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Les risques du prêt en devises pour les frontaliers

Publié le 12 février 2013 par David Talerman

J’ai récemment constaté un phénomène intéressant au sujet des prix de l’immobilier en Haute Savoie en zone frontalière franco-suisse : malgré une baisse de la demande, les prix ont tout de même continué à augmenter. Ce phénomène défiant les lois économique, j´ai essayé de comprendre pourquoi : et l’explication se trouve selon moi dans le mode de financement, les prêts en devises pour frontaliers.

Pour ceux qui ne le sauraient pas, les travailleurs frontaliers en Suisse (et de manière générale toutes les personnes qui bénéficient de revenus en francs suisses) ont la possibilité d’emprunter directement en francs suisses pour l’acquisition d’un bien immobilier en France : au moment de l’achat, le montant du bien en euros est alors converti en francs suisses et le prêt immobilier est établi sur cette base. L’emprunteur rembourse alors son prêt en francs suisses, dans la même devise que ses revenus. L’intérêt majeur pour les frontaliers réside dans le risque de change qui est maîtrisé tous les mois, car ce mode de financement permet d’avoir des mensualités qui ne varient pas en fonction de l’évolution du change (dans le cas d’un frontalier ayant des revenus en francs suisses et empruntant classiquement en euro, le montant effectif qu’il aurait à payer en euro serait fixé mais ses dépenses réelles variables à cause du taux de change). Les taux d’intérêts proposés par ce type de prêts sont en général très compétitifs.

Les problèmes des prêts en devises interviennent en cas de revente anticipée

Ce mode de financement, que je juge plutôt intéressant pose toutefois quelques problèmes, notamment à la revente, et particulièrement lorsque celle-ci intervient dans des délais courts : prenons le cas d’un frontalier ayant acheté un bien immobilier au prix de 200 000 euros. Supposons qu’à l’époque, le cours de change était à 1,5. Lors du montage du prêt, le montant est donc converti en francs suisses, soit 300 000 francs suisses. Supposons que cette même personne veuille revendre son bien aujourd’hui, estimé à 210 000 euros : le cours étant actuellement à 1,2 environ, la revente de son bien immobilier lui permettrait de rembourser 252 000 CHF ! Sa plus value éventuelle sur la revente du bien est donc très sérieusement amputée par les variations défavorables du taux de change. Ce phénomène vient s’ajouter à un contexte immobilier parfois morose, où les prix de certains biens sont revus à la baisse. Dans certains cas, il est même impossible de revendre le bien sans perdre de l’argent.
La conjonction de ces phénomène maintient les prix élevés, certains frontaliers souhaitant répercuter cette différence de taux de change dans le prix de vente. Aussi, dans certains cas, on arrive à des aberrations avec des prix allant jusqu’à  5000 ou 6000 euros du m² pour des biens tout à fait standards.
C’est également l’une des raisons pour lesquelles il y a peu de transactions immobilières en ce moment en zone franco-suisse : les vendeurs proposent des prix trop élevés à cause de l’effet taux de change dans un marché à la baisse, et les acheteurs qui bénéficient actuellement de taux plutôt bas ne sont pas particulièrement et pas forcément prêts à surpayer un bien.

Acheter un bien lorsqu’on est frontalier : le risque zéro n’existe pas

La situation de travailleur frontalier pose bien des problèmes dans l’optique de l’achat d’un bien immobilier, et il n’y a pas de situation idéale : soit vous souscrivez un prêt en francs suisses, et dans ce cas vous faites pesez le risque de change à la revente du bien, mais êtes tranquille tout au long de l’année avec des charges maîtrisées, soit vous souscrivez un prêt en euros et vous prenez le risque de voir tous les mois vos mensualités de prêt évoluer. Il n’y a pas de situation idéale, juste un risque à bien comprendre. Concernant la souscription d’un prêt en devises, les problèmes interviennent en cas de revente anticipée si toutefois vous vous trouvez dans le cas où le taux de change a évolué en votre défaveur (cas décrit plus haut) et particulièrement en cas de divorce ou de situation où vous n’êtes plus salarié en Suisse. Aussi, votre choix doit se faire selon votre visibilité professionnelle : si vous savez que vous travaillez en Suisse pour une période déterminée et inférieure à 5 ans, le prêt en devises n’est assurément pas une solution pour vous…

Enfin, en ce moment, il y a un double phénomène intéressant : les taux d’intérêt sont historiquement bas, et le taux de change EUR/CHF est à l’avantage de ceux qui empruntent en francs suisses des biens estimés en euros, avec, compte tenu du taux planché fixé par les autorités suisses, le risque de voir ce taux se dégrader très faible. La fenêtre risque cependant de ne pas durer éternellement…

Mes conseils pour estimer le prix d’un bien en zone frontalière : les notaires !

Pour évaluer la valeur réelle d’un bien, rien de mieux que les notaires, car le prix des biens à la vente n’est absolument pas significatif. Pour ma part, j’utilise l’application des notaires de France.

Et vous, quelle est votre expérience sur le sujet ?


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