait-il sérieux ? A l’époque, j’avais une grande voix forte lorsque je chantais ‘Et pourtant’.
- Guy Lux, m’a présenté dans une dizaine de galas. Il m’embrassait.
- Philippe Bouvard, m’a fait chanté dans son émission ‘Ce soir chez Maxim’s’, Tino Rossi, y chantait également ce jour là.
- Georges Pagnoux était directeur des sports du journal ‘Le Parisien libéré’. Il m’a fait faire
beaucoup de galas intervilles ou encore sur les podiums du Tour de France. Pierre Bellemare me présentait- André Chanu, reporter m’a fait chanter auprès de malades, à l’hôpital des Invalides. Les danseuses du Lido étaient aussi sur scène à mes cotés
- Cauet c’est un ami à moi et il embrasse ma femme. Il me blague sur ma taille « C’est le 1er chanteur que je vois passer sous les caméras » (janvier 08). Cauet anima une émission avec les jeunes qui n’avaient pas été pris à la Star Ac’. Ils n’arrivaient pas à chanter ‘Emmenez-moi’. Ils avaient pourtant les paroles sous les yeux et j’avais choisit pour eux les parties les plus facile de la chanson. L’impresario m’a dit : « Vous en faites pas ce sont des chanteurs » et a donc rectifié mes indications….et l’un des chanteurs s’est planté….(et oui Marcel, on ne peut pas lutter devant tes 40ans de chansons)
Es-tu allés sur des plateaux télés ? Comment cela s’est-il passé ?
En mars 2008, j’étais avec ma femme dans le public pour l’émission de télévision : « Les femmes sont à l’honneur » animé par Olivier Minne et Virginie Guillaume. Aux
poses techniques, j’ai chanté. Tout le monde n’en revenait pas : « Vas-y Marcel ! ». J’ai chanté 4 chansons et le pianiste m’a accompagné.Je fais régulièrement des plateaux télés et le public est toujours surpris de m’entendre.
As-tu tourné dans des films ? Quelles sont tes impressions ?
Non, mais pour le film ‘Emmenez-moi’ (d’Edmond Bensimon avec Gérard Darmon) ayant trait à Charles Aznavour, j’ai chanté à l’avant première.
Travailles-tu avec d’autres sosies ?
En plus de ceux précédemment cités : Jean-Jacques Goldman, Véronique Sanson, Bourvil, Mike Brant, Mylène Farmer, Patrick Bruel.
Fais-tu des tournées ? Comment t’organises-tu ? C’est avec d’autres sosies ?
Oui, je fais des tournées. Juillet/Août en Charente Maritime : St Georges sur Didon, La Palmyre, l’Ile d’Oléron…je vais sur les places principales, ma femme est à la sono et le chapeau est à coté de moi. Je vends aussi mes cd.
« Les gens accourent car ils croient que c’est le vrai » surenchérit sa chérie Simone
Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui atterrit à Sosyland ?
Etre soi-même, ne jamais baisser les bras, persévérer et être bien dans sa peau.
As-tu quelque chose que tu souhaiterais dire particulièrement….
C’est très dur d’être un sosie ! Il travaille beaucoup, mais est cantonné à n’être qu’un imitateur et c’est difficile de faire carrière. Il n’y en a pas beaucoup qui réussissent et qui sont pris en main.
As-tu une prestation prochaine à nous transmettre ?
Rendez-vous cet été en Charente Maritime !
As-tu réalisé quelque chose d’artistique comme un disque, un film… ?
J’ai enregistré un CD de 17 titres dans un studio en Belgique. L’ingénieur du son c’est un italien aveugle. Il est impeccable ! J’ai aussi apporté quelques titres fait chez un ami à Paris. Il en a fait l’arrangement.
Dans mes concerts, je chante aussi A Cappela : ‘You are the one’, ‘Tu te laisses aller’…
Un souhait :
Je cherche une belle bande musicale de la chanson ‘Avec’. Merci d’avance.
Ton site et comment te contacter :
http://www.marcelazna.com/
21, rue Mathilde Millard 92390 Villeneuve la Garenne
Tél/fax : 01 47 98 84 97
Les photos proviennent de la collection personnelle
de Monsieur Marcel AZNA
Je te remercie et te souhaites tous mes voeux à Sosyland !
Sosyland c’est aussi : www.myspace.com/stephanesagas