Le premier est recruté très jeune par la mafia pour infiltrer la police. Le deuxième est envoyé en prison au sortir de l'école de police pour infiltrer la mafia. S'engage alors une chasse pour débusquer la taupe dans chaque camp. La trame est sensiblement la même dans les deux films. Seuls les lieux changent. Le Hong Kong d'Infernal Affairs devient Boston et la mafia irlandaise remplace la mafia chinoise. L'intrigue se base essentiellement sur un duel; celui du policier corrompu et du policier infiltré et un seul peut en sortir vainqueur.
Dans Infernal Affairs, Andy Lau et Tony Leung sont tout simplement parfaits. Après dix ans d'infiltration, de mensonge et d'angoisse, les deux hommes sont fatigués, à bout nerveusement et on sent chez chacun d'eux des fêlures, même si par pudeur, ils ne les dévoilent pas. Une véritable tension émane d'eux. Dans Les Infiltrés, Leonardo DiCaprio est tout aussi impressionnant mais j'émets une petite réserve concernant Matt Damon. Son personnage est assez lisse, insensible, et ne lui permet pas de s'élever au niveau de son compère qui joue les funambules sur le fil de la raison. Le troisième personnage non négligeable est le chef de la mafia. Eric Tsang fait un mafieux chinois assez raffiné et calme qui sait comment se faire respecter. La violence ne lui répugne pas mais il fait preuve d'une sérénité tout à fait asiatique. Le contraste avec Jack Nicholson n'en est que plus violent. Son personnage est agressif, odieux et légèrement répugnant. Toute la sympathie que l'on pouvait avoir pour Sam est balayée par la vulgarité de Costello. Toutes les promesses annoncées par les deux castings sont donc tenues et la différence majeure entre les deux films ne réside pas dans l'emploi des acteurs mais du scénario. Infernal Affairs joue sur l'efficacité et la sobriété. Il n'y pas de fioritures inutiles, rien qui puisse plomber l'histoire. Les réalisateurs ne s'embarrassent pas d'une romance; ils ne font que suggérer une attirance entre le personnage de Tony Leung et sa psy. Cependant, certains passages ne manquent pas de poésie, comme lorsque Tony Leung et Andy Lau écoutent une chanson assis côte à côte, sans savoir qu'ils sont ennemis. Les Infiltrés est plus dans une frénésie toute américaine. Il y a beaucoup de dialogues et de grossièretés qui menacent de lasser le spectateur. Le scénario original a été étoffé pour transformer un film d'1h30 en film de 2h30; Scorsese ajoute donc un triangle amoureux très hollywoodien et une histoire de cartes à puces volées aux scènes qu'il copie littéralement. Du coup, certains passages manquent un peu de logique.Les Infiltrés est un très bon film de Scorsese mais il ne tient pas la comparaison avec Infernal Affairs, qui est plus épuré. De plus, Infernal Affairs est le premier opus d'une trilogie qui peut se permettre d'effleurer la psychologie de certains personnages pour qu'elle puisse être développée dans les deux autres films. En revanche, sur un point, Scorsese est supérieur à son modèle chinois: la bande originale. La plongée dans la mafia irlandaise lui permet de nous remplir les oreilles avec d'excellentes musiques comme I'm shipping up to Boston des Dropkick Murphys, c'est un vrai petit bonheur.