La ferme des animaux
, sous l’aspect d’une fable animalière mettant en scène des bêtes dotées de parole et d’une capacité intellectuelle relative à leur espèce, est en réalité une analogie satirique de la révolution bolchévique, du régime stalinien et une dénonciation de toute société totalitaire. Possédant une valeur allégorique explicite, chaque animal de la ferme renvoie à un personnage historique réel, une classe du peuple ou un concept générique plus vaste. Par exemple, Sage l’Ancien, un cochon de treize ans est une caricature hilarante de l’idéal communiste de Karl Marx. En chantant « Bêtes d’Angleterre » au début du texte, il fait souffler un vent révolutionnaire dans la ferme et appelle à une prise de conscience de la domination des hommes : les « deux pattes », ce qui conduit éventuellement à un soulèvement des animaux contre l’oppresseur et l’instauration d’une nouvelle société animale. Celle-ci comporte sept règles fondamentales, notamment l’exclusion définitive des hommes, l’interdiction de consommer de l’alcool et l’égalité entre tous les animaux.
Toutefois cette égalité est mise à mal lorsque la société se hiérarchise – les cochons et les chiens se hissant au sommet. A l’exemple même du régime Stalinien, fondé par un idéal collectif mais basculant par la suite dans un idéal personnel et autocratique, Napoléon, un des cochons révolutionnaires détourne « L’Animalisme », l’idéologie de la ferme et la fait sombrer dans une dictature. Tous les animaux, sauf les cochons et les chiens, sont ainsi poussés à construire un moulin, symbole du développement et du redressement de la ferme mais tombent par la même dans un semi-esclavage. Les sept règles sont également altérées ou bafouées par les cochons. Ainsi, non seulement ceux-ci adoptent un style de vie propre à l’homme, en couchant dans leur lit et en buvant de l’alcool, mais pire : ils finissent par collaborer avec eux et violent donc l'une des lois sacrées de la ferme. (Allusion de la collaboration entre Staline et Hitler.) En dépit de tous les crimes commis par leurs supérieurs, les animaux de la ferme restent cependant stoïques, se confortant dans l’idée que « la faim, les épreuves et les déboires, telle [est] à l’en croire, la loi inaltérable de la vie. »
La ferme des animaux
est donc une vision du monde à la fois pessimiste et hilarant qui démontre les dangers derrière toute idéologie, aussi positive puisse-t-elle paraître au début. C’est un livre qu’on ne peut pas lire sans faire le parallèle historique avec le régime stalinien, mais également avec notre propre condition dans la société, notamment en ce qui concerne la notion de l’égalité entre tous. D’ailleurs, cette loi énoncée après le coup d’état des animaux se trouve altérée par la suite en : « Tous les animaux sont égaux, mais il y en a qui le sont plus que d’autres », démontrant que l’égalité entre les hommes est après tout –comme nous le savons tous – une notion tout-à-fait utopique.