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corruption

Publié le 13 février 2013 par Hoplite

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 « La corruption généralisée que l'on observe dans le système politico-économique contemporain n'est pas périphérique ou anecdotique, elle est devenue un trait structurel, systémique de la société où nous vivons. En vérité, nous touchons là un facteur fondamental, que les grands penseurs politiques du passé connaissaient et que les prétendus « philosophes politiques » d'aujourd'hui, mauvais sociologues et piètres théoriciens, ignorent splendidement : l'intime solidarité entre un régime social et le type anthropologique (ou l'éventail de tels types) nécessaire pour le faire fonctionner. Ces types anthropologiques, pour la plupart, le capitalisme les a hérités des périodes historiques antérieures : le juge incorruptible, le fonctionnaire wébérien, l'enseignant dévoué à sa tâche, l'ouvrier pour qui son travail, malgré tout, était une source de fierté. De tels personnages deviennent inconcevables dans la période contemporaine : on ne voit pas pourquoi ils seraient reproduits, qui les reproduirait, au nom de quoi ils fonctionneraient. Même le type anthropologique qui est une création propre du capitalisme, l'entrepreneur schumpétérien, combinant une inventivité technique, la capacité de réunir des capitaux, d'organiser une entreprise, d'explorer, de pénétrer, de créer des marchés, est en train de disparaître. Il est remplacé par des bureaucraties managériales et par des spéculateurs. Ici encore, tous les facteurs conspirent. Pourquoi s'escrimer pour faire produire et vendre, au moment où un coup réussi sur les taux de change à la bourse de New York ou d'ailleurs, peut vous rapporter en quelques minutes 500 millions de dollar ? Les sommes en jeu dans la spéculation de chaque semaine sont de l'ordre du PNB des Etats-Unis en un an. Il en résulte un « drainage » des éléments les plus entreprenants vers ce type d'activités qui sont tout à fait parasitaires du point de vue du système capitaliste lui-même. »

Cornélius Castoriadis, La montée de l'insignifiance, 1993.
"Lors d'une émission de France 2 (Des paroles et des actes du 12/04/2012), David Pujadas semble s'être beaucoup amusé à poser au sympathique Philippe Poutou cette question surprenante et particulièrement perverse (il faut dire qu'en tant que membre éminent du Siècle -le plus sélectif des clubs de rencontre de la classe dirigeante française-, ce journaliste ne doit guère entretenir d'illusions sur la nature réelle du système qu'il a choisi de servir): "J'ai bien lu votre programme. Je n'ai rien trouvé contre la société de consommation. Est-ce que l'une des grandes formes d'aliénation aujourd'hui, ça n'est pas la dictature des marques, le dernier écran plat absolument, le dernier Smartphone absolument? Y a pas un mot là-dessus! Est-ce que ce n'est pas aussi une forme d'aliénation?" Réponse du candidat de la nouvelle extrême gauche "anticapitaliste" à cette question cyniquement debordienne: "Ouais, ben enfin, à notre avis, ce n'est pas le premier problème." Il est vrai que, pour la plupart des extrêmes gauches "citoyennes" (reconnaissons que le NPA ne va pas encore jusque là), le "premier problème" est généralement celui du "mariage gay" ou, à défaut -chacun pourra choisir-, celui de la légalisation du cannabis, du vote des étrangers ou de l'interdiction des corridas."

JC Michéa, post-face à La culture de l'égoïsme, Christopher Lasch et Cornelius Castoriadis, 2012.

« Ce n'est que de nos jours, qu'il est possible de commencer à mesurer exactement les effets politiquement catastrophiques de la croyance au caractère conservateur de l'ordre économique et libéral. C'est ce postulat insensé qui, depuis trente ans n'a cessé de conduire mécaniquement la plupart des militants de gauche à tenir l'adoption a priori de n'importe quelle posture modernisatrice ou provocatrice -que ce soit sur un plan technologique, moral ou autre- pour un geste qui serait toujours et par définition , « révolutionnaire », et « anti-capitaliste » ; terrible confusion qui, il est vrai, a toujours eu l'incomparable avantage psychologique d'autoriser ceux qui s'y soumettaient, à vivre leur propre obéissance à l'ordre industriel et marchand comme une modalité exemplaire de la « rebel attitude ».

JC Michéa, Préface à La culture du narcissisme de Christopher Lasch.


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