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Maurice “Morry” Taylor jr versus Arnaud Montebourg : le PDG de Titan de plus en plus isolé dans son pays

Publié le 22 février 2013 par Letombe

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Pas vraiment étrange comme personnage ce président directeur général du groupe Titan, l’un des premiers groupes mondiaux de pneus et de roues. Ou plutôt assez en phase avec un stéréotype de patron paternaliste pour les siens et d’ours pour les autres - son surnom est d'ailleurs le Grizzli -.


Patriote nationaliste, mais qui n’hésite pas à menacer de produire en Chine
“ Grizzli “... Un petit nom qu’il a acquis en faisant de Titan un des premiers groupes mondiaux des pneus et des roues par rachat et restructuration d’entreprises en difficulté. Mais aussi en se lançant en politique sous l’étiquette républicaine.
C’était en 1996. Il prétendait batailler contre Bill Clinton. Après avoir dépensé 6,5 millions de dollars de ses deniers, il n’avait obtenu que 1 % des voix et avait dû laisser la place à Bob Dole.


Anti-fédéraliste, comme les tea-partys
Son programme, digne de son surnom, passait par le licenciement d’un tiers des fonctionnaires les mieux payés. Il soignait un profil d’entrepreneur protectionniste, affirmant à la fois son antifédéralisme et son patriotisme. Patriotisme qui l’a conduit dans une publicité diffusée en 2008 sur YouTube à inciter les Américains à acheter local.
Ce qui ne l’empêche pas aujourd’hui d’affirmer qu’il va produire en Chine, en payant des salariés moins d’un euro de l’heure, les pneus dont la France a besoin.
La Chine, Maurice Taylor la connaît bien puisqu’il paye des bataillons d’avocats de Washington pour poursuivre les compagnies de pneus chinoises à qui il reproche de recevoir des subventions.


Salaire modeste
Inversement, son attitude au sein de l’entreprise Titan n’est pas aussi pachydermique. Chacun de ses salariés a un plan d’intéressement.
Lui-même se verse un salaire modeste, selon The New Republic, un magazine de centre gauche. Et il professe que les PDG des groupes cotés ne doivent pas gagner plus de vingt fois ce que gagne leur salarié le plus modeste.


Le premier échange épistolaire entre Taylor et Montebourg
Mardi 19 février, Maurice Taylor pondait une lettre adressée à Arnaud Montebourg. Ce courrier, brutal, explique au ministre du Redressement productif les raisons pour lesquelles il n'est plus intéressé par la reprise de l'activité pneus agricoles du site Goodyear d'Amiens-Nord, un site qu'il convoitait jusqu'à l'an dernier.
«J'ai visité cette usine plusieurs fois. Les salariés français touchent des salaires élevés mais ne travaillent que trois heures. Ils ont une heure pour leurs pauses et leur déjeuner, discutent pendant trois heures et travaillent trois heures. Je l'ai dit en face aux syndicalistes français. Ils m'ont répondu que c'était comme ça en France», écrit le patron américain. «Nous croyez-vous assez stupides?» pour engager de nouveau une discussion, ajoute-t-il.
La réponse du ministre ne tarde pas. Arnaud Montebourg en appelle même à l'histoire et insiste sur les liens unissant les deux pays, invoquant La Fayette et le débarquement du 6 juin 1944. «La France est d'autant plus fière et heureuse d'accueillir les investissements américains que nos deux pays sont liés par une amitié ancienne et passionnée», clame-t-il.
Critiquant la stratégie de Taylor et son «intention d'exploiter la main-d'œuvre de certains pays pour inonder nos marchés», le ministre français conclut sa lettre par une menace à peine voilée: «En attendant, soyez assuré de pouvoir compter sur moi pour faire surveiller par les services compétents du gouvernement français avec un zèle redoublé vos pneus d'importation. Ils veilleront tout particulièrement au respect des normes applicables en matière sociale, environnementale et technique.»


La réponse de la réponse
La réponse du PDG a été immédiate: «L'extrémiste Monsieur le ministre, c'est votre gouvernement et son manque de connaissances sur la façon de bâtir une entreprise. A aucun moment, Titan n'a demandé de baisser les salaires. Nous avons juste dit que si on voulait être payé pour sept heures de travail, il fallait en travailler au moins six». «Pourquoi le chômage est-il si élevé en France, et particulièrement chez les jeunes? C'est à cause de la politique de votre gouvernement, Monsieur», assène encore Maurice Taylor.
Les syndicats ne sont pas épargnés par la verve acide de l'homme d'affaires américain: «Votre lettre n'a jamais mentionné pourquoi le gouvernement français n'était pas intervenu pour sauver l'activité agricole de Goodyear. Votre gouvernement a laissé les barjots du syndicat communiste détruire les emplois les mieux rémunérés», lance le PDG.


Sauf que... Taylor est de plus en plus isolé dans son propre pays
Mais l'homme d'affaires semble de plus en plus isolé dans sa critique acerbe du système français. Même Washington est sortie de sa réserve pour tenter de calmer le jeu. Le département d'Etat américain avait ainsi pris position en qualifiant de «réussite» les relations commerciales franco-américaines. «Cela ressemble à une affaire privée et pas à une question entre deux gouvernements. Mais vous connaissez notre relation avec la France, notre plus vieille alliée, nos liens larges et profonds, notamment avec beaucoup d'entreprises américaines qui réussissent en France et beaucoup d'entreprises françaises qui réussissent aux Etats-Unis», a déclaré hier la porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland.
Une lettre adressée à l'attention du président américain Barack Obama dans laquelle il lui donne un certain nombre de conseils : "fermez le département de l'éducation, on ferait 35 milliards de dollars d'économies", ou encore : "Réduire les fonctionnaires d'Etat, on n'a pas besoin d'ambassadeurs. C'est du gaspillage".

Ingénieur de formation, passé chez General Motors, Taylor n'a pas peur de se mettre en scène pour défendre son entreprise. Ironie de l'histoire, comme Arnaud Montebourg, ce dernier est un fervent défenseur du patriotisme économique. "Mettre un pneu Michelin à votre tracteur, c'est comme mettre un béret sur un cow-boy (...) " choisir un pneu Firestone [groupe japonais], c'est comme si un agriculteur s'habillait avec un kimono", expliquait-il dans cette publicité.
Pas vraiment étrange comme personnage ce président directeur général du groupe Titan, l’un des premiers groupes mondiaux de pneus et de roues. Ou plutôt assez en phase avec un stéréotype de patron paternaliste pour les siens et d’ours pour les autres - son surnom est d'ailleurs le Grizzli .

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