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Canet, le 12 mars 2007 Distinction entre l'indice et le symbole.

Publié le 08 janvier 2013 par Balatmichel

Canet, le 12 mars 2007

Distinction entre l'indice et le symbole.

Le premier État moderne Les collections de l'histoire n°35, Les Anglais, un peuple pas comme les autres, avril-juin 2007, Entretien avec Jean-Philippe Genet, Professeur à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne.

L'H. : Pourquoi ce nom d'Échiquier ?

J.-P. G. : Les comptes sont faits sur un tapis qui ressemble à un échiquier. C'est un système de comptabilité qui permet de manier la monnaie de compte médiévale, en livres, sous et deniers, avec une grande efficacité. Très tôt, cet Échiquier se pourvoit d'une archive sous la forme des pipe rolls : on note les comptes sur un parchemin recto verso, et lorsqu'on est arrivé au bout, on en prend un autre que l'on coud à la suite. Cela forme un énorme rouleau que l'on accroche au plafond pour pouvoir en lire les deux faces, et que l'on conserve. C'est le premier système d'archives en Europe pour un pouvoir laïque, dans les années 1110-1120 — les archives françaises ne commencent qu'avec la conquête de la Normandie en 1204.

Cette administration « moderne », qui fonctionne par l'écrit, travaille avec des gens qui ne savent ni lire ni écrire. Un système très efficace a donc été mis au point : pour chaque opération, on fait ce qu'on appelle une « taille », on prend deux baguettes de bois identiques, et on marque dessus les sommes de la transaction grâce à un système d'encoches. Un exemplaire reste à l'Échiquier et l'autre est conservé par le visiteur.

M. B. : Bon. Quelle histoire ! Je suis pris entre deux trucs, je voudrais à la fois vous parler un peu de Château Rauzé, puisque j'étais à Bordeaux, et puis d'autre chose… au moment de la réunion du jeudi matin, là où il y a tout le monde…

L. F.-C. : Oui…

M. B. : … celui qui a le crâne, tu sais, les cheveux pratiquement rasés, avec trois énormes cicatrices… ça fait deux ans que je le vois, et il dit toujours la même phrase. De temps en temps, il demande la parole et il dit sa phrase. Ça donne l'air con d'être aphasique. C'est très emmerdant pour eux, c'est terrible ! Il y en a un, je me souviens, qui avait les larmes aux yeux, en m'expliquant : « Quand on me voit, on me parle normalement, et puis quand on m'entend répondre on se dit : ce type est un couillon ! » C'est terrible ça… Donc, je lui donne la parole pour respecter les rituels, et, à ce moment-là, il dit une série de phrases, toutes différentes, parfaitement situées. J'étais stupéfait : ça marche ! D'ailleurs, c'était un petit peu le thème de ces deux jours là, c'était que ça marche.

Et on parle d'un bonhomme, Taïeb, qui fait de tout. Il y en a toujours un qui fait de tout, c'est obligatoire. L'équipe se plaignait, et on le fait venir avec tout le monde au moment de la réunion du jeudi matin. D'habitude il n'y a que l'équipe, mais là, les autres blessés étaient présents. Alors c'est plus canulé pour faire le travail, mais enfin, en même temps, c'est très intéressant. On s'est aperçus, même si le Taïeb en question emmerde tout le monde, tout le temps, que les autres blessés n'étaient pas si désagréables que ça avec lui, et qu'ils commençaient à s'intéresser à lui et à le comprendre. Je me suis souvenu de l'état dans lequel il était deux ans auparavant : c'était invraisemblable. C'était un type détruit complètement, les bras et jambes tournés dans tous les sens… c'était terrible, et, deux ans après, le même Taïeb emmerde tout le monde. Ça c'est bien, c'est un grand progrès : il fume du haschich, il a des crises d'épilepsie, il a tout ce qu'il faut, enfin il est parfait, donc ça marche, ce qui est stupéfiant, vu l'état des blessés quand ils arrivent…

Ma copine « la portugaise » est partie…

Public : Ah !

M. B. : Elle est dans une maison de retraite, elle est ravie, et elle a toute sa tête : elle se souvenait qu'elle avait oublié un papier à Château Rauzé, ce qui était pas mal. Elle l'a réclamé et voilà. Ça vaudrait le coup de faire une chronique de Château Rauzé au jour le jour, avec les variations des équipes. C'est intéressant les variations des équipes : on voit des gens qui étaient plutôt renfermés, qui refusaient de parler, tout à coup se lâcher, dire des trucs passionnants, enfin c'est vraiment intéressant.

(…)


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