Vous ne connaissez pas le haïku qui dans sa forme surprend les non-initiés, vous ne connaissez rien du Maroc... Lisez un mot puis un autre mot...
S'affiche, à vos yeux, une image. Vous la regardez, telle une photo, par vous, prise un jour de voyage. Les couleurs sont à la fois chaudes et douces, et, lentement, par « on » ne sait quelle magie, vous vous sentez emportés vers des terres inconnues, le souffle léger d'un vent tiède et légèrement iodé effleurant votre peau.
« Bordée de lauriers
roses, palmiers, acacias, la Loire des sables. »Vous devinez le soleil qui joue, de ses rayons, dans des architectures témoins d'un passé zébré, en long, en large, et parfois en travers, par les hommes dont l'histoire « s'est écrite » dans un mélange de bonheurs et de terreurs.
Étrange et captivant... Une pioche découverte à Fez
« Pioche découverte
aux premières fondations - Légende de Fas. » et vous voilà voyageur du temps, élève d'un cours d'histoire et de géographie. Après vous être baignés dans les ocres des sables du désert, après avoir touché, de vos yeux, poteries, tapis, cuirs ciselés ou broderies et maroquinerie, vous rêverez alors des jours de « vie oasienne ». Et, miracle des mots, tout à coup, sans trop savoir pourquoi, vous vous attendrissez... Une vieille femme, assise devant sa porte, fume sa pipe: « A quoi pense-t-elle ? Au présent ? Au passé ? À l'avenir ? Ou, tout simplement aux Hommes ? » « Une vieille femme assise devant sa porte - fumée d'une pipe. Des chants dans les champs, les izlan prêtent ardeurs dans les durs travaux. »Arrivés à Larache, l'odeur du poisson grillé, de l'oignon caramélisé pénètre vos narines.
« Sucre caramel, œufs et sucre vanillé avec lait tiédi, la cuisson au bain-marie, délicieux flan de Larache. »Un peu plus loin, la saveur d'un flan excite vos papilles et vous fait saliver.
Raymond Matabosch excelle, donnant aux mots un étrange et subtil pouvoir.
Si ses mots mettent parfois le bout de votre nez dans le « nauséabond », s'ils vous percutent de plein fouet, vous agressent, c'est que Raymond Matabosch, le haïkiste, fait partie de ces rares « vrais » témoins de la vie des hommes et de la terre qu'il observe, qu'il écoute, depuis des années, et, surtout, qu'il aime à partager et qu'il sait, avec son âme de vagabond et de Sans Domicile Fixe, de volcans en volcans, de part le monde, son coeur et ses tripes, et si bien raconter.
« Nom de Lmiâra, vieux document historique, la tombe d'un juif. »Si ses mots, parfois, dérangent, - ne vous en déplaisent, vous, par eux, « dérangés » -, tout au long des pages, des haïku et des tanka composant le recueil « Pays du couchant lointain », ils vous caressent, vous réchauffent, vous émerveillent, vous font rêver...
Et, le plus surprenant, si ses mots vous sont inconnus, la plume, tout en délicatesse du poète, vous en offre la définition.
Chaque syllabe vous enveloppe d'une image, d'un son, d'un parfum... Elle vous habille et vous invite au voyage. Ne résistez point à la tentation.
« Mais ne dit-on pas qu'avant elle fut terre d'Égypte héritage des Atlantes! » Pour vous, homme ou femme marocains, ou vous étrangers ayant foulé cette terre, la lecture de ce recueil ne pourra qu'en réveiller vos sens ! Pour moi, cette lecture-aventure a été émouvante et je souhaite que la main qui a pris la mienne pour me faire traverser le Maroc, la prenne encore pour d'autres voyages...Jacqueline Chadutaud, poète.