Bonjour aux marié(e)s, pacsé(e)s, célibataires de tous sexes
Bonjour aux zotres
Dessin signé Hub
Une sélection axée sur un sujet d'actualité qui, au delà des convictions personnelles, démontre que l'étymologie elle-même n'est pas à l'abri des tentatives de récupérations.
Moi, fondamentalement, je suis pour le célibat pour tou(te)s !
Quand l'étymologie du mot mariage (sort de la neutralité)
Le 14 janvier dernier, en plein débat "pour" ou "contre" le mariage pour tous (même si je n'aime pas l'expression je soutiens l'idée), sur le groupe Yahoo mots passion, Isabelle expliquait ainsi l'étymologie du mot mariage :
Lorsque l'ormeau s'unissait à la vigne, là-bas, in Italia [en latin], on le disait maritus, marié à la vigne. (...) Un terme d'agriculture que les poètes ont emprunté, tant ils ont trouvé l'image jolie, comme synonyme de nuptial, conjugal. Et l'époux devint le mari, maritus suppléant vir. Passé en français, le mot a conservé ce sens. (...) Pourquoi l'ormeau et la vigne étaient-ils mariés ? Ils ne produisaient pourtant pas de fruits, ils ne le pouvaient pas, mais c'est ainsi, ils s'entrelaçaient étroitement, étaient mariés. Le mariage stricto senso n'est qu'union. (...) Le mot ne peut démentir cela, et ne nous encombre pas d'autres idées. Le reste … n'est que connotation en termes de droit, de conventions, de morale, de religion, de philosophie … dont le mot ne dit pas mot.
J'ai voulu compléter cette analyse en allant voir ce que disait Wikipedia sur le sujet et là, surprise. Et là, surprise. Rien à voir. Pas d'ormeau, pas de vigne, mais ceci :
En français, le nom mariage provient du verbe latin maritare, issu de maritus, qui dérive, d’après une explication traditionnelle, de mas / maris, le mâle. L’adjectif qui lui correspond « matrimonial », provient du substantif latin matrimonium, issu de mater, la mère et signifiant également mariage. L'usage du mot latin matrimonium dans les textes juridiques et théologiques a largement contribué en Europe à l’élaboration de la notion. Il n'a pas laissé de substantif en français moderne, mais reste néanmoins présent en italien et en espagnol, sous la forme de matrimonio. Dans les pays d'Europe occidentale dont les langues découlent du latin, le cadre lexical du mariage renvoie donc à une forme juridique par laquelle la femme se prépare à devenir mère par sa rencontre avec un homme...
La conclusion du paragraphe sort clairement de la pure analyse etymologique pour entrer dans le domaine de l'interprétation et introduire la notion de procréation. Interprétation qui va plus loin que la définition donnée ensuite :
Le mariage est défini traditionnellement comme l'union légitime d'un homme et d'une femme ou comme l'acte par lequel l'homme et la femme se placent dans une situation juridique durable afin d'organiser leur vie commune et de préparer la création d'une famille »
L'auteur de cet article prend certes la précaution d'utiliser l'adverbe "traditionnellement" mais ma lecture m'a laissée un sentiment de mailaise et donné envie de poursuivre mon surf ailleurs. Je suis ainsi tombée sur le forum "Etudes littéraires" où un certain Lucretius apporte un contrepoint intéressant.
Je suis toujours peiné par les étymologies fallacieuses qui circulent. La plupart du temps, il s'agit d'approximations visant à épater le bourgeois. Mais en ce moment, je ne cesse de tomber sur une fausse étymologie visant à constituer un argument dans un débat de société. Le mariage, dit-on, viendrait de maritare et de matrimonium : maritare venant de mas, et matrimonium de mater, l'union de l'homme et de la femme, à visée procréative est inscrite étymologiquement (pour ne pas dire ontologiquement) dans le mot. Cette étymologie est impossible, les familles de mots matrimonium et maritus, ayant toujours été distinctes, et le mot mariage ne comportant aucune trace phonétique ou sémantique du mot matrimonium. J'ai réussi à remonter à la source de cette erreur : il s'agit de l'article de Wikipedia consacré au mariage, où un juriste nommé Benoît de Boysson, cite son propre ouvrage sur le mariage, pour donner un poids à cette invention étymologique. J'ai beau la remplacer par une étymologie correcte, et citer le dictionnaire historique d'A. Rey, il remet toujours SON étymologie, en criant "halte au vandalisme anonyme", et en affirmant par ailleurs qu'un travail de 6 ans a plus de légitimité qu'une simple entrée de dictionnaire. Je me demande si je ne suis pas entré dans une lutte sans issue où chacun va annuler la modification de l'autre à perpétuité. Avez-vous des idées pour sortir de ces impasses ? Doit-on se résigner à ce que des erreurs se propagent ainsi grâce à ce média "démocratique" ?
Le souci c'est qu'il semblerait que la contestation ne soit guère plus neutre que son objet.
Quand le véritable enjeu du mariage est révélé
Faut-il se déchirer pour ça ?
Quand Croquinambourg a dit
Le militantisme n'empêche pas le bon sens et l'humour.