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Épargne des Belges, chronique d'un pillage annoncé

Publié le 19 mars 2013 par Copeau @Contrepoints

La vaste opé­ra­tion de spo­lia­tion des épar­gnants déclen­chée à Chypre serait-elle le pré­lude à un pillage en règle des comptes d’épargne belges ? Plu­sieurs indices plaident en ce sens…

Par Frédéric Wauters, depuis Bruxelles, Belgique.

Épargne des Belges, chronique d'un pillage annoncéTout com­mence donc ce ven­dredi 15 mars par un accord entre les auto­ri­tés chy­priotes et l’Union euro­péenne. En contre­par­tie d’un prêt de 10 mil­liards d’euros, le gou­ver­ne­ment de l’île accepte de taxer les comptes ban­caires de tous ses rési­dents : 6,75% pour les avoirs infé­rieurs à 100.000 euros, 9% au-delà. Plus qu’une taxa­tion, il s’agit d’une réelle spo­lia­tion : une par­tie du fruit de la pru­dence des épar­gnants — qui contraste avec celle des ban­quiers et des gou­ver­ne­ments — est tout bon­ne­ment confis­qué pour ren­flouer les caisses de l’État.

L’épargnant belge bien­tôt délesté ?

Mais le mal­heur des Chy­priotes risque fort d’être conta­gieux. Rien n’empêche en théo­rie un gou­ver­ne­ment euro­péen de lever une taxe simi­laire. En Bel­gique, où le gou­ver­ne­ment cherche tou­jours 2,5 mil­liards d’euros pour bou­cler son bud­get, la ques­tion n’a plus rien de théo­rique. Puisque nos ministre ne semblent nul­le­ment déci­dés à prendre les mesures struc­tu­relles qui s’imposent pour sor­tir le pays du marasme, que la vente de l’argenterie de famille a déjà eu lieu au cours de la décen­nie écou­lée et qu’il n’est plus ques­tion de recou­rir à l’emprunt, la conclu­sion s’impose d’elle-même : une bonne petite hausse des impôts. Et pour­quoi pas par le biais d’un pré­lè­ve­ment sur les comptes d’épargne ? Plu­sieurs indices plaident en ce sens…

Indice 1 : l’épargne décriée par nos édiles

Pour com­men­cer, il y a cette charge menée sur l’épargne il y a quelques mois. Relayés par les poli­ti­ciens, quelques écono­mistes relancent le vieux refrain key­né­sien : l’épargne c’est mal. Ces Belges pré­voyants qui mettent de côté pour être certains de tenir le coup en cas de pro­blème font du mal à l’économie, nous serine-t-on alors. Et cha­cun d’aller de son petit cou­plet pour pro­po­ser de "drai­ner l’épargne des belges vers l’économie réelle". Notons au pas­sage que désor­mais, le livret d’épargne est placé dans le même sac mal­odo­rant que la spé­cu­la­tion finan­cière : ce n’est pas de l’économie réelle.

Indice 2 : les comptes d’épargne des Belges sont "ven­dus" comme garan­tie de la dette belge

Un deuxième indice encore plus inquié­tant : les argu­ments com­mer­ciaux avan­cés dans une bro­chure de  l’Agence Fédé­rale de la Dette Publique. Pour convaincre les inves­tis­seurs d’acheter des obli­ga­tions belges, cet orga­nisme inféodé au gou­ver­ne­ment n’y va pas par quatre che­mins. Voici ce qu’on peut lire en page 10 :

Théo­ri­que­ment, les ménages belges pour­raient rem­bour­ser la dette publique.

En clair : ache­tez nos bons d’État, de toute manière si on a des dif­fi­cul­tés à les rem­bour­ser on taxera nos citoyens, qui, eux, ont les sous. De quoi avoir froid dans le dos, non ?

Épargne des Belges, chronique d'un pillage annoncé

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Indice 3 : un futur "cadastre des livrets d’épargne"

Encore plus trou­blant : ce lundi, entre la poire et le fro­mage, alors que les jour­na­listes s’éveillent enfin à l’énormité du crime per­pé­tré à Chypre ce wee­kend, le gou­ver­ne­ment annonce clai­re­ment la cou­leur. Il entend consti­tuer un "cadastre des livrets d’épargne". Une étape logique : avant de taxer, on s’assure que per­sonne ne pourra s’échapper à tra­vers les mailles du filet.

Tous aux abris, mais où ?

Une seule conclu­sion s’impose aux épar­gnants pru­dents : il va fal­loir très vite mettre leur bas de laine hors d’atteinte. Mais est-ce encore pos­sible ? Aujourd’hui, la Bel­gique a conclu des dizaines de conven­tions d’échange d’informations avec des dizaines d’États à tra­vers le monde. Pour le com­mun des mor­tels, ni le Luxem­bourg ni la Suisse ne consti­tuent plus un refuge. Quant aux autres pays euro­péens, leur secret ban­caire est mort depuis long­temps. Fina­le­ment, il ne reste qu’une alter­na­tive : conver­tir son épargne en pièces d’or et les enter­rer au fond du jar­din. Comme à l’époque romaine ou dans Robin des Bois. Parce que ne l’oublions pas : ceux contre qui lut­tait le héros invo­qué en per­ma­nence par tous les assoif­fés de jus­tice sociale, ce n’était pas "les riches", mais l’État, repré­senté par le Prince Jean et le She­riff de Not­tin­gham. Mais où est donc la forêt de Sherwood ?

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