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A quoi sert le bcg ?

Publié le 06 janvier 2013 par Dominique Le Houézec

A QUOI SERT LE BCG ?En matière de vaccination, il est important de distinguer chaque maladie infectieuse et chaque vaccin correspondant.Il serait erroné de croire qu'une forte immunité de groupe acquise par une vaccination généralisée ou presque serait la "solution finale", unique et magique contre la circulation d'un agent infectieux.



On cite volontiers en exemple l'éradication de la variole comme étant un succès du dogme sacré de la vaccination généralisée. C'est une erreur fondamentale commise par les partisans irréfléchis et absolutistes du tout vaccinal. Comme il l'est clairement expliqué dans un autre article de ce blog, la variole a été vaincue grâce à un isolement des populations touchées associée à une vaccination ciblée en anneaux ("ring vaccination").  Un autre exemple caricatural de la faillite de l'immunité de groupe ("herd immunity" ou immunité de troupeau chez nos voisins anglo-saxons) est représenté par celui de la tuberculose et de son vaccin correspondant, le BCG (Bacille Calmette et Guérin du nom des deux médecins français qui ont créé ce vaccin).

Une controverse s'était déjà fait jour après l'étude de l'OMS en double aveugle, BCG (2 souches différentes) contre placebo (1). Celle-ci avait été réalisée sur une communauté de 260.000 personnes de l'état de Madras en Inde suivies avec un recul de 7 ans 1/2. Aucun effet protecteur du BCG n'avait alors été mis en évidence. Depuis les données épidémiologiques et le recul du temps permettent de mettre en évidence la médiocrité patente de la protection globale conférée par ce vaccin.

Trois techniques de lutte contre la tuberculose existent sur la planète quant à l'utilisation du BCG :


A QUOI SERT LE BCG ?- Ou bien l'on vaccine tous les enfants (à un âge variable), c'est la technique la plus commune, encore utilisée dans de nombreux pays d’Europe (Irlande, Portugal, Grèce, Pologne...), mais surtout les pays d’Asie (Chine, Inde, Japon...), d'Afrique et d’Amérique centrale et du sud (Brésil, Argentine...)

- Ou bien l'on sélectionne certaines populations que l'on pense à risque (enfants de famille ou originaires de régions à forte endémie). C'est ce qui a été choisi par la Suède en 1975, ou nos voisins de Suisse en 1980, en Belgique ou en Grande-Bretagne en 2005, après être passés par une phase de vaccination généralisée. 

A QUOI SERT LE BCG ?

Politiques vaccinales selon les pays

  C'est ce qui a également été fait chez nous en 2007 mais en élargissant les populations dites à risques à certaines régions Françaises (Paris et sa couronne ainsi que la Guyane) sans se préoccuper des conditions socio-économiques des enfants à vacciner (les bébés des quartiers chics de Neuilly seraient donc aussi à risque que ceux des squats de Saint-Ouen).

- Ou bien l'on a jamais utilisé le BCG ou on ne l'utilise plus ou exceptionnellement. C'est bien sûr le cas des USA, du Canada (sauf pour leur populations natives), l'Australie (sauf pour les populations aborigènes), les Pays-Bas, le Liban...

Quels sont les résultats de ces diverses techniques en terme d'incidence ?


Rappelons préalablement pour les nuls en épidémiologie que l'incidence annuelle d'une affection est le nombre de nouveaux cas pour 100.000 habitants et par année.
- En France, après une ère de vaccination généralisée et au moment du passage à la vaccination sélective, l'incidence était de 6/100.000 habitants en 2009 pour une couverture vaccinale estimée à 78% en 2007.
- En Irlande, où les conditions socio-économique paraissent similaires à celles de notre pays, cette incidence est plus élevée, 9/100.000 pour la même année 2009 alors que pourtant le taux de vaccination est très élevé, 94%, avec des bébés qui sont vaccinés dès la naissance.
- En Suède l'incidence est équivalente à la nôtre, 6/100.000 en 2009, avec un taux de couverture vaccinale qui n'est seulement de 18% et une vaccination ciblée sur les seules populations immigrées de pays endémiques.
- Aux USA où l'on ne connait pas le BCG, on fait pourtant mieux avec une incidence à 4/100.000 habitants.

A QUOI SERT LE BCG ?

Incidence de la tuberculose

- Dans certains pays où le taux de vaccination est très fort mais les conditions sanitaires médiocres et les conditions socio-économiques très moyennes voire insuffisantes, l'efficacité du BCG parait bien problématique. Par exemple, le Brésil connait une incidence de 45 cas/100.000 habitants par an alors que le taux de couverture vaccinale estimée en 2002 serait de 99% avec des enfants vaccinés à la naissance. 

  La palme de "l'effet placebo" du BCG revient à l'Afrique du Sud avec un taux d'incidence de 971 (en comptant parmi eux, comme pour les autres pays,  les cas d'infections chez les personnes porteuses du HIV) pour une couverture vaccinale à 90,5% en 2006.

Que peut-on en tirer comme enseignements ?


- Que la fameuse couverture vaccinale soit nulle ou quasi totale, cela n'influence visiblement pas la prévention de la maladie tuberculeuse.
- Que le vaccin de messieurs Calmette et Guérin est un vaccin surement très imparfait et donnant une protection illusoire à long terme dans deux populations de niveau de vie similaire qui ont adopté des techniques vaccinales différentes.
- Que cette maladie est favorisée par les conditions de vie particulièrement défavorables, surpopulation, pauvreté, dénutrition, manque d'hygiène, immunodépression (SIDA).


Et donc que les meilleurs moyens de lutte contre la tuberculose reposent avant tout sur:


- l'amélioration des conditions d'hygiène (accès à l'eau courante en particulier) et de nutrition des populations défavorisées.
- le dépistage en particulier dans les populations à risque de l'infection qui peut être latente. Mais dont le test cutané de dépistage, l'IDR (Intradermoréaction par Tubertest), est malheureusement faussé par la pratique préalable d'un BCG qui positive ce test et en rend l'interprétation souvent délicate.
- le traitement antibiotique correct et suffisamment prolongé des tuberculoses latentes et patentes associé à un dépistage des cas contacts proches.

Pour les épidémiologistes en herbe que cela intéresse, on retrouve tous ces renseignements précis et détaillés sur le site du "BCG World Atlas" dont la vidéo ci-dessus est extraite. Ce site a été mis en place par des médecins de l'université canadienne de Mac Gill avec des fonds de l'agence de santé publique du Canada. La méthodologie utilisée est détaillée (2) sur le site de la revue indépendante de tout conflits d’intérêts PLoS medicine.

Dominique LE HOUEZEC

(1) Trial of BCG vaccine in South India for tuberculosis prevention, first report. Bulletin of the WHO. 1979. 57(5) : 819-827(2) Zwerling A, Behr MA, Verma A, Brewer TF, Menzies D, et al. (2011) The BCG World Atlas: A Database of Global BCG Vaccination Policies and Practices. PLoS Med 8(3): e1001012

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