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Charité à la Gare d'Angers...

Publié le 16 avril 2008 par Gchocteau

Dimanche, en rentrant de Paris, je descend de mon train, traverse la gare et rejoins le parking pour récupérer ma moto. Je m'arrέte à la machine pour payer mon ticket. Un monsieur se tient sur la droite, il a environ la cinquantaine, dégarni et de la rondeur physique de ceux qui mangent mal... Quand ils mangent.

Il s'approchent de moi en bafouillant quelques mots parmi lesquels je reconnais "chômeur". Ce serait donc une personne faisant la quête, l'aumône, la manche... Je paye et je lui adresse un "non non" froid, impersonnel, vide et gratuit. Sans réagir à ma non réponse, il interpelle le payeur suivant, sans bouger, sans articuler plus, sans vie, tel un robot.

Je m'éloigne de ce pardessus gris au crâne dégarni. On ne peut l'appeler "homme" tellement son geste s'apparente plus à un geste programmé dans une machine. Pourtant, c'est bien un homme qui se tient là à côté de la machine, et non l'inverse. Cet homme a un prénom, une vie, des souvenirs, des sentiments, un passé et un avenir. Quoique, pour ce dernier élément, je n'en sais rien en fait.

Comme à chaque fois que cette situation se produit, je réfléchis... Aurais je du donner ? Et si non, pourquoi ? Et si oui pourquoi ? Et je me rappelle mes cours d'éthique et de déontologie dans ma formation de travail social. Ce cours faisait partie des révélations qui m'arrivent souvent dans ma vie : celle de mettre une aspect théorique sur un ressenti personnel. Genre : "Je fais cela" ou "je pense cela", et quelqu'un vient te dire la cause, en s'appuyant sur des milliers de pages de recherches, de réflexions et des discussions. Probablement un de mes fameux manques théoriques / universitaires dont j'ai tellement à souffrir...

Je me rappelle de ce cours dont l'un des sujets avait été la charité. Pour rappel :

La charité est à l'origine une des trois vertus théologales, dans le christianisme (aux côtés de la foi et de l'espérance) - c'est la vertu reine : l'amour de Dieu et du prochain.
La mise en pratique de la vertu de charité à l'égard du prochain est une œuvre de bienfaisance, un don, une aumône. Il s'agit alors d'une initiative privée désintéressée, dictée par la foi (chrétienne ou autre : le terme, originellement chrétien, est appliqué à des pratiques semblables dans d'autres religions). Elle consiste à décider d'offrir du temps, un service, de l'amour, de l'argent etc. à une personne dans le besoin. Le terme désigne d'une façon générale la vertu qui porte à faire le bien d'autrui. Extraits de la définition de Wikipedia

Le geste de charité est donc un geste personnel, volontaire et basé sur des valeurs. Et mon cours m'avait fait pointer des questions terribles :

- Pourquoi on donne plus facilement à une mère et son enfant ?
- Pourquoi on donne plus facilement à un enfant ?
- Pourquoi on donne plus facilement à une vieille femme ?
- Pourquoi on donne plus facilement à un handicapé ?
- Pourquoi on donne plus facilement à une personne sobre ?
- Pourquoi on donne pas facilement à un ivrogne ?
- Pourquoi on donne pas facilement à quelqu'un d'agressif ?
- Pourquoi on donne pas facilement à un jeune homme punkifié ?

Imaginez... Vous marchez dans la rue... Un quadra vous saute dessus, vous arrose de son haleine viticole "Père Juju", vous insulte copieusement dans un langage fleuri (Mais difficilement compréhensible quand même !) et vous tend sa main noire de crasse ... Il veut une pièce ! En général, vous passez votre chemin en grommelant "'l'a qu'à arrêter de picoler, i's'ra moins con et aura plus d'argent !". Maintenant, imaginez... Vous marchez dans la rue... Une trentenaire vous aborde... Elle est plutôt petite, courbée, le regard vers vos pompes, elle porte un robe sobre et tend sa main vers vous en vous invitant poliment à donner un peu pour elle et son bébé.... Il est probable que vous soyez plus enclin à donner.

Pourtant, l'un et l'autre mérite de vivre tout autant. Quelle est la différence entre les deux ? VOTRE regard moral, en fonction de vos valeurs, de votre culture, de votre philosphie... Et de votre pitié donc...

Terrible non !? La charité induit chez nous une classification dans la pauvreté, basée sur une morale...

La morale (du latin moralitas, « façon, caractère, comportement approprié ») se rapporte au concept de l'action humaine qui concerne les sujets du juste et de l'injuste, également désignés sous le nom « bien et mal ».
Ils sont utilisés dans deux contextes : la distinction individuelle d'une part et d'autre part les systèmes de principes parfois appelés « conduite morale » partagés au sein d'une communauté culturelle, religieuse, civile ou philosophique.
Les morales personnelles définissent et distinguent parmi de bonnes et mauvaises intentions, motivations ou actions qui ont été apprises, engendrées, ou autrement développées par les individus composant ces communautés. Extraits de la définition de Wikipedia

On classifie les pauvres, on classifie les misérables, on classe, on trie, on sélectionne ceux qui aurait le droit à "récupérer un peu" alors que les autres n'auront même pas le dernier droit qu'on pourrait leur accorder, celui de gagner un peu de la dignité perdue.

A chaque fois qu'un mendiant vient me voir, je refuse de donner pour trois raisons :
- Pourquoi lui et pas l'autre ? ;
- Parce que ce n'est pas à l'individu de palier la carrence d'un système d'impôts qui devrait faire que ces situations cessent. Seule la solidarité mécanique, c'est à dire par l'impôt, fera que la vraie égalité sera traitée ;
- Parce que tout le monde a le droit au minimum et à l'accompagnement social. Certes, il n'est pas parfait et les travailleurs sociaux font souvent des suivis avec des bouts de chandelles.

N tag : Travail social, Charité, Mendiant, Angers, Morale, Ethique

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