Le Client, Augustin Mirales, infiltre le milieu de la prostitution pour retrouver la femme dont il est tombé amoureux…
Scénario de Zidrou, dessin de Man Public conseillé : Adultes et adolescents
Style : Polar Paru chez Dargaud, le 1er mars 2013 Share
L’histoire
Banlieue de Barcelone, intèrieur nuit. Augustin Mirales, petit homme à l’air fragile passe la porte du bordel « Paraiso » : un paradis artificiel, où les anges déchus « ne disent jamais non »…
Pleine lumière, au luxueux ‘Las Vegas Club ». Tandis que des danseuses nues se dandinent lascivement en arrière plan, Augustin est venu voir le patron du lieu : un certain Selznic, parrain et proxénète. Après lui avoir annoncé, preuve à l’appui, qu’il vient d’enlever sa fille, Serena, il exige en échange de sa libération que Selznic retrouve une jeune Équatorienne dont il est amoureux. Selznic ne se démonte pas et lui promet qu’il n’aurait pas du se frotter à si gros poison. Malgré les menaces, Mirales lui donne 24 heures…
Zidrou toujours
Revoilà Zidrou dans un nouveau « One shot » au thème sulfureux (la prostitution). Après nous avoir amusé avec « Lydie », troublé avec « Folies Bergères » ou « La Peau de l’Ours » et ému aux larmes avec « Le beau Voyage« , ce scénariste à l’approche si « adulte » et « différent » nous attend au tournant.
Seul bémol à ce beau récit mêlant enquête et histoire d’amour : Zidrou utilise une trame classique de Polar noir, au dénouement assez prévisible. Mais là n’est pas l’intérêt du Client. Une fois de plus centré sur l’humain, il développe un récit qui fait la part belle à ses personnages. Dans l’ambiance glaciale et poisseuse des bordels, il cisèle des dialogues crus et contemporains, ou surnage l’humour comme dernière bouée de sauvetage.
Un scénario et des personnages
Dans un scénario de Zidrou, tout d’abord, il y a la narration. Dans « Le client », il multiplie les aller/retour dans le temps (Flash-Back et Flash-Forward), dévoilant bout par bout son intrigue comme dans un film bien construit. Son récit en voix off qui évoque les lettres du personnage principal donne humanité et chaleur à ce monde qui manque cruellement d’émotions.
Et puis, comme toujours, Zidrou vous attrape par la main avec ses personnages forts et faibles en même temps. Augustin Mirales est de ces héros « Zidrouen » type. Petit homme simple, admirateur de la beauté et totalement inadapté dans une lutte contre la mafia, il est profondément touchant et humain, armé de son seul culot. Son amour sans limite pour Maria-Auxiliadora le transcende et lui fait dépasser les limites de la loi et de la moralité.
Côté dessin
Guidé par un Zidrou inspiré, Man dessine dans un style « noir » attendu. Alternant scènes de nuit glaciales et pleines lumières aveuglantes, il enchaîne un découpage classique et ultra lisible. De temps en temps, des accidents graphiques (cases panoramiques sans paroles, cadrage de biais) dynamisent l’ensemble. Tout en harmonie avec Zidrou, sa mise en image évite le voyeurisme et la vulgarité.
Un peu de philosophie ?
Avec Le Client, comme dans chacun de ces albums « adultes », Zidrou s’interroge sur la condition humaine. Quel est le pouvoir de l’amour ? Jusqu’où irions-nous pour libérer un être aimé ? Par un simple transfert, il nous fait douter de nos propres limites.
Enfin, il s’interroge sur la beauté. Que son personnage principal soit un esthète n’est pas anodin. Comme lui, on s’interroge sur la notion de beauté. Est-elle dans ces corps féminins magnifiques qui se livrent pour de l’argent, ou dans ces statues de marbres inhumaines ?
Pour résumer
Avec Le Client, Zidrou nous surprend une nouvelle fois. Il dévoile avec sensibilité le milieu de la prostitution, en s’intéressant aux femmes qui subissent cet avilissement.
Mais Le Client n’est pas une histoire triste. C’est un polar qui clame la force de l’amour et de la tolérance. Vous aussi, laissez-vous embarquer dans cette histoire bouleversante ou l’émotion est plus forte que cet enfer sur terre.
Cette critique fait partie de l’opération « la BD du mercredi » de Mango