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Un simulacre de réconciliation

Publié le 11 avril 2008 par Muzard

5f732964066f11ddb132aaff7c4f1de0_2 Chez les chimpanzés, après un conflit, les protagonistes ont  en général à cœur de se réconcilier. C’est un moyen d’assurer la paix et par conséquent la pérennité de la tribu. En effet quand les conflits sont trop fréquents au sein des dominants, la troupe est plus vulnérable par rapport aux prédateurs et aux autres communautés de singes rivales.

Plusieurs techniques de réconciliation sont possibles selon le degré de proximité des rivaux.

S’ils sont très proches, ils pratiquent la réconciliation explicite qui consiste à mettre en scène de manière visible voire spectaculaire l’amitié qui les unit.  Chez les chimpanzés, les ex rivaux, s’embrassent, multiplient les accolades et les séances de Grooming
Les Bonobos, quant à eux, sont des adeptes de la copulation pour se réconcilier et c’est encore plus efficace, c’est d’ailleurs l’espèce de singes de loin la plus pacifique.

Quand les protagonistes ne sont pas des amis, ils se réconcilient de manière implicite. Ils se contentent de reprendre leur relation là où ils l’avaient laissée avant le conflit. Ils sont capables de recourir à des stratagèmes afin de trouver un prétexte pour reprendre contact au sens propre et physique du terme (se toucher à nouveau).  Ainsi le primatologue F De Waal  a surpris un chimpanzé feindre de découvrir une mouche sur l’épaule de son rival pour pouvoir toucher à nouveau son collègue de la main, sous prétexte de le débarrasser de l’intruse ! 

Après le conflit largement médiatisé qui a opposé Nathalie Kosciusko-Morizet à Jean-Louis Borloo et Jean-François Copé, on pouvait s’attendre à une réconciliation  au moins aussi médiatique. C’est le prix à payer pour que la tribu « Sarkozy » projette une image de cohésion.

Que nenni, nous avons été privés du spectacle des retrouvailles !

Visiblement les protagonistes ont pratiqué la réconciliation implicite (pas d’accolade, d’embrassades…) confirmant ainsi que le lien qui lie la Secrétaire d’Etat à ses collègues est plutôt « faible ». Ils ne sont pas proches, c’est clair.
La présumée coupable s’est fendue d’un communiqué d’excuses sous la pression du grand Chef, F Fillon. Tandis-que  les offensés ont tout juste accusé réception de ses excuses mais sans lui exprimer directement leur pardon. Ils ont préféré déléguer leur pardon au Premier Ministre.

En effet, c’est François Fillon, qui  s’est exprimé au nom des offensés : « l’affaire est close ». 
Il n’est pas rare, chez les singes, que le  chef  intervienne comme  go-between afin de faciliter la réconciliation. Mais même dans ce cas, les protagonistes finissent toujours par communiquer directement, se « parler » et se toucher et surtout se regarder. Car quand on parvient à nouveau à se regarder en face, sans s’agresser, cela signifie que l’affaire est vraiment close.

Dans le cas présent, Nathalie Kosciusko-Morizet comme ses rivaux ont préféré éviter tout contact et ont veillé à ne pas croiser leur regard. Pour éviter de croiser le fer ?
C’est vrai que les humains ont inventé, l’écrit, qui leur permet de communiquer à distance, c’est bien pratique certes, mais on s’éloigne alors du rituel primate de réconciliation.

S’excuser ou pardonner par voie d’un communiqué de presse ou d’une interview radio, n’est certainement pas aussi efficace, qu’une brève étreinte des protagonistes et même qu’un échange de mots sympathiques (grooming oral).

Dans la foulée, la présumée coupable a été sanctionnée, privée de sortie en compagnie du Premier Ministre au Japon. Visiblement F Fillon redoutait que JL Borloo et la Secrétaire d’Etat se retrouvent à nouveau face à face pendant le voyage.
En langage primate, cela veut dire que la situation n’est pas redevenue normale puisque la protagoniste est en quarantaine et n’est plus autorisée à s’afficher aux côtés du chef.
On a donc assisté à une réconciliation de dupes, chez les singes, ce type de réconciliation n’aurait aucune valeur, elle signifierait que les protagonistes sont toujours fâchés. 

C’est dommage, ce voyage aurait peu être l’occasion de mettre en scène la réconciliation, avec la diffusion des images des protagonistes, côte à côte dans l’avion. Alors que là, la sanction à elle seule, discrédite le discours de réconciliation et de pardon tenu par F Fillon et au lieu de clore l’incident, elle continue à alimenter la rumeur de mésentente profonde.

De ce point de vue, le conflit entre Rachida Dati et JL Borloo et oui toujours lui a été mieux géré.
Après avoir reproché, publiquement, à JL Borloo ses ronflements et ses odeurs de pied une réflexion digne d’une cour de récréation, Rachida Dati, a présenté très rapidement ses excuses, sans que le chef de l’état n’ait besoin d’intervenir. Elle s’est excusée avec des mots à elles, à priori plutôt sincères.  JL Borloo ne s’est pas limité à accepter ses excuses, il a présenté les siennes, pour l’avoir privé d’un bon sommeil et s’est même fendu d’un joli bouquet.

Ainsi, le rituel de réconciliation primates a été tout à fait respecté, et dans l’esprit de l’opinion, au moins, le différent entre les deux protagonistes est clos.


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