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Comment Cahuzac a (aussi) tué l'UMP

Publié le 05 avril 2013 par Juan
Comment Cahuzac a (aussi) tué l'UMP
Maigre réjouissance ? Non, sinistre constat.
L'UMP et ses satellites sortent également joliment affaiblis de la bombinette Cahuzac. Le poulet sans tête n'a pas conscience qu'il devra bientôt passer à la grillade. Où part la démocratie ?
Depuis les aveux de l'ancien impétrant de la lutte contre la lutte contre la fraude fiscale, les ténors et sous-fifres de l'UMP se sont succédés sur toutes les ondes et les tribunes pour nous expliquer combien la République irréprochable n'était pas là, combien s'était scandaleux, combien il fallait réagir et commissionner des cohortes d'enquêteurs parlementaires pour éclaircir la chose.
1. Le scandale remet un débat que cette droite déteste, celui sur l'évasion et la fraude fiscales. La lutte contre cette dernière sous Sarkofrance fut une joyeuse fumisterie, un urgent affichage pour sauver le système et faire patienter la foule. De la liste des 3000 comptes à la disparition des paradis fiscaux, des ramifications suisses de l'affaire Bettencourt au Premier Cercle richement doté en exilés fiscaux, des comptes suisses de l'ancien conseiller Thierry Gaubert à l'affaire Wildenstein, la séquence fut aussi pitoyable que le sarkozysme était primaire. Bref, le bilan de cette période encore si proche est si mauvais qu'on a peine à croire les nouveaux parvenus de la morale publique "de droite". La liste est encore longue des affaires notamment financières de l'ancienne République irréprochable.
Comment écouter et croire ces anciens ténors commenter le dossier Cahuzac ?
Ainsi, Gilles Carrez,  ancien rapporteur UMP du budget UMP des 5 dernières années, silencieux pendant les affaires Woerth et Wildenstein, osa la remarque: «Je veux voir si l’ensemble des questions qui méritaient d’être posées sur cette affaire l’ont été et si les réponses apportées sont aussi précises qu’elles devraient l’être». 

Ainsi Claude Goasgen, député UMP du 16ème arrondissement de Paris, osait réclamer la démission de Pierre Moscovici. L'homme, adepte de l'abstention en cas de duel FN-Gauche aux élections, fut l'un des avocats du ministre Woerth.
Ainsi, Jean-François Copé, l'ami de Ziad Takkiedine et ancien avocat d'affaires pendant qu'il était député, osait: «La seule issue possible, la seule, est qu’un remaniement gouvernemental de grande ampleur, Premier ministre y compris, permette à François Hollande de redonner un peu de sérénité à notre pays, de changer de politique». 

Ainsi Henri Guaino, le sarkophile transi, osait encore mettre en doute l'indépendance de la justice. sans doute avait-il de bons et efficaces souvenirs de sa période sarkofrançaise: "Dès qu'une affaire sort et éclabousse le PS, il y a une activité judiciaire de l'autre côté qui se déclenche." Il pensait à la perquisition du domicile et du bureau de Patrick Buisson, dans l'affaire des sondages occultes de l'Elysée version Sarkozy.
2. Au grand quizz du "qui-savait-quoi" déclenché par les aveux de l'ancien ministre lundi après-midi, les ténors de la droite sont également des suspects de premier plan. La planque antifiscale de Cahuzac date d'il y a longtemps. L'inspecteur du fisc Rémy Garnier, auteur de la première enquête, a expliqué avoir remis son rapport à sa hiérarchie, une hiérarchie forcément au courant des agissements de l'homme puisqu'il fut même sanctionné pour sa curiosité bord-cadre entre 2004 (Copé, ministre du Budget) et 2008 (Woerth).
On s'interroge même de savoir comment Marine Le Pen pouvait ne pas être au courant, puisque l'un de ses actuels conseillers a ouvert le compte incriminé il y a 20 ans. Plus tard, Jean-François Copé fut ministre du Budget. Puis Eric Woerth et enfin François Baroin. A l'époque, surveiller l'opposition au prix de quelques contorsions avec le principe de la séparation des pouvoirs était pratique commune, usuelle et normale.
Que penser de l'avocate de Mme Patricia Cahuzac, Isabelle Copé, soeur de Jean-François... ? Pouvions-nous imaginer que le président par effraction de l'UMP ait été au courant de l'affaire sans rien dire avant qu'elle n'éclate ?
Oui.
3. Très tôt, la retenue voire la compassion exprimées par la plupart des ténors de l'UMP nous avait troublé. Un sarkozyste nous expliqua que cette droite qu'il encensait encore si récemment que cette droite-là avait de la dignité dans la gestion des affaires et autres scandales. Nous pouvions pouffer devant cette naïveté. La mise en examen de Nicolas Sarkozy quelques jours plus tard démontra s'il était nécessaire combien l'ancien clan de Sarkofrance savait se ressouder dans les outrances. Après avoir chargé Hollande et Moscovici, le sieur Copé a eu ce réflexe solidaire: "il ne s'agit pas d'accabler sans fin Cahuzac. A quoi bon! C'est à la justice de faire son travail. A l'homme de se reconstruire".
4. Hasard du calendrier et/ou mauvais coup de l'inconscient, une vingtaine de députés UMP ont déposé fin mars une proposition de loi pour «favoriser le retour des exilés fiscaux». 
On s'étrangle, on s'étouffe, on éclate de rire. Quel sens du timing, dix jours après la démission de Cahuzac, 10 autres jours avant la "déflagration"...
5. Même le Figaro tente de se refaire une santé, en vain. L'article, trop tardif faute d'information de premier plan, sur "l"ami du président et de la finance" était curieux, anachronique et sans appel. Le même journal, en Sarkofrance, avait longuement attendu avant de faire une brève sur "l'ami Guy" Wildenstein
6. Sans rapport avec l'affaire Cahuzac, voici qu'un autre soupçonné et très indigné, Nicolas Sarkozy lui-même, bénéficiera d'une demande de non-lieu par le parquet dans l'affaire Bettencourt. Que la justice est donc indépendante ! Applaudissons.
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