Alors que l'ancien Ministre du Budget Jérôme Cahuzac vient d'avouer qu'il avait menti et détenait bien deux comptes à l'étranger, l'un en Suisse, l'autre à Singapour, l'ensemble de la classe politique pourrait faire de même et cesser de cacher la réalité aux Français.
Un billet d'humeur de Baptiste Créteur.
François Hollande sur le plateau de France 2 le 28 mars
Jérôme Cahuzac, malgré ses nombreux démentis véhéments, détenait bien des comptes à l'étranger. La crédibilité du gouvernement en prend un coup, et avec elle la république exemplaire de notre cher président. L'affaire occupera les médias et l'opinion pendant quelques jours, à la suite desquels le gouvernement pourrait faire preuve enfin d'un courage politique qui a depuis longtemps disparu en France.
Formuler d'intenables promesses ne relève pas du courage politique, pas plus que contraindre les contribuables à des efforts supplémentaires pour maintenir le train de vie de l’État. Remplacer une taxe à 75% sur les revenus supérieurs à un million d'euros retoquée par une taxe sur les entreprises versant des salaires supérieurs à un million d'euros est un joli tour de passe-passe, mais ce n'est pas du courage politique – tour de passe-passe qui a le mérite de témoigner enfin d'une compréhension du lien direct entre salariés et entreprises qui semblait ne pas avoir, jusqu'à présent, effleuré qui que ce soit.
Non ; jusque-là, point de courage politique, point de solutions miracles, point de retour de la croissance. De solutions miracles, il n'y a pas ; et le retour de la croissance n'est, en l'état actuel des choses, pas pour demain, ni même "visible à l'horizon". Le courage politique serait de le dire clairement aux Français. Puisque je crains que personne, parmi les conseillers de notre cher président, n'y ait pensé, je me permets de lui proposer un discours qu'il pourra faire lors de sa prochaine intervention et qui ne manquerait pas d'être largement repris.
Chers Français, c'est avec une grande tristesse que je vous adresse aujourd'hui un message d'espoir infini. La tristesse d'un homme qui, après des années passées dans différentes instances politiques où il a pris des décisions vous engageant et en votre nom, après avoir accédé à la plus haute fonction politique de notre beau pays, se rend compte que le pouvoir politique ne crée pas de richesse, n'en créera jamais et ne peut pas en créer.
Je ne serai pas celui qui fera revenir la croissance, ni celui qui résorbera la récession. Je ne réduirai pas le nombre de chômeurs et ne ralentirait pas son affligeante progression. J'en avais l'intime conviction, j'en ai toujours la volonté, mais je n'en ai pas la possibilité.
J'ai pourtant à ma disposition un État qui dépense chaque année plus de la moitié de la richesse que vous produisez, qui s'endette depuis des décennies et a mis au point un complexe arsenal législatif et réglementaire permettant un contrôle de tous les pans de la société. Mais rien de tout cela ne peut faire revenir la croissance ni créer de la richesse.
Aucune des tentatives de relance n'a fonctionné, ni relance par l'offre, ni relance par la demande. Aucune augmentation des dépenses sociales, aucune interférence étatique dans l'économie n'a favorisé la prospérité et, aujourd'hui, je sais pourquoi.
Je sais que la valeur est subjective. Je sais que les choix qui vous rendent les plus heureux sont ceux que vous faites librement. Je sais que les décisions que vous prenez vous concernant seront toujours plus pertinentes que celles qu'on pourrait chercher à vous imposer. Je sais que l'homme est imparfait et que, s'il peut chercher à éviter que les imperfections des uns ne nuisent aux autres, l’État ne pourra jamais les corriger. Je sais même qu'il est dangereux de chercher à changer les individus et que le projet d'un homme nouveau ne peut jamais déboucher que sur la plus grande tyrannie.
C'est pourquoi, Françaises, Français, je vais désormais m'appliquer à vous rendre la seule condition de votre bonheur et de votre prospérité ; je vais m'appliquer à vous rendre votre liberté.
Cette liberté vous est possible à condition que vous soient garantis trois droits fondamentaux : libertés individuelles, sûreté, propriété privée. La déclaration des droits de l'homme et du citoyen fait de leur préservation le but de toute association politique ; j'en fais aujourd'hui le but unique de l’État français, qui s'astreindra à les garantir pour chacun d'entre vous.
Nous sommes sur le point d'assister à de grands bouleversements. Nous pouvons en être l'origine ou nous pouvons les subir, mais nous ne pouvons pas y échapper. L'endettement de l’État compromet notre avenir ; sa réduction sera ma priorité. Pour y parvenir, je n'ai pas d'autre choix que de réduire le périmètre de l’État. Je vais même plus loin : la réduction du périmètre de l’État n'est pas un mal nécessaire, elle est un bien nécessaire.
J'ai longtemps cru que l’État était les citoyens, que les citoyens étaient l’État ; c'est une erreur. L’État doit servir les citoyens, et par servir, j'entends protéger leurs droits naturels et imprescriptibles, ni plus, ni moins. Je les ai déjà mentionnés, mais, pour avoir fait l'erreur de trop souvent les négliger, je les répète : libertés individuelles, sûreté, propriété privée.
La première étape, relativement simple, rapide et peu couteuse, sera la mise à disposition de tous les citoyens des dépenses de l’État à tous ses échelons administratifs. Nous mettrons ensuite fin aux nombreuses interférences de l’État dans les interactions entre individus. Enfin, nous réduirons l’État à la taille requise pour la préservation des droits naturels et imprescriptibles, ni plus, ni moins.
Certains d'entre vous seront sans doute mécontents. Ils perdront des avantages acquis au fil du temps et jamais remis en question, mais qui n'ont pour autant jamais été légitimes et que ont toujours été financés par l'argent des autres. A ceux-là, je dis qu'ils pourront s'estimer heureux d'avoir pu bénéficier pendant si longtemps de ce qui n'a jamais été à eux.
A tous, j'affirme que votre liberté retrouvée vous rendra plus prospère. Vous pourrez faire librement vos choix et serez sanctionnés par la seule réalité, qui vous donnera raison ou tort mais jamais ne vous mentira ni ne vous contraindra. Vos décisions, prises librement, n'en seront que plus pertinentes et créeront plus de valeur ; et cette valeur, c'est vous qui en bénéficierez.
Enfin, chers compatriotes, nous honorerons notre devise. Nous serons de nouveau un pays de liberté. Nous serons un pays où l'égalité est garantie à tous, dans le seul sens possible : l'égalité des droits. Et, je l'espère sans pouvoir en être certain, nous serons un pays de fraternité, où chacun ne percevra pas son voisin comme un bénéficiaire de la spoliation dont il est victime ni comme la source de contraintes, mais comme un égal avec lequel ses interactions sont librement consenties.
Ce n'est pas avec résignation que je vous parle, mais avec un espoir infini, malheureusement empreint de la tristesse de n'avoir su plus tôt être, enfin, le président du changement.
Courage, Monsieur le Président.