(photo: Reuters) Il ne fait pas bon être imberbe au Moyen Orient. En Turquie la moustache a toujours été une affaire très sérieuse. Un dicton populaire y affirme qu'un «homme sans moustache est comme une maison sans balcon». L'anthropoloque Benoît Fliche de l'Institut français d'études anatoliennes d'Istanbul donne même un sens à la forme qu'elle prend :
«Broussailleuse, façon Staline, elle est plutôt l'apanage de la gauche ou des Kurdes. Mince, comme celle du Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, elle devient religieuse et conservatrice (...) Et si elle descend en forme de crocs de part et d'autre de la bouche, elle est alors marquée à l'extrême droite».En Turquie, comme dans d'autres pays arables, la virilité se mesure (entre autres) au nombre de poils qui ornent votre lèvre supérieure. L'absence de pilosité faciale peut provoquer des difficultés sociales. En turc il ya même un mot pour désigner la calvitie du visage : "Köse" et ce n'est vraiment pas considéré comme un atout, au contraire. Aussi de nombreux hommes n'hésitent pas et se font faire un implant de moustache pour combler ce manque.
Rien qu'à Istanbul, quelque 250 cliniques ou cabinets privés se livrent une concurrence acharnée pour vendre leurs services, à grands coups de promotions. La plupart se sont associés à des agences de voyage et proposent des formules qui incluent l'opération et le séjour à l'hôtel de leurs patients, qu'elles prennent en charge dès l'aéroport... Les plus compétitifs proposent des forfaits «moustaches» très avantageux, à partir de 2 000 euros, bien moins chers que chez leurs concurrents européens ou américains. Même chose en France. Pierre Bouhanna, un chirurgien parisien qui, sur les cinq dernières années, a réalisé un nombre sans cesse croissant d'implants pileux au profit d'une patientièle en provenance des Emirats Arabes Unis, d'Iran, du Liban et de Turquie. "Ils sont de plus en plus à vouloir affirmer leur masculinité", analyse-t-il. "Cela passe par une imposante moustache". Âgés entre 30 et 50 ans, les patients viennent avec des modèles précis, inspirés des chanteurs ou des acteurs locaux. Et certains hommes politiques de la région poussent les portes du cabinet avec comme unique dessein la séduction des masses électorales.Mais la moustache qui tombe pile poil a un coût : en moyenne 5.500 euros pour sortir avec le modèle convoité.
Source (The guardian, 7sur7)