Cette étude économique, menée par une équipe de l’Inserm en collaboration avec d’autres instituts de recherche dont camerounais, est la première à démontrer que, dans les pays à faibles ressources, un suivi biologique des patients infectés par le VIH et sous traitement antirétroviral peut être coût-efficace, le tout en tenant compte des conditions réelles des soins. Ces conclusions, publiées dans l’édition du 18 avril du Lancet Infectious Diseases et retransmises par l’Institut de recherche pour le développement (IRD) pourront inciter les politiques à identifier le plus précocement possible les patients en échec thérapeutique, à adapter le traitement de ces patients et réduire l’inégalité des soins entre le Nord et le Sud.
Le rapport coût-efficacité reste un des obstacles majeurs, avec la disponibilité des équipements, à une mise en œuvre élargie du suivi biologique des patients infectés par le VIH et sous traitement antirétroviral, dans les pays à faibles revenus. Ce suivi qui s’effectue dans les pays riches par des mesures régulières de la charge virale du VIH et des lymphocytes CD4 est pourtant nécessaire pour identifier le plus précocement possible les patients en échec thérapeutique afin de pouvoir adapter leur traitement, explique le communiqué IRD-Inserm.
"Quand cela est possible" ? C’est le « bémol » apporté par l’Organisation mondiale de la santé qui recommande de pratiquer ce suivi biologique dans les pays du Sud, sous cette condition. Suivi clinique exclusif en raison de la réduction des budgets pour les uns, ou accès au suivi biologique pour les autres, accepter un tel arbitrage fondé sur des justifications purement financières irait à l’encontre d’un objectif d’égalité d’accès aux soins.
Le suivi biologique peut-être aussi « coût-efficace » que la mise sous traitement : Cette étude menée entre mai 2006 et avril 2010 dans 9 hôpitaux de district ruraux au Cameroun en collaboration avec, entre autres collaborations, des équipes de Hôpital Central de Yaoundé, a comparé 459 patients bénéficiant les uns d’un suivi clinique exclusif trimestriel et les autres bénéficiant en plus d’un suivi biologique au départ du traitement puis tous les 6 mois. Leur évaluation économique démontre que,
· le suivi biologique devient coût-efficace au Cameroun dès lors que le coût du suivi reste inférieur à un certain seuil (ici 69$). Ce résultat montre, en substance qu’un certain nombre de pays, dont le Cameroun, disposent en fait du niveau de richesse nécessaire qui leur permet de mettre en œuvre ce suivi biologique.
· lorsque le coût des 2 tests < 20$, le rapport coût efficacité du suivi biologique d’un patient infectés par le VIH et sous traitement est similaire à celui la mise sous traitement d’un nouveau patient.
· le coût total actuel du suivi biologique avec ces 2 tests varie entre 63$ et 95$ mais une augmentation de la demande pourrait le faire baisser fortement.
L’étude montre ainsi un cercle vertueux, de la faisabilité de mettre en œuvre ce suivi biologique dans de nombreux pays en développement, à la baisse des coûts par l’élargissement du dispositif et le développement de nouvelles technologies bon marché et enfin à une augmentation significative du nombre d’années de vie gagnées.
Source: The Lancet Infectious Diseases 18 April 2013 doi:10.1016/S1473-3099(13)70073-2Monitoring of HIV viral load, CD4 cell count, and clinical assessment versus clinical monitoring alone for antiretroviral therapy in low-resource settings (Stratall ANRS 12110/ESTHER): a cost-effectiveness analysis (Visuel UNITAIDS)