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Tous pourris ?

Publié le 09 avril 2013 par Copeau @Contrepoints

L’affaire Cahuzac discrédite encore davantage la classe politique. Mais s’en tenir au « tous pourris » est la fausse réponse à un vrai fléau, la corruption.

Par Jacques Garello.
Un article de l'aleps.

Tous pourris ?
La classe politique, les médias, les hauts fonctionnaires, les banquiers : tous pourris !

L’affaire Cahuzac va discréditer encore davantage – si possible – nos dirigeants, nos oligarques, nos partis. Le fossé se creuse entre ceux qui détiennent le pouvoir politique et économique et ceux qui le subissent, voués au chômage, à la baisse du pouvoir d’achat, à la hausse des prélèvements.

Mais s’en tenir au « tous pourris » est la fausse réponse à un vrai fléau.

Le vrai fléau c’est celui de la corruption. Le Conseil de l’Europe la définit comme "l’utilisation et l’abus du pouvoir public à des fins privées". C’est un mal généralisé, un mal bien analysé, un mal bien dangereux.

C’est un mal généralisé : la corruption sévit dans tous les pays, même les plus riches et les plus développés. Les statistiques publiées chaque année par Transparency International, une ONG spécialisée dans la mesure de la corruption, ne laissent aucun doute. Si quelques pays passent pour exemplaires, comme la Finlande ou le Danemark, d’autres sont gravement atteints, États-Unis et France figurent autour de la vingtième place dans un classement de 180 pays. L’Italie et la Russie passent pour les plus corrompues en Europe.

C’est un mal bien analysé. La corruption est étroitement liée à l’importance de l’État et de sa bureaucratie. Sans doute y a-t-il des formes subtiles de corruption à l’intérieur du secteur privé marchand : des caissiers indélicats, des cadres et dirigeants d’entreprises qui pratiquent des pots de vin dans des contrats privés, des financiers véreux ou des médecins qui dichotomisent. Mais, pour l’essentiel, le fléau de la corruption est lié à la présence et la puissance des administrations publiques. La corrélation statistique est évidente entre les pays où l’indice de liberté économique est le plus bas et l’indice de corruption le plus élevé.

L’explication en est bien simple : quand le pouvoir politique contrôle étroitement la vie économique, les particuliers et les entreprises ne peuvent vivre qu’en payant un lourd tribut aux dirigeants et aux bureaucrates. Le blocage des prix ou les contingentements font naître le marché noir. Une réglementation pléthorique (400.000 textes en France) alourdit les procédures et freinent l’initiative ; on peut raccourcir les délais en frappant à la bonne porte, en ayant le bon geste. Pour obtenir un permis de construire, un logement social ou un marché public, les enveloppes sont d’une aide précieuse. Ainsi, la corruption est-elle incontestablement le fruit du pouvoir. « Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument », disait le célèbre philosophe et historien anglais lord Acton. La maxime exprime une réalité aussi vieille que le monde.

Ce mal est dangereux, il menace la société. Du seul point de vue économique, il fausse les prix, détourne l’épargne et l’investissement : Transparency International estime le coût de la corruption dans les échanges internationaux à 3% de la valeur de ces échanges. Encore ne tient-on pas compte des pénuries et des gaspillages engendrés par la mauvaise affectation des ressources : l’argent ne va pas là où il aurait dû aller suivant les critères d’un marché libre, d’un libre choix des consommateurs et des producteurs.

Mais, surtout, du point de vue social, il fait planer un doute généralisé sur l’origine de la richesse. Toute richesse devient suspecte, car on ne sait si elle est le fruit de l’entreprise, du travail, de l’épargne, du mérite, ou si elle n’est que le résultat de malversations, de malhonnêtetés, de privilèges, etc. Plus personne n’a confiance en plus personne, la jalousie et la délation s’installent. La société ne peut plus être une « société de confiance », apportant progrès personnel et harmonie sociale : elle est société de défiance, société de pouvoir.

Devant ces ravages, comment ne pas comprendre des « indignés », comment ne pas rejeter tout ce qui vient « d’en haut » ?

Le « tous pourris » engendre le populisme. Puisque c’est le pouvoir qui corrompt, et qui est corrompu, il faut l’abattre. Et le populisme appelle la révolution. Mais quel est le résultat ? C’est l’apparition d’un pouvoir qui, pour être révolutionnaire, républicain, ou démocratique, n’en est pas moins un pouvoir, qui se révèlera bien vite aussi corruptible et corrompu que le précédent. Chassez la corruption, elle revient au galop, et on s’aperçoit cinq, ou dix, ou vingt ans plus tard, que la révolution est à refaire. À toutes les époques il y a eu des Sieyès, des Fouché, des Talleyrand.

La solution n’est donc pas de renverser le pouvoir et de pratiquer une alternance, fût-elle démocratique. Elle est de limiter le pouvoir. La meilleure arme contre la corruption, c’est de sortir des mains de l’État une série de prérogatives qu’il s’est indûment appropriées, c’est de réduire le pouvoir politique à sa seule dimension, conformément au principe de subsidiarité : protéger la liberté et la sécurité des biens et des personnes. L’issue libérale est la seule possible. Malheureusement, pour le moment, ce n’est pas encore de ce côté-là que regarde notre classe politique. Elle ne veut pas lâcher ses proies, et un Français sur deux est du côté des prédateurs. C’est plus que jamais le devoir des libéraux de persuader le peuple et ses représentants qu’il faut en finir avec le drame de la corruption, qui plonge le pays dans la division et le crime. Il est plus que jamais temps de restaurer la responsabilité, la moralité, vertus qui accompagnent nécessairement la liberté.

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