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La défaite de Mario Monti est-elle prémonitoire ?

Publié le 26 février 2013 par Juan
La défaite de Mario Monti est-elle prémonitoire ? Jusqu'au bout, les différents camps se sont disputés la victoire législative en Italie. Mais il y a une certitude.
Mario Monti, le président du Conseil sortant, est gravement défait.
L'homme, présenté comme le technocrate qui allait sauver l'Italie de son marasme quand il succéda à l'exécrable Silvio Berlusconi en 2011, a lamentablement échoué à convaincre l'électorat italien. Moins de deux années d'austère gestion pour redresser les comptes publics et la cote de crédibilité du pays plus tard, Mario Monti va quitter le pouvoir.
1. Le message démocratique est clair et sans ombrage. La liste de Monti est bon quatrième, aux alentours des 10% des suffrages. L'austérité est impopulaire. Qui en douterait ? Qui peut penser qu'un tel programme puisse fédérer une majorité des suffrages dans les urnes ? Rappelons que la potion Monti n'avait rien d'agréable, même si une fraction du bilan était imputable à son prédécesseur: 80 milliards d'euros de coupes depuis l'été 2011, une petite réforme du travail (suppression des contrats précaires mais assouplissement des procédures de licenciement), une autre pour les retraites (allongement de la durée des cotisations, recul de l’âge de départ en retraite, à 70 ans en 2015), pour déboucher sur une récession en 2012 et en 2013 (-2,3% du PIB prévus). Pire, elle n'a pas produit de résultats positifs perceptibles. Certes l'Italie se finance moins cher que l'Espagne (quelle performance!), mais la dette est encore phénoménale (2.000 milliards d'euros). Et Monti n'a enclenché aucune réforme bancaire.
2. Marion Monti était aussi l'homme de l'élite européenne, le favori de nos éditocrates néo-libéraux, un rêve technique contre l'ambition démocratique. Il est arrivé au pouvoir parce que le clown populiste adepte de Bounga-Bounga nocturnes avec des demoiselles parfois mineures avait dépassé les bornes de l'inefficacité. L'Italie n'inspirait plus confiance pour financer sa dette. Monti est arrivé au pouvoir sans légitimité démocratique, propulsé à la tête du gouvernement sans élection, mais avec le seul assentiment des forces politiques en présence. Monti, ex-associé de Goldman Sachs, avait le soutien de la Banque Centrale Européenne (BCE), le fonds monétaire international (FMI) et la Commission européenne.
3. En novembre 2011, Silvio Berlusconi est tombé sous la pression des marchés financiers, d'une perte de confiance politique et d'une fragilité institutionnelle. On aurait tort de croire que le scenario qui se déroule sous nos yeux est une mauvaise nouvelle pour les créanciers du pays et leurs porte-parole. C'est un paysage éclaté qui sort des urnes, plus éclaté encore qu'en Grèce en juin dernier. La gauche tient péniblement la Chambre des députés, mais la droite berlusconienne conserve le Sénat. Lundi, il était curieux d'observer le comportement spéculatif des marchés pendant la journée de lundi. Quand les premiers décomptes donnaient la gauche vainqueur dans les deux chambres, les indices de la Bourse de Milan montaient, pour mieux reculer dès la publication d'informations contradictoires sur le Sénat - où la coalition berlusconienne était alors donnée en tête avec un gros tiers des suffrages. L'anxiété était manifeste. Une fois passée cette phase d'incertitude, la messe sera dite. Faute de majorité, le pays sera dans les mêmes mains qu'avant - celles de ses créanciers.
4. D'aucuns trouveront dans cet échec la preuve que l'austérité a été rejetée, au moins en Italie. Soit. Mais faut-il se réjouir qu'un autre clown -  l'ex-comique Beppe Grillo et son Mouvement cinq étoiles (M5S) - soit parvenu à créer la surprise ? On le créditait, lundi en fin de journée, d'environ 20% des votes à la Chambre haute du Parlement. Faut-il se réjouir que l'alternance prenne peut-être la forme d'un retour aux affaires gouvernementales d'il Cavaliere ? Ce résultat doit être considéré comme désespérant, même pour celles et ceux qui croient à une autre voie que l'austérité budgétaire.
5. Le vote italien comporte certainement quelques messages utiles pour la France. Le premier est politique. Le gouvernement sortant a été pulvérisé par trois assauts simultanés - sur sa gauche, sur sa droite, et par le M5S de Grillon. En France aussi, l'actuelle majorité est potentiellement exposée à trois menaces - gauche, droite et extrême-droite. Deuxièmement, le redressement des comptes publics est une ambition terne, douloureuse, insupportable si une autre trajectoire politique plus aspirante n'est pas communiquée, défendue, expliquée. Il assure même la mort politique rapide si aucun résultat positif n'est rapidement tangible - une contradiction avec ce que le temps politique réclame parfois. Avec Monti, l'Italie a ramené son déficit budgétaire sous le seuil fatidique des 3% du PIB. Ce dernier partait de moins haut - 3,9% en 2011, dernière année berlusconienne. Mais l'Italie en récession reste surendettée à 127% de son PIB !
Pour la France, voici toute l'ambiguïté du message italien: il n'y a nulle majorité de rupture (à gauche), mais une urgence pour le gouvernement Hollande à tracer autre chose qu'une simple perspective de rigueur.


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