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Exit Cahuzac, mais pas la fiscalité qui l’a conduit à tricher

Publié le 03 avril 2013 par Copeau @Contrepoints

Jérôme Cahuzac a tenté de fuir une fiscalité qu'il a contribué à renforcer. Comment nos dirigeants peuvent-ils nous infliger un régime fiscal qu’ils savent invivable puisqu’eux-mêmes cherchent à s’y soustraire ?

Par Thibault Doidy de Kerguelen.

Exit Cahuzac, mais pas la fiscalité qui l’a conduit à tricher

« Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre… »

Loin de nous l’idée ou l’envie de tirer sur une ambulance, d’autant que nous savons depuis longtemps que le système fiscal français est tellement répressif, tellement confiscatoire qu’il faudrait être un saint désintéressé des choses matérielles ou un fanatique républicain pour ne pas considérer comme de la légitime défense la protection d’une partie de son patrimoine. De tous temps, lorsque les forces du pouvoir volaient et pillaient les récoltes, les avoirs, le bétail, les économies, le réflexe naturel était d’en substituer une partie afin de protéger et de sauvegarder ce qui était possible. Qui a considéré que les juifs allemands qui avaient pu, grâce au secret bancaire suisse, sauver une partie de leurs biens étaient des fraudeurs qui avaient spolié l’État allemand, si ce n’est le spoliateur lui-même ? Pourquoi, à peine la dictature communiste abattue, s’est posée la question de l’indemnisation des familles spoliées par les nationalisation et autres confiscations ? Bien sûr, nous ne sommes pas tout à fait dans le même cas, quoique. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire et de l’écrire, l’infâme impôt (exit tax) que Hitler avait instauré sur le patrimoine des juifs qui souhaitaient quitter l’Allemagne était de 50%, pas de 75 ou 90,5% (avec CSG/CRDS)… Il est donc compréhensible, sinon « normal » qu’un citoyen français, réalisant de bonnes affaires et comprenant tout à coup qu’il a le choix entre se faire payer 600 000€ à l’étranger, et pouvoir ainsi jouir de 600 000€, ou se faire payer en France et ne plus disposer que de 200 000€, choisisse la voie de l’étranger. En votre âme et conscience, ne l’auriez vous pas fait ? C’est dans ce genre de circonstances que l’on découvre que l’illégalité de certains actes ne les rend pas pour autant illégitimes.

« Je n’ai pas et je n’ai jamais eu de compte à l’étranger »

Dans cette affaire, ce qui est particulier est qu'il s'agit du ministre du budget qui s’est fait prendre.

Non pas que cela soit incroyable ou hors du commun ; je vous rappelle que lorsque Monsieur Baroin a été nommé à ce même poste, sa compagne était domiciliée fiscale à… Las Vegas ! Le Canard Enchaîné a sorti l’info, elle a fait la blonde qui avait complètement oublié, promis de régulariser sa situation. Aucune enquête, aucune remise en cause de sa domiciliation les exercices précédents alors que tout le monde savait pertinemment qu’elle vivait à Paris avec son concubin et ne passait pas six mois par an à Vegas…

Mais c’est la personnalité de l’homme qui est particulière. Une personnalité qui montre la capacité incroyable de mentir que peuvent avoir, que doivent avoir ceux qui nous dirigent.

Souvenez-vous, regardez les premières minutes de cette vidéo :


LibertarienTV

Plus fort, encore, les premières minutes de celle-ci :

Rétrospectivement savoureux, n’est-ce pas ? Avez-vous remarqué comme aucun de ses cils ne bouge, comme jamais son regard ne fuit, ne cherche appui à l’extérieur, comme sa respiration est maîtrisée, comme jamais sa voix ne trahit par son intensité la moindre hésitation et comme lorsque l’émotion monte, il sait la canaliser en manifestation d’indignation ? De l’art, du grand art.

Que ceci nous serve de leçon lorsque nous écoutons les déclarations fermes et sincères de ceux qui nous affirment que la crise de l’Euro est derrière nous ou que le blocage des comptes bancaires ne peut pas arriver en France.

Mais revenons un instant à Jérôme Cahuzac

« J’ai été pris dans une spirale du mensonge et m’y suis fourvoyé. Je suis dévasté par le remords. » Après avoir, comme nous venons de le rappeler, vigoureusement nié les accusations de Mediapart, Jérôme Cahuzac a rencontré les deux juges en charge de son instruction hier et leur a confirmé l’existence d’un compte à Singapour sur lequel figurent 600 000€. Il affirme avoir donné les instructions nécessaires pour que l’intégralité des actifs déposés sur ce compte soient rapatriés sur Paris.

Bien évidemment, l’entretien s’est terminé par une mise en examen pour blanchiment de fraude fiscale.

Il termine sa confession sur son blog par ces mots, tout à fait révélateurs :

À Monsieur le Président de la République, au Premier Ministre, à mes anciens collègues du gouvernement, je demande pardon du dommage que je leur ai causé. À mes collègues parlementaires, à mes électeurs, aux Françaises et aux Français j’exprime mes sincères et plus profonds regrets. Je pense aussi à mes collaborateurs, à mes amis et à ma famille que j’ai tant déçus.

Il demande pardon au Président pour le dommage et n’exprime à l’égard des Françaises et des Français que des regrets. Sauf que les dommages d’un ministre qui triche, qui ment, qui pressure les Français d’un pression fiscale dont il se dispense, ce sont les citoyens, et particulièrement les citoyens contribuables qui les subissent, beaucoup plus qu’un Président qui, comme il le dit lui même, a la peau dure.

Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour le conseiller fiscal de Cahuzac, celui avec qui il parlait lorsqu’il a été enregistré. Avoir un client qui se fait pincer, c’est dur, mais quand il s’agit d’un ministre du budget, ça « flingue » ! J’espère pour lui qu’il a prévu sa reconversion et qu’il a pu mettre à l’abri son fichier client, parce que sinon, il y en a quelques-uns qui risquent d’être contrôlés « aux petits oignons » dans les semaines qui viennent !

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