Comme je le mentionnais dans le cadre d'un billet sur une exposition temporaire du musée de Leeds, et comme j'y refaisais référence lors d'une visite au British Museum, j'ai trouvé intéressant de voir que dans ce même musée de Londres, la ligne est parfois floue entre protection/éducation et pillage, puisque parmi les nombreuses pièces exceptionnelles de ce musée, on retrouve entre autre ce groupe-ci:
Il s'agit d'une série de plaques de laiton provenant du Palais d'Oba du Royaume du Bénin (couvrant une bonne partie de l'actuel Nigéria).Le musée possède environ 200 de ces plaques, illustrant toutes sortes de scènes, dont certaines de rencontres entre Africains et Européens. Les plaques du musée - on en retrouve environ 3000 dans le monde - datent du 16e siècle. Personnellement, je ne savais rien de cet art ni de ces plaques issues de ce royaume, alors les plaques du musée ont effectivement joué un rôle informatif et éducatif en ce qui me concerne. De plus, il s'agit d'un travail artistique très détaillé, superbement réalisé, alors leur présence au musée a été appréciée de ce visiteur-ci.
Toutefois, le musée ne se cache pas de la manière dont il en a fait l'acquisition, et c'est là que le malaise s'installe entre conservation et simple pillage. Car si aujourd'hui ces plaques sont présentées dans la collection (gratuite) du musée, on apprend que les plaques ont été acquises des Affaires étrangères britanniques, lesquelles possédaient les 3000 plaques originales, qu'elles ont vendues en grande partie. Ces plaques avaient carrément été volées du site du Palais lors de l'expédition britannique de 1897, au cours de laquelle l'ensemble de l'art du Royaume du Bénin a été détruit ou volé. Quand on apprend aussi que la raison de cette expédition punitive était justement le contrôle du Royaume, qui avait résisté à l'invasion britannique lancée en janvier de cette année-là, pas très noble comme cause, on en conviendra, on se dit que ces plaques devraient au moins se retrouver dans un musée du Nigéria, et non à Londres. Surtout qu'après la "conquête" de la cité, le pillage s'est rapidement installé; tous les membres de l'expédition se payant à même les richesses culturelles et artistiques du Royaume.
Aujourd'hui, 50 de ces plaques de laiton ont été rachetées au British Museum (et non retourné par celui-ci) par le Nigéria.
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Dans la série "coup donc, l'humain est tellement idiot qu'il n'apprendra jamais de ses erreurs" ou encore "que les électeurs sont une bande d'imbéciles de se laisser à nouveau convaincre et manipuler par les économistes néolibéraux", on notera cette oeuvre, également du British Museum, dans une exposition temporaire sur les crises économiques et financières récurrentes ayant frappé le pays. Ce dessin date de 1890, et on y voit une vieille dame ("Old Lady of Threadneedle", surnom de la Bank of England, sise sur Threadneedle Street), représentant la Banque Centrale, qui gronde des enfants, leur disant: "Vous vous êtes mis dans un beau pétrin avec votre belle spéculation!" [traduction libre], en leur tendant un peu d'argent pour les sortir du trouble, en mentionnant :"Pour cette fois-ci seulement!". Les jeunes financiers ont des cartes à jouer dans leur dos, illustrant leur propension à jouer à la bourse ou à utiliser les finances comme un jeu de poker.
Fascinant, n'est-ce pas, de voir un dessin vieux de 123 ans qui dénonce déjà les dérives que l'on a connu des dizaines de fois par la suite, sans que rien ne change à chaque fois? Un dessin qui dénonçait exactement ce qui s'est encore passé il y a quelques années sans que l'on ne change le système et qui se passera à nouveau inévitablement encore et encore? Fascinant mais déprimante illustration de la bêtise humaine qui vote encore pour les gens de la droite économique.
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Je termine donc sur une note plus positive, avec quelques images assez rares d'animaux islamiques.
Je les appelle ainsi, mais évidemment, ce ne sont pas des animaux musulmans, mais bien des représentations animales dans l'Art islamique. Leur rareté vient du fait que depuis des siècles, l'Islam (en tant que religion) bannit toute représentation de figures humaines ou animales. cependant, comme ce n'est pas le cas depuis toujours - et que semble-t-il, le Coran n'en parle pas vraiment - il existe des exemples de représentations humaines et animales dans l'art islamique, bien que ces représentations soient rares (et évidemment anciennes).
C'est pour cette raison que pour jouer avec la section d'art islamique du British Museum (une splendide et fort instructive portion du musée), je me suis amusé à tenter de dénicher ces représentations figurées dans leur collection [ci-haut, vases iraniens du 13e siècle].
C'est une partie du résultat de ce jeu de chasse à l'image animalière que l'on retrouve sur les trois photos présentées ici.
Certaines représentations sont très subtiles, comme ces oiseaux cachés dans les inscriptions décoratives. Certaines pièces du musée montrent également ce genre de représentations, mais où les têtes d'animaux ont été éliminées par des "correcteurs" après que l'interdiction de représenter des figures ait fait son apparition.
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