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Hollande chez son ennemi Poutine

Publié le 04 mars 2013 par Juan
Hollande chez son ennemi Poutine Quand il faisait campagne, le candidat fustigeait violemment cette propension diplomatique française à soutenir le boucher Poutine. Car Vladimir Poutine, déjà, avait tout du boucher.
En Russie, l'autocrate se jouait de la démocratie en alternant présidence et gouvernement. Ses opposants se retrouvaient avec une balle dans la tête ou un séjour prolongé au Goulag. En Tchétchénie, Poutine avait su déployer tous ses talents contre les rebelles. La terreur y est d'Etat. Bref, devant ces/ses exactions que d'aucuns devraient condamner, la France semblait sourde, aveugle et muette.
Quand il faisait campagne, le candidat critiquait son prédécesseur qui « serrait la pogne de Poutine ». Quand il fut élu président, il ne fallut pas plus de quelques jours pour que le revirement soit complet. Vladimir Poutine était devenu son meilleur ami, au moins pour les photographes. Lors de son premier G-20, il trinqua beaucoup, se fit photographié souvent, multiplia les accolades et embrassades. Ces effusions affectives dépassaient la courtoisie diplomatique.
Une année plus tard, il retrouvait son meilleur ami à Pékin, pour lui présenter son fils Louis. Nicolas Sarkozy était encore et trop souriant. La crise en Géorgie, quand son ami Vladimir décida d'envahir et de démembrer son trublion de voisin, n'eut aucune conséquence sur les relations amicales des deux monarques. Le président français se désespérait de convaincre son ami de commandes quelques navires militaires français. Il fallait sauver les chantiers navals de Saint-Nazaire, au moins en affichage. A trois reprises en moins d'un an, Sarkozy vendit la même pauvre commande de bateaux Mistral. Cela ne changea pas grand chose. De droits de l'homme, il n'en était pas question.
Nicolas Sarkozy surjouait-il l'affection ? En novembre dernier, enfin débarrassé de cette charge présidentielle, il est retourné en Russie. Il a retrouvé Poutine « avec joie », nous rappelle-t-on dans les colonnes du Figaro. Une «rencontre privée et de courtoisie», où notre ancien monarque a rappelé sa flamme.
«J'ai un très bon souvenir du travail que nous avons réalisé ensemble».
 François Hollande à l'Elysée pratique différemment. Evidemment, la France n'a pas déclaré la guerre à la Russie. Candidat, Hollande n'avait promis ni boycott ni embrassade, juste des relations à hauteur d'Etat, sans effluve ni effusions personnelles.
Commercer avec un sale type nécessite distance et diplomatie.
En juin dernier, la première rencontre est sinistre. Neuf mois plus tard, l'atmosphère est à peine réchauffée. Hollande n'a pas atterri à Moscou que quelques journalistes français font mine de s'indigner de son renoncement à évoquer la question des droits de l'Homme. Libération surjoue l'effarouchée avant même que le déplacement n'ait eu lieu. Triste posture de gauche impeccable pour un quotidien qui peine à trouver la juste distance avec le pouvoir en place. La première entrevue du président français à Moscou fut pour une radio d'opposition.

Car cette visite en Russie fut tout simplement et tristement normale. Hollande s'est déplacé en vain. Les observateurs durent reconnaître que la distance était toujours là. Poutine et Hollande ne s'apprécient pas et c'est tant mieux. Un expert s'indigne, dans les colonnes de l'Express, qu'Hollande se déplace en Russie pour  étaler son désaccord avec Poutine. L'autocrate russe n'a rien lâché sur la Russie. Faudrait-il en vouloir à Hollande pour cela ? Non.
Lors de la conférence de presse commune, les deux hommes ont affiché leurs désaccords sur la Syrie, dont nous fêterons le 3ème anniversaire de guerre civile le 15 mars prochain. « Nous souhaitons le dialogue politique ». Mais  « il y a la question de la manière d'y parvenir à travers le dialogue politique. (...° D'autres pensent que c'est le représentant qui peut permettre d'engager le dialogue. Si nous continuons sur ces positions-là, nous ne parviendrons à aucune convergenceSur les droits de l'homme - après une année 2012 notamment marquée par la triste réélection truquée de Vladimir Poutine et l'enfermement des Pussy Riots, Hollande a déclaré ceci, une formule malheureusement tronquée dans le compte-rendu de l'envoyé spécial du Monde à Moscou Piotr Smolar
« Je n'ai pas à juger, je n'ai pas à évaluer, j'ai simplement à constater. Et lorsqu'il y a des manquements, je le fais. Et je le fais pour qu'ils soient réglés, et non pas pour qu'ils soient simplement brandis.»
En Russie, Hollande cherchait moins à signer des contrats commerciaux qu'à améliorer les relations économiques. Un protocole de coopération entre des banques publiques françaises et russes a été signé. Un assouplissement des visas pour les Russes venant en France a été promis. D'autres contrats ont été conclus (création d'un centre de recherche sur les trains à grande vitesse, renforcement de la coopération spatiale, création d'une société commune dans la production d'hydrocarbures).

« Vous avez raison, la première impression est toujours la bonne » a confirmé Hollande à un journaliste quand on lui demandait ce qu'il pensait de Poutine après cette deuxième rencontre.
Oui.
La première impression est toujours la bonne.


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