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Contre-attaque québécoise

Publié le 11 mars 2013 par Toulouseweb
Contre-attaque québécoiseBombardier cherche ŕ s’attaquer directement au MAX et au NEO.
C’est en quelque sorte l‘histoire de l’œuf de Colomb adaptée ŕ la sauce québécoise : avec un maximum de 149 places, le C.Series de Bombardier apparaissait un peu trop petit pour pouvoir attaquer de front les Airbus A320 et Boeing 737-800 qui détiennent actuellement cette clef de voűte qu’est le marché des court/moyen-courriers ŕ160 places. Aprčs műre réflexion et, ŕ n’en pas douter, quelques échecs commerciaux, l’avionneur québécois vient d’annoncer que son avion pourra ętre aménagé avec 162 sičges. C’est évidemment beaucoup mieux, pour des raisons tout ŕ la fois commerciales …et psychologiques.
Reste le fait que la méthode utilisée suscite l’étonnement, voire la perplexité. Les rangées de sičges seront tout simplement resserrées, de maničre qui se veut réaliste, dit-on ŕ Montréal, dans la mesure oů le nouveau biréacteur sera doté de fauteuils caractérisés par des dossiers trčs minces. Il n’en faudra pas moins allonger le fuselage de 66 centimčtres pour permettre la création d’issues de secours supplémentaires, une de chaque côté du fuselage, pour permettre ŕ l’appareil de rester en conformité avec les réglementations de sécurité.
Cette initiative n’est en aucun cas anecdotique. Elle confirme implicitement que le C.Series a été créé Ťun peu justeť, ce que les acheteurs potentiels n’ont sans doute pas manqué de faire savoir ŕ leurs interlocuteurs québécois. Mais cela ne suffira sans doute pas ŕ construire un bel avenir au C.Series et ŕ mettre ŕ mal le duopole Airbus-Boeing. Pourquoi, en effet, de grandes compagnies aériennes renonceraient-elles ŕ acheter davantage d’A320 ou de 737 si le nouveau venu n’affiche pas des atouts économiques incontournables. Or ils le sont moins depuis le lancement du NEO européen et du MAX américain, dotés de moteurs de nouvelle génération de CFMI ou Pratt & Whitney.
Du coup, la question posée depuis le jour de l’annonce du C.Series est plus que jamais d’actualité : une aérienne compagnie peut-elle justifier l’utilisation d’un type d’avion nouveau proposé par un constructeur qui n’était pas précédemment dans la course ? La réponse ne peut ętre affirmative que dans l’hypothčse oů il s’agirait d’un exploitant de lignes régionales. Sans quoi la tentation resterait grande de continuer ŕ tirer parti d’un effet de gamme, ŕ savoir les versions complémentaires, de 150 ŕ 220 places, d’une męme cellule de base. Il n’y a lŕ rien de nouveau, si ce n’est que Bombardier reste confronté ŕ un défi exceptionnel et empreint de grands risques.
Mike Arcamone, directeur de la division avions commerciaux de Bombardier, estime que C.Series affiche des coűts directs d’exploitation inférieurs de 8% ŕ ceux de ses concurrents. Mais est-ce suffisant ? L’écart était évidemment beaucoup plus grand avant l’apparition des A320 et 737 remotorisés, lesquels ne constituent en aucun cas une surprise. Dčs l’instant oů des propulseurs nouveaux sont mis sur le marché, tous les avionneurs s’y intéressent. Le męme cheminement de pensée s’est d’ailleurs produit au męme moment en Chine (Comac 919) et en Russie (Irkut MS-21).
Le verdict est désormais proche : le C.Series entamera ses essais en vol dans trois ou quatre mois et les premičres livraisons interviendront ŕ la mi-2014. Devenu une tangible réalité, il devrait alors confirmer une percée sur le marché qui, jusqu’ŕ présent, est restée timide et en-deçŕ des prévisions. Non pas que 180 commandes signées par quatorze clients constituent un mauvais résultat mais plutôt parce que les acheteurs dits de référence font défaut, Lufthansa mise ŕ part.
Airbus et Boeing se gardent bien d’évoquer cette nouvelle concurrence qui constitue, pour l’instant, une menace d’importance trčs relative. Tout comme les C919 et MS-21 dont les responsables auront les pires difficultés ŕ construire une crédibilité commerciale et ŕ installer un support aprčs-vente sans reproche et vraiment international. Aussi peut-on affirmer que treize sičges supplémentaires ne suffiront pas ŕ assurer le succčs du C.Series, lequel constitue un investissement d’environ trois milliards et demi de dollars. Sauf ŕ convaincre quelques ténors (on pense notamment ŕ AirAsia) prčs ŕ innover si des conditions attrayantes leur sont soumises. Wait and see.
Pierre Sparaco - AeroMorning

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