Jean d’Ormesson, La Conversation, Théâtre Hébertot, 2 octobre 2012 – 30 avril 2013
« La Conversation », c’est la première pièce de Jean d’Ormesson, actuellement en prolongation jusqu’au 30 avril 2013, au Théâtre Hébertot, dans laquelle deux grands comédiens s’affrontent sur scène. Maxime d’Aboville, jeune comédien déjà nominé, qui campe un Bonaparte aux gestes trempés de résolution, face à un Cambacérès (Alain Pochet) à l’écoute subtile et admirative, pour ainsi dire conquise.
Jean d’Ormesson prend ainsi le parti de raconter l’instant où Bonaparte, adulé par les Français qu’il a tirés de l’abîme, décide de devenir empereur. Un soir de l’hiver 1803-1804, aux Tuileries. Une conversation imaginaire entre Bonaparte et son deuxième consul, Jean-Jacques Régis de Cambacérès, celui à qui il ne cache rien et demande tout. Au comble de la tension entre l’esprit révolutionnaire et l’avidité de puissance, le vainqueur d’Arcole tente de rallier son complice à ses convictions. Une seule volonté anime le héros républicain : bâtir sa légende de son vivant. L’empire, va-t-il démontrer avec éloquence, c’est la république qui monte sur le trône.
Les deux comédiens font résonner sur le plateau le souffle de cette épopée politique, délivrant une adaptation résolument inscrite dans la tradition du théâtre de verbe. A l’instar d’un Sacha Guitry, l’art du jeu théâtral se présente, ici, comme un art du plaidoyer servant les points de vues des personnages, et Jean d’Ormesson accomplit avec talent ses premiers pas d’auteur dramatique, dans la veine du « Souper » de Jean-Claude Brisville, sans se perdre dans le documentaire éducatif. Portée par une excellente interprétation, ainsi que par la mise en scène de Jean-Laurent Silvi, classique et élégante, cette pièce est captivante.
J. D.
Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit, Théâtre de L’Oeuvre, 6 décembre 2012 – 24 mars 2013
Nicolas Massadau adapte pour la scène le chef d’œuvre dérangeant de la littérature française publié en 1932. Il retrace les temps forts du périple de Bardamu, de son engagement en 1914 à l’exercice de son métier de médecin dans un dispensaire de banlieue en passant par la découverte de New-York et son séjour en Afrique.
Dans les pas de Fabrice Luchini, seul en scène, Jean-François Balmer interprète le personnage de Bardamu en lui prêtant sa gouaille et sa générosité et nous entraîne à la rencontre des multiples personnages du roman. Dans cette adaptation inspirée du chef-d’œuvre de Céline, Jean-François Balmer réussit une composition prodigieuse sur la scène du Théâtre de l’Œuvre, à Paris. Il se moule dans ce personnage prisonnier de sa peur, enchaîne les péripéties, voix cassée, regard halluciné. Durant 1 h 35, ce comédien prodigieux épouse le rythme, la musicalité, et la vitesse du verbe célinien. A découvrir…
J. D.