5 ans de prison et 75.000 euros d'amende, c'est ce que risque un médecin s'il transmet une simple information à ses patientes concernant la pratique de la PMA à l'étranger. Alors le médecin est considéré comme « responsable de la mise en relation de ses patients » avec la clinique ou le centre étranger. Mais alors que le Conseil national de l'Ordre des médecins publie ce courrier de rappel de la Direction générale de la Santé, précisant les sanctions pénales, la France se trouve face à une pénurie spécifique qu'elle va devoir régler.
Le contexte est caractérisé en France par un déséquilibre marqué entre un besoin croissant d'assistance médicale à la procréation (AMP) et un nombre de donneuses insuffisant. Face à cette incapacité à satisfaire sur le territoire national les besoins des couples requérant ce don de gamète, le recours aux centres transfrontaliers est en augmentation, parfois même sur incitation des médecins français eux-mêmes.
En France, le cadre juridique est plus contraignant que chez de nombreux voisins européens, ce qui contribue à expliquer la faiblesse du nombre de dons et les recours massifs aux centres étrangers. Ainsi, une donneuse devra avoir procréé avant de donner ses propres ovocytes, être en âge de procréer, obtenir le consentement de son conjoint et ne sera pas indemnisée (ici, en France, comme dans la plupart des pays européens). Rappelons également, dans le contexte du projet de Loi sur le mariage « pour tous », qu'aujourd'hui, le recours au don d'ovocytes est réservé, en France aux seuls couples hétérosexuels. En revanche, en France, le parcours de soin est totalement pris en charge et remboursé à 100% pour l'AMP jusqu'à 4 tentatives de FIV et sous condition d'avoir moins de 43 ans. Mais quelle issue, lorsqu'on a plus de 43 ans ?
Un besoin très supérieur aux dons : Le rapport de l'IGAS de 2011 estime ainsi les besoins globaux entre 1.500 et 6.000 nouvelles prises en charge en AMP chaque année. Et, en 2008, le nombre de couples receveurs en attente dépasse les 1.600. Ainsi, sous condition de rentrer dans le cadre, les délais en France, d'accès à l'AMP restent extrêmement longs au minimum de 12 mois, plus généralement compris entre 18 mois et 3 ans.
Le recours aux soins transfrontaliers représente ainsi entre 80 et 85% de toutes les prises en charge de couples français recourant au don d'ovocytes, toujours selon le rapport de l'Igas. 1.800 à 3.600 femmes françaises iraient ainsi chaque année, plusieurs fois à l'étranger, conservant, si elles sont dans l'épure de la législation française le droit à une prise en charge de l'Assurance maladie, en vertu du principe de remboursement des dépenses de soins hors territoire national. Nos institutions connaissent donc bien l'ampleur du phénomène et sa progression. En 2010, 385 demandes acceptées auraient ainsi représenté 600.000 euros de prie en charge (pour près d'1,9 millions d'euros de dépenses totales). La demande d'AMP à l'étranger augmente fortement, elle aurait été multipliée par 15 en 5 ans.
La Direction générale de la santé s'inquiète de l'offensive possible des centres étrangers sur les spécialistes français. Il s'agit donc aujourd'hui, pour le système français de trouver les moyens de satisfaire un besoin thérapeutique national sans renoncer au un principe éthique de la gratuité du don. L'Igas qui a proposé des leviers, estime qu'un effort financier raisonnable permettrait de mettre en place une nouvelle organisation capable déjà, d'alléger une partie de la pénurie.
Sources: Conseil national de l'Ordre des Médecins Courrier envoyé aux conseils départementaux -, IGAS Etat des lieux et perspectives du don d'ovocytes en France (Visuels Agence de la Biomédecine)